En Sierra Leone, une semaine après le huitième anniversaire de la coulée de boue meurtrière de Freetown, qui avait fait plus d’un millier de morts, les critiques se multiplient. Survivants et ONG dénoncent l’inaction des autorités : la déforestation continue, les constructions sur les collines sont toujours en place, et les systèmes de drainage restent insuffisants.
Tout a commencé vers 7 heures du matin, ce 14 août 2017. À Freetown, cela faisait déjà six jours que les pluies diluviennes s’abattaient sur la capitale la Sierra Leone. « Toute la nuit, il a plu », raconte Keith Lansana Camara, ancien militaire rescapé, qui travaillait alors comme gardien de sécurité.
Ce matin-là, il était sorti jeter les poubelles – une obligation imposée par la loi. Un geste qui lui a sauvé la vie. Dehors, il a été témoin du drame. « Il y a eu deux bruits. Le premier, j’ai vu le mur s’effondrer. Puis un second, plus fort. Quand je suis sorti, des immeubles de deux, trois, quatre étages s’écroulaient. Et toutes les personnes à l’intérieur : personne n’est sorti. Tout le monde est mort ». Le bilan fait état de plus d’un millier de personnes ont péri.
Une urbanisation hors de contrôle
Huit ans plus tard, les causes n’ont toujours pas été résolues. Pour Solomon Sundu, de l’ONG Be Found, les constructions illégales et l’absence de planification aggravent encore les risques. « À Freetown, les maisons sont chères. Alors chacun veut son terrain, peu importe qu’il soit en montagne ou en zone protégée. Les gens construisent sans penser au danger, et l’État laisse faire. Il faut des lois plus strictes, sinon la tragédie peut se répéter ».
Un « manque de vision » que dénonce la maire de Freetown, partagée par l’urbaniste Joseph McCarthy, du Sierra Leone Urban Research Center. « La ville continue de s’étendre sans véritable concertation, sans protection des espaces qu’il faudrait préserver pour éviter d’aggraver l’érosion », explique-t-il.
La vraie question, c’est : comment faire en sorte que ces enjeux soient compris comme un défi collectif, à affronter de manière globale ? Cette vision d’ensemble manque encore aujourd’hui. Et donc, il ne faut pas s’étonner si les zones nouvellement défrichées sont submergées, ou si de nouvelles coulées de boue viennent frapper la capitale.
De leur côté, les ONG appellent à renforcer les infrastructures de drainage et d’assainissement dans la capitale. Sur le site du glissement, à Sugarloaf, on retrouve encore des ossements lavés par la pluie. Un lieu qui, pour Solomon Sundu, devrait devenir un monument à la mémoire des victimes.
Par RFI