En rentrant de Kindia où il a participé à une formation de lOMS, un de nos reporters a fait chemin sur Cona-cris avec de nouveaux ponctionnaires de l’administration guinée-haine fraîchement sortis de la formation civilo-militaire. Retour sur un voyage plein d’anecdotes.

La formation civilo-militaire, certes moins bruyante désormais, se poursuit, notamment au Camp Samoréyah de Kindia pour les nouvelles recrues des effectifs de la ponction publique. La semaine dernière, près de 800 nouveaux élèves ont bouclé les cours dans cette garnison militaire. Ils ont commencé à rallier leurs coins d’origine le 13 août, non sans enthousiasme.

Il est 18h mercredi 13 août, la contournante de Kindia grouille. De nouveaux ponctionnaires, ayant accompli leurs sévices civilo-militaires, libérés ou plutôt se sont libérés, cherchent à regagner leurs localités respectives. Les responsables du camp auraient donné le feu vert aux résidents et ceux des buissons de l’intérieur de rentrer. Seulement voilà, une centaine d’autres, venue de Cona-cris en a profité pour se barrer. Ils n’en pouvaient plus du camp et de ses bidasses « sans pitié ». Ces bouffe-la-craie embarquent dans une dizaine de teufs-teufs, à leurs frais, puisqu’ils n’ont pas voulu attendre les camions militaires censés les transporter jusqu’au Camp Alpha Yaya de Cona-cris, annoncés depuis 3 jours, mais qu’ils ne voyaient toujours pas. Autour du mât le 13 août, il leur est dit que les camions seraient à Kindia à 23h. Mais à Samoréyah, on leur a fait voir de toutes les couleurs. Faut plus attendre.

Un teufteuf embarque huit de ces cadres (en bois), des bouffe-la-craie, encore dans leurs tenues kakis comme leurs élèves collégiens. Mais eux, se font plutôt appeler «officiers de réserves». Sur les 130 kilomètres séparant la cité des agrumes de Cona-cris, ils ne parlent que de leur calvaire et du « dur » caractère de certains bidasses formateurs. Les anecdotes fusent, commençant par leur première nuit à Kindia. Elle était loin d’être un repos: «Moi, je m’attendais à ce qu’on nous dise de ranger les sacs, prendre un bain, manger et d’aller se reposer jusqu’au lendemain. Mais ils nous ont fait chanter et danser jusqu’à 3h du matin. Beaucoup ont pleuré toute la nuit. Je ne le cache pas, j’ai versé des larmes, j’avais même regretté d’être venu», révèle un certain Yattara, chargé de cours de français dans une école de l’arrière-bled. La première semaine fut toute aussi dure. Selon eux, outre le fait de dormir parfois dehors, obligation leur est faite de se coucher à 23h, pour se réveiller à 3 heures et «gare à toi si on te trouve sur ton matelas, après le coup de sifflet.»

George, le médicament des recrues

Dans la narration de ces recrues, un nom revient avec insistance. Celui d’un certain George. Ce bidasse leur aurait fait voir de toutes les couleurs, leur aurait fait avaler toutes sortes de couleuvres. Il leur en voulait notamment à cause de leur faible niveau en langue: «Vous ne connaissez rien du tout, vos têtes sont vides. Des enseignants qui ne savent même pas chanter correctement l’hymne nationale», leur lançait ce George de façon répétitive. «George est méchant, il aime faire souffrir les gens. Tout le contraire de Laurent (un autre formateur, ndlr), qui n’aime pas humilier les gens, surtout les doyens», lance un autre élève.

A les entendre s’exprimer, l’on se rend compte que le fameux George n’a pas totalement tort. Comme ce Yattara qui n’a cessé de prononcer «Un avancée significative». Un autre qui dit que le programme de l’enseignement pré-universitaire guinéen «doit être revoir». Iskine !

George, piqué au vif ?

Ces nouvelles recrues n’ont pas oublié non plus le casse-tête que la visite du Chef d’état-major de l’armée de terre aurait engendré. Celui-ci, parti à Kindia leur présenter les condoléances suite au décès d’un des leurs, l’hôte de marque (déposée) a voulu en savoir davantage sur les conditions de leur stage. Il aurait notamment demandé ce qu’ils mangeaient. «Le Sakarba» (riz que les bidasses mangent dans les camps, ndlr), se seraient-ils empressés de répondre au chef d’état-major de l’armée. Leur réponse a eu le don d’énerver les formateurs. Cachaient-ils quelque chose au général Abdoulaye Keïta ? En tout cas, dès son départ de Samoréyah, les représailles ont plu sur les recrues: «Vous nous avez humiliés devant nos chefs, maintenant, vous ne mangerez qu’au coup de sifflet», aurait juré le nommé George. A partir de là, les recrues enchaînent sanctions et voyages au «Portugal», entendez par là le gnouf: «Même quand tu regardes George, il t’enferme ou il te demande de puiser entre 50 et 200 bidons d’eau, de ramasser 200 ou 300 pointes, et pendant la nuit. Heureusement qu’il leur était interdit de nous frapper, sinon…»

Lavage de cerveaux

Malgré le calvaire, ces gens-saignants reviennent de Kindia enthousiastes, déterminés à exécuter ce qui leur est dispensé, convaincus qu’ils ont désormais à faire à des autorités déterminées à changer le bled. Leur raisonnement frise même un lavage de cerveau. Pour eux, le gêné-râle Doum-bouillant n’est qu’un sauveur: «Nous sommes l’espoir de la Guinée, nous allons redresser ce pays, parce que nous sommes jeunes comme le Président», se glorifient ces recrues. Ils dénoncent les cadres (en bois) civils qui, selon eux, ont mis le bled à terre: «Ils ne nous formaient pas, nous cachaient les choses. Des cours comme : le service public ; l’équité, l’égalité et la déontologie étaient cachés dans les tiroirs des ministères», s’insurgent un autre compagnon de voyage. Ces bouffes-la-craie attendent désormais une seule chose: être ventilés pour se «mettre au travail». Leur séjour au Centre d’entrainement aux opérations de maintien de la paix (CEOMP) ou Camp de Samoréyah leur aura appris l’amour de la patrie ? L’avenir le dira.                                                                                                                   Yacine Diallo