Le signal de 7TV et de TFM, deux chaînes privées de télévision, a disparu du bouquet de la télévision nationale terrestre (TNT) sénégalaise pendant huit jours, sans justification officielle et dans l’opacité la plus totale. Reporters sans frontières (RSF) dénonce cette coupure arbitraire et demande aux autorités sénégalaises d’assumer leurs responsabilités et d’identifier les responsables.
C’est dans les vieux pots qu’on fait la meilleure confiture. L’adage semble séduire les autorités sénégalaises depuis fin octobre : en coupant le signal de deux chaînes privées, 7TV et TFM, sur la TNT, dont l’exploitation est gérée par la société publique Télédiffusion du Sénégal (TDS), le gouvernement imite tristement son prédécesseur, qui avait coupé de façon unilatérale du signal de la chaîne privée Walf TV à deux reprises, en juin et en février 2024.
Les coupures dont ont été victimes les deux médias entre le 28 octobre et ce 6 novembre ont été décidées dans l’opacité la plus totale. Le signal de 7TV a été interrompu dans la soirée du 28 octobre, lorsque des gendarmes ont fait irruption dans les locaux de la chaîne pour interpeller sa directrice générale Maïmouna Ndour Faye, finalement libérée deux jours plus tard. Le même jour, la chaîne TFM a elle aussi été coupée, quelques minutes après la diffusion de l’interview du patron de presse, sous mandat d’arrêt international, Madiambal Diagne, réalisée par Babacar Fall, directeur de la rédaction de Radio Futurs Médias (RFM), appartenant au même groupe de presse dans la matinée du 29 octobre.
Dans un communiqué publié le 5 novembre, le Conseil national de régulation de l’audiovisuel (CNRA) renvoie la balle vers le ministère, en rejetant toute responsabilité dans ces coupures et en ordonnant même à la TDS de “reprendre instamment” la diffusion des signaux des deux chaînes privées – effectivement rétablis ce 6 novembre.
Reste une question : qui a donné l’ordre initial à la TDS de couper le signal des deux chaînes ? La décision n’ayant pas été notifiée aux responsables des médias, les autorités ne s’étant toujours pas exprimées sur ce point et la directrice de la TDS, Aminata Sarr, et le ministère de la Communication, n’ayant pas souhaité répondre aux questions de RSF, le flou reste entier.
« À présent que les signaux de 7TV et TFM sont rétablis sur la TNT, il est impératif d’établir les responsabilités et d’identifier les auteurs de cette décision arbitraire, prise en dehors des procédures réglementaires, et marquée par un silence inacceptable. Elle a non seulement privé la population de son droit à l’information pendant une semaine, mais a également fait renaître le triste souvenir d’un passé récent, avec des pratiques utilisées par l’ancien régime. RSF appelle les autorités à identifier le responsable de cette atteinte à la liberté de la presse », Sadibou Marong, Directeur du bureau Afrique subsaharienne.
Les coupures des signaux de TFM et 7TV ont eu lieu dans la foulée des interpellations de Babacar Fall et Maïmouna Ndour Faye, survenues les 28 et 29 octobre. Au même moment, le ministère de la Communication clôturait le Salon international des médias d’Afrique (SIMA), prenant des engagements pour le droit à l’information et la protection du journalisme, sans mentionner la situation.
Madiambal Diagne, actuellement en France, fait l’objet d’un mandat d’arrêt international émis par le Sénégal. Peu avant son départ du Sénégal, malgré une interdiction de sortie du territoire, il avait été convoqué par la Division des investigations criminelles (DIC) dans le cadre d’une enquête portant sur de présumées transactions financières suspectes. La justice française doit se prononcer sur l’extradition de l’homme d’affaires le 25 novembre.
Le Sénégal occupe la 74e place du Classement mondial de la liberté de la presse de RSF.
Reporters Sans Frontières


