Depuis un moment déjà, le Président béninois, Patrice Talon, clame qu’il abandonne le pouvoir au terme de ses deux mandats constitutionnels. Nombre de Béninois et d’observateurs étrangers demeurent dubitatifs. En Afrique, on est plutôt habitué aux tripatouillages des constitutions, pour soi-disant, proroger le mandat du Président en place et lui permettre d’achever son programme de développement. Formule triviale et creuse, sorte d’opium qui fait sourire les initiés, les avertis. Chat échaudé craint l’eau froide. Sans doute. Toutefois, l’insistance de l’homme d’affaire devenu homme politique a peu à peu dissipé doute et suspicion pour convaincre les sceptiques.
Décidément, Patrice Talon prend à rebrousse-poil les républiques bananières. Ces dernières années, on se souvient des tentatives d’Alpha Grimpeur et de Maquis Sall de s’accrocher au pouvoir. Leur déconfiture, malheureusement, n’a pas inspiré l’Y-voit-rien, Alassane Dramane Ouattara qui invoque une santé solide à toute épreuve, son expérience, les menaces sécuritaires, les enjeux économiques et monétaires pour justifier sa candidature à un 4ème mandat. Comme si, sans lui la Côte d’Ivoire disparaîtrait. Ah, quand l’humilité nous fuit ! Patrice Talon, Nelson Mandelaet Mahamadou Issoufou sont les rares iconoclastes qui montrent aux anciens Présidents africains qu’il y a une vie après, autrement digne et honorable, rien de mieux que de s’en aller, la tête haute.
Le Président du Bénin, à l’occasion de la célébration de la fête nationale de son pays le 1er Août, a organisé une causerie au coin du feu avec 200 jeunes béninoises et béninois. Le but visé était, de toute évidence, de sonder la jeunesse, écouter ses aspirations de développement socioéconomique. Il faut noter que Talon a privilégié l’approche pédagogique au discours – monologue solennel à la veille de la journée festive. Rendons-en lui grâce, en acte, le dialogue instruit quand le monologue appauvrit. Lors de la tchatche entre Talon et ses jeunes convives, comme il n’y a pas eu de langue de bois, les échanges ont été ouverts et sincères. Le Président n’a pas esquivé les préoccupations de ses jeunes interlocuteurs.
Par ailleurs, devant ses pairs de la CEDEAO, il avait surpris son monde par la sincérité de ses propos peu amènes sur la gouvernance des États africains. Il a attribué la pauvreté de l’Afrique aux élites politique et technocratique qui ont trahi l’idéal des Africains. On a rarement entendu de pareils discours dans ce genre de cénacle. On a plutôt coutume d’accuser des boucs émissaires de tous les maux qui rongent nos sociétés.
Patrice Talon, certes n’est pas blanc-bleu. Cependant, il se montre sans complaisance avec les mandats à vie. Tirons-lui le chapeau ! Et espérons qu’il ne va pas virer sa cuti. On est en Afrique !
Abraham Kayoko Doré