A Télimélé, la tension monte entre employés et la direction de la société minière Ashapura qui exploite de la bauxite dans le coin. Plusieurs employés d’Ashapura s’indigent du traitement qui leur est réservé par la direction de la société minière indienne, indexée pour, entre autres, discrimination, manque d’estime, non application de la Convention collective des mines, carrières et industries.
Ashapura Guinée est la filiale de la société indienne Ashapura Group Industries évoluant dans les mines et les logistiques à travers le monde. Après avoir repris la mine de fer de Yomboyéli à Forécariah en 2019, la filiale guinée-haine s’est offert une concession minière à Daramagnaki, dans le buisson de Télimélé. Mais, la société ayant jeté son dévolu sur la sous-traitance ne cesse de cumuler de faux pas qui génèrent des frustrations chez les employés.
Signée en février dernier, la Convention collective des mines, carrières, industries minières et assimilés est entrée en vigueur en août dernier. Elle instaure une grille salariale, encadre la sous-traitance, revalorise les primes de retraite. Excusez du peu ! Mais son application fait grincer des dents au sein de maintes compagnies minières dont Ashapura. La convention implique une augmentation salariale pour des employés : un ouvrier non qualifié devrait toucher la misère de 2 600 000 francs glissants, un agent de maîtrise pas moins de 8 500 000 francs glissants.
Le 11 septembre, un employé de la société Ashapura interrogé au téléphone, se confie non sans avoir requis l’anonymat : «Elle est entrée en vigueur depuis août, mais aucun employé de la société n’a bénéficié d’une augmentation salariale. La direction n’en veut pas. Elle continue à payer les mêmes salaires aux employés. La catégorisation des travailleurs relevant du service Ressources humaines (RH) est en train d’être réalisée par la direction, ne voulant pas appliquer la Convention. Il y a un manque de volonté notoire».
Le même jour, une réunion entre les employés et la direction a tourné court. En colère, des travailleurs ont bloqué l’accès de la mine, pour exiger l’application intégrale de la Convention des mines, carrières, industries minières et assimilés. Joint par Le Lynx le 12 septembre, le dirlo général adjoint d’Ashapura, Floribert Haba, parle d’un malentendu entre employés et la société. Toutefois, il avoue que la mise en œuvre de la Convention a retardé, mais « ce n’est pas un refus. L’inspecteur préfectoral du travail vient sous peu pour la catégorisation des travailleurs. Il n’y a aucun mouvement de protestation ici, mais nous avons arrêté le travail pour résoudre le problème », a-t-il déclaré.
Discriminations
Il se dit que la société ne dispose ni de superviseur ni d’intendant encore moins d’un syndicat pour défendre les intérêts des employés. «Hormis pour les Indiens, il n’y a pas de catégorisation chez les travailleurs nationaux ni une grille salariale. Sur plus de 400 employés, seul cinq personnes sont directement liées à la direction d’Ashapura. Tout le reste traite avec sous-traitance (6 sociétés au total). Avec elles, nul n’a le droit à un contrat de plus de six mois», explique un employé, sous l’anonymat. Selon lui, quand un employé passe six mois dans une société sous-traitante, on le transfère dans une autre «avec le même salaire», pour éviter qu’il ne revendique une ancienneté. Notre interlocuteur dénonce une « discrimination » que subissent des employés nationaux de la part des expatriés. «Seuls les Indiens ont accès à la cantine. Nous parcourons un kilomètre et demi, pour se trouver à manger», rapporte-t-il. Ajoutant que tous les employés nationaux, «quel que soit leur niveau d’études, d’expérience, de compétences ou d’ancienneté sont considérés ouvriers non qualifiés», regrette-il. Pourtant, à compétence égale, nul ne devrait être mieux traité que l’autre.
Yaya Doumbouya