À quelques jours du référendum constitutionnel prévu le 21 septembre, l’Institut Supérieur de l’Information et de la Communication de Kountia (ISIC) a mobilisé étudiants et responsables, le 16 septembre dans la commune urbaine de Sanoyah, pour appeler les citoyens à voter « massivement Oui ». Une initiative qui soulève des questions sur l’impartialité de l’université face aux enjeux politiques.
Les étudiants et responsables de l’ISIC se sont déplacés dans la commune urbaine de Sanoyah pour battre campagne en faveur du « Oui » au projet de nouvelle constitution. L’activité s’est déroulée en présence des autorités communales et a été présentée comme une initiative institutionnelle de l’institut.
Pourtant, l’ISIC n’est pas une simple école : c’est un institut qui forme des journalistes. L’esprit critique, la rigueur et surtout la neutralité sont au cœur de l’apprentissage. Former des professionnels capables d’informer objectivement et de questionner les faits devrait primer sur toute implication partisane.
Cette prise de position publique soulève des questions: quelle liberté pour les étudiants qui ne partagent pas cette orientation ? Une institution d’enseignement supérieur peut-elle prendre position dans une campagne référendaire sans compromettre sa mission fondamentale ? Dans un contexte où la politique guinéenne s’invite partout, voir une institution d’enseignement supérieur devenir un relais de propagande inquiète.

« Les universités devraient former des citoyens capables de penser librement, pas les conditionner à un vote », réagit un étudiant sous couvert de l’anonymat.
Un autre, également anonyme, nuance la critique. Pour lui, l’ISIC n’est pas une structure privée, mais une administration publique. « Dans une école publique, quand l’État donne des instructions officielles, l’institution s’exécute. Ce n’est pas une question de choix ou d’opinion, mais de mission institutionnelle », estime-t-il.
Selon ce dernier interlocuteur, critiquer l’université pour cette action reviendrait à ne pas comprendre le fonctionnement des institutions publiques. L’ISIC, en appliquant les directives officielles, ne ferait pas de politique par elle-même, mais accomplirait sa mission en lien avec l’État.
En Guinée, la politisation de l’espace public n’est pas nouvelle. Mais l’entrée des institutions universitaires dans ce jeu électoral franchit un cap.

Mélanger l’enseignement et la propagande politique peut faire perdre à l’université son vrai rôle : instruire, former et aider les étudiants à développer leur esprit critique. Une école de journalisme devrait apprendre à analyser et à rester neutre. Mais si elle diffuse directement des messages politiques, elle risque de contredire ce qu’elle enseigne elle-même et de limiter la liberté de réflexion des étudiants.
Former au journalisme implique d’apprendre à questionner, à analyser, à rester impartial. Quand une école de journalisme se retrouve à relayer des consignes de vote, elle s’alliène une partie de son corps professoral ou de ses étudiants.
À force de mêler savoir et propagande, l’université risque de perdre son rôle de sanctuaire du débat indépendant. L’ISIC, qui devrait être un lieu de liberté intellectuelle et de journalisme critique, se retrouve au cœur d’une réalité troublante. Force est de constater qu’en Guinée, même les temples du savoir sont politiisés.
A. Doumbouya