Human Rights Watch a publié un article ce jeudi 19 novembre pour dénoncer la violente répression en Guinée, à la suite du scrutin présidentiel du 18 octobre 2020. L’ONG accuse les forces de sécurité d’avoir recouru à la force excessive pour disperser les manifestations ayant entraîné la mort à au moins 12 morts.
Ilaria Allegrozzi, chercheuse senior sur l’Afrique centrale à Human Rights Watch n’a pas manquer de fulminer : « Les actions brutales menées contre des manifestants et d’autres personnes à Conakry se sont inscrites dans un contexte de répression généralisée qui a fragilisé la crédibilité des élections. Les autorités devraient maîtriser les forces de sécurité, enquêter sur les individus impliqués dans des exactions et les sanctionner, et tous les dirigeants politiques devraient demander d’urgence à leurs partisans de s’abstenir de toute violence ».
Le 27 octobre, Human Rights Watch a transmis ses conclusions à Albert Damatang Camara, le ministre de la Sécurité et de la Protection civile qui a rejeté l’allégation selon laquelle les forces de sécurité auraient tué des personnes. Pour le ministre, beaucoup de personnes ont été tuées par des balles tirées par des fusils de calibre 12, des fusils de chasse, qui ne sont pas utilisés par les forces de sécurité. Human Rights Watch dit n’avoir trouvé aucune preuve que des armes ont été utilisées par des civils pendant les violences. Les déclarations du ministre divergent de nombreux témoignages : « Nous exprimions notre joie devant la victoire de Diallo lorsqu’un véhicule de police est arrivé à toute vitesse et a lancé des grenades lacrymogènes pour nous disperser. Les gens ont fui et la police nous a tiré dessus », a expliqué cet homme à Human Rights Watch. Il a précisé que Thierno Nassirou Sylla, âgé de 13 ans, avait reçu une balle au visage et « était mort sur le coup ». Human Rights Watch dit avoir plutôt constaté que les forces de sécurité, dont les policiers et les gendarmes, ont fait un usage excessif de la force pour disperser des manifestations à Bambeto, Baïlobaya, Bantounka, Cobayah, Hamdallaye, Sonfoniyah et Wanindara, tirant des grenades lacrymogènes et dans certains cas, des munitions réelles. « Au moins 12 personnes ont été abattues par les forces de sécurité, dont trois le 19 octobre, cinq le 21, deux le 22 et deux, le 23. Une femme âgée de 20 ans est également décédée le 23. Human Rights Watch n’a pas été en mesure de s’entretenir avec les témoins de l’incident impliquant cette dernière victime, mais deux membres de sa famille ont déclaré qu’elle avait été touchée par une grenade lacrymogène tirée par les forces de sécurité ».
Même que le lendemain du scrutin, les forces de sécurité ont abattu d’une balle dans le dos Mamadou Saidou Diallo, âgé de 14 ans, alors qu’il fuyait des policiers et des gendarmes qui tiraient à balles réelles dans le quartier de Bantounka 1.
Violences intercommunautaires
Des violences intercommunautaires ont éclaté à Conakry le 23 octobre lorsque des centaines d’hommes armés de diverses ethnies, dont des Malinké et des Konianké, considérés comme des sympathisants du parti au pouvoir, ont attaqué des membres de l’ethnie peule, perçue comme partisane de l’opposition, dans le quartier d’Enta Marché, dénonce HRW. Pendant les affrontements, affirme l’ONG, Yacouba Diallo, un mécanicien âgé de 67 ans, a été battu à mort, puis brûlé à son domicile. Au moins une autre maison a également été incendiée et 10 magasins pillés : « Ils ont saccagé ma boulangerie ; ont volé 10 sacs de farine et toute la levure », témoigne un boulanger. Human Rights Watch a examiné neuf photographies et neuf vidéos montrant la destruction de biens à la suite des violences.
Tély Diallo