Au lendemain de la publication des résul-tares officiels du référen-Doum, le premier des ministres, Amadeus Oury Bah, a animé une conférence de stress au Palais de la Colombe. Interpellé par un journaleux sur la démission de son goubernement comme l’indique la Constitution adoptée, le PM a répondu qu’il n’en est pas question.
Les résul-tares globaux provisoires du référen-Doum du 21 septembre ont été publiés par le mystère de l’Admiration du trottoir et de la décentralisation, le 23 septembre. Le chef du goubernement a sauté sur l’occasion, pour savourer la victoire du Oui. «Le peuple de Guinée a fait le choix souverain d’adopter une constitution qui, selon les chiffres donnés par le MATD, le Oui l’emporte avec 89,38% des suffrages exprimés avec une participation de l’ordre de 86,42%. C’est une étape importante pour le retour à l’ordre constitutionnel. Mais ce référendum a des significations encore beaucoup plus profondes marquées principalement par un taux de participation significatif qui consacre une réelle légitimité à la Constitution ainsi adoptée par le peuple de Guinée(…) Ce Oui est un mandat de confiance, une exigence de transformation. Il ouvre la voie aux prochaines étapes du processus du retour à l’ordre constitutionnel: la présidentielle, les législatives et les communales, sans oublier les régionales et les sénatoriales.»
Ainsi Amadeus Oury Bah a introduit son laïus, face à la presse, saluant «la mobilisation citoyenne exemplaire» et rendant «hommage à tous les acteurs du processus en Guinée comme à l’étranger.» Dans le calme et la transcarence, s’est-il réjoui.
Pour contenter tout le monde, le PM jure que « le Oui n’est pas la victoire d’un camp contre un autre, mais celle de la Guinée toute entière. » S’adressant aux partisans du « Non », il renchérit : «Nous leur disons que votre voix compte également. Le dialogue et la réconciliation resteront au cœur de l’action du gouvernement.»
La « stabilité » plutôt que la démission
Amadeus Oury Bah annonce les couleurs de la fuite. Pour vanter la performance comique du bled, il assure que le référen-Doum s’est tenu sans qu’on ne tende la sébile à l’étranger. «Cela veut dire quoi ? L’exigence de souveraineté nécessite que nous appliquions une discipline et une capacité fortes de mobiliser de nos ressources intérieures. Nous nous acheminons vers d’autres taux de croissance qui permettront de montrer l’élan de renouveau économique de la République de Guinée.»
Avec cette sortie médiatique, inutile de s’interroger si le PM souhaite rester à la Primature ou pas. Même s’il faut éclairer la lanterne des Guinéens sur l’esprit et la lettre de l’alinéa 6 de l’article 192 de la désormais Constitution new-look. Une disposition relative à la procédure de sa révision. «Au lendemain du référendum, le Gouvernement présente sa démission qui ne peut être refusée par le Président de la République.»
D’où la question du journaleux. Sans zigzags, Amadeus Oury Bah y est allé de son interprétation. Il écarte toute idée de démission, affirmant que «dans aucun article de cette présente constitution, il n’est dit que le gouvernement doit démissionner». A ses yeux, il n’a été poing question de « modification constitutionnelle » cette fois-ci, mais d’un «référendum constitutionnel pour l’adoption d’une nouvelle Constitution pour la République de Guinée.»
Il enchaîne sur la notion de stabilité institutionnelle: «Je crois que certains voudraient qu’il y ait des changements perpétuels. Mais nous recherchons la stabilité, la stabilité, et encore la stabilité. Et cette stabilité doit être adossée par le respect scrupuleux des règles démocratiques, des règles constitutionnelles et dans une vision très ouverte et constructive du présent et du futur. Les questions éternelles de changement de poste, je pense qu’il faut que nous revisitions les paradigmes pour se rendre compte que le principe de la stabilité dans une logique de cohérence absolue est l’axe majeur de l’action publique que nous entendons mener. Je ne dis pas qu’il n’y aura pas à un moment donné des changements, c’est tout à fait nécessaire, mais ce sera lorsque le moment sera là et en fonction du pouvoir discrétionnaire du Président de la République.» Sa stabilité à lui, c’est de rester Premier ministre, tant que le voudra le chef de la junte, le gêné-râle Doum-bouillant.

PM démissionnaires
Pourtant, l’histoire récente de la Guinée n’a pas dérogé à ce que d’aucuns appellent « tradition politique ». Le PM Fof-le-Saïd, sous Alpha Grimpeur, a démissionné deux fois : le 15 janvier 2014, deux jours après l’installation de l’Assemblée nationale issue des législatives du 28 septembre 2023. Puis le 23 décembre 2015, deux jours après la prestation de serment d’Alpha Grimpeur pour un deuxième mandat.
Toujours sous l’ère Grimpeur, Mamady Youla alors PM, a présenté sa démission ainsi que celle de tout son goubernement le 17 mai 2018. Histoire de permettre au Prési de la Roue-publique de tenir sa promesse envers les nounous qui l’avaient hué lors du 8 mars 2018 ; une série de manifs des gens-saignants qui réclamaient une augmentation de salaires et des opposants contestant les résul-tares du scrutin communal et communautaire du 4 février 2018. Le Prési Grimpeur avait promis aux nounous d’écouter «la majorité silencieuse» et de procéder à un «grand remaniement ministériel» afin de «mettre des ministres qui sont à l’écoute de la population et qui s’occupent de leurs programmes».
Et ce n’est pas fini. Nommé le 21 mai 2018, le PM Cas-Sorry Fofana a remis la démission de son goubernement à Alpha Grimpeur le 15 janvier 2021. Le Prési l’avait acceptée, mais «a instruit au Premier ministre et au Gouvernement sortant d’assurer le traitement des affaires courantes jusqu’à la nomination d’une nouvelle équipe gouvernementale.»
La démission du Cas-Sorry était consécutive aux législatives du 22 mars 2020 et de la présidentielle du 18 octobre de la même année. Les deux sélections avaient été organisées dans un climat de vives contestations du pouvoir Grimpeur qui venait de s’offrir un 3ème mandat au forceps.
On le voit, si Amadeus Oury démissionne, ce ne serait pas une première en Guinée. En attendant que les juristes se délient la langue, l’interprétation de l’alinéa 6 de la nouvelle constitution guinée-haine suscite la polémique. D’aucuns entendent par-là que la disposition ne s’applique pas au goubernement actuel. Raisonnant que la loi n’est pas rétroactive, elle ne traite pas du passé mais du futur. Pour d’autres, elle s’applique au boss de la Primature et à son goubernement, comme c’est le cas de ses prédécesseurs au Palais de la Colombe.
L’arrêt de la Basse-Cour suprême confirmant la régularité du scrutin et la victoire du Oui, tel qu’annoncé par le MATD, pourrait-elle faire taire les supputations ? Pour autant, les appels au respect de la nouvelle Constitution se multiplient sur la toile. Le gêné-râle Mamadi Doum-bouillant qui a promulgué la nouvelle Constitution le 26 septembre tranchera-t-il ? On croise les doigts.
Mamadou Siré Diallo