L’élection présidentielle du 25 octobre en Côte d’Ivoire s’est déroulée dans une atmosphère globalement qualifiée de calme, apaisée. Durant les 15 dernières années, aucune élection présidentielle n’a connu autant de quiétude. Seules quelques échauffourées l’ont ponctué par moments et endroits.
Au regard des résultats globaux provisoires proclamés par la CEI, le Président sortant Alassane Ouattara l’emporte largement sur ses challengers par le score de 89,77%. Son poursuivant immédiat, l’ancien ministre du PDCI Jean-Louis Billon n’a obtenu que 3,09%. Ce score ne surprend guère, en l’absence des poids lourds de l’opposition que sont l’ancien Président Laurent Gbagbo (PPACI) et l’ex-ministre Tidjane Thiam du PDCI.
Décidément, Simone Ehivet du Mouvement des générations capables (2,42%), Jean-Louis Billon du Congrès démocratique (3,09%), l’indépendant Ahoua Don Mello (1,97%) et Henriette Lagou du Groupement des partis politiques pour la paix (1,15%), n’ont pas fait le poids. Alassane Ouattara et les siens ont fait feu de tout bois pour en arriver là. Ils ont usé de maints artifices politiques et arguties juridiques pour écarter les candidats en capacité de battre leur champion, le président sortant et candidat du RHDP.
Le subterfuge pour éliminer les candidats gênants
On se souvient que Laurent Gbagbo acquitté par la CPI a été néanmoins jugé et condamné par la justice ivoirienne pour fait de braquage de la BCEAO nationale. Ce jugement lui a fait perdre ces droits civiques dont son éligibilité. Mais Gbagbo a-t-il été vraiment un braqueur de banque ? De quoi s’agit-il ? Lors de la crise postélectorale de 2010-2011, la CEDEAO qui ne reconnaissait plus en Laurent Gbagbo la qualité de président de la Côte d’Ivoire, avait demandé à la BCEAO de lui retirer le droit de signature aux niveaux de sa succursale de Côte d’ Ivoire. Or, c’est dans cette banque qu’étaient domiciliés les salaires des fonctionnaires Ivoiriens. Le Président de la république de Côte d’Ivoire, en l’occurrence Laurent Gbagbo, pouvait-il se permettre de ne pas acquitter la solde des fonctionnaires en fin de mois ? Le risque était immense et imprévisible.
S’agissant de Tidjane Thiam, la justice ivoirienne lui reproche de s’être prévalu, à un moment donné, d’une autre nationalité et de n’avoir pas recouvré sa nationalité ivoirienne au moment où il a candidaté. Elle l’a donc éliminé du fichier électoral et rendu inéligible. Aussi le troisième larron, Pascal Affi N’Guessan, président du FPI, a été éliminé pour insuffisance de parrainages.
Dès lors, les dés sont pipés, sans Laurent Gbagbo ni Tidjane Thiam ni Pascal Affi N’Guessan dans la course, l’élection devient un simple jeu de dupes.
Refus de s’inspirer
L’écart abyssal entre le vainqueur et le second en est une brillante illustration. C’est même ubuesque. Quoi qu’éliminés, les leaders du PPACI et du PDCI ont fait comme l’autruche et obstinément refusé de s’inspirer de l’expérience de la dernière élection présidentielle au Sénégal. Ils ont préféré faire naufrage avec leurs formations politiques, au lieu de faire investir courageusement un autre cadre de la mission de conduire le parti à l’élection présidentielle. Ousmane Sonko a fait élire Bassirou Diomaye Faye et permis au PASTEF d’exercer aujourd’hui le pouvoir au Sénégal. Où est donc passé le génie politique légendaire de Laurent Gbagbo ? Une vraie élection en trompe-l’œil !
Abraham Kayoko Doré


