Le 3 mai, l’humanité célèbre la journée internationale de la Liberté de la presse. En Afrique, la liberté de la presse est plus ou moins respectée. Assane Diagne, directeur du bureau Afrique de l’Ouest de Reporters sans frontières, RSF, invité dans l’émission Œil de Lynx de ce 3 mai, s’est dit préoccupé par cette situation. Selon lui, la région Afrique de l’Ouest présente un visage très contrasté en matière de liberté de la presse. «Il y a des bons élèves comme j’ai l’habitude de les appeler, c’est le même trio depuis quelques années : le Cap-Vert, le Ghana et le Burkina Faso qui figurent toujours en tête de liste des pays de l’Afrique de l’Ouest. Ce sont les seuls d’ailleurs dans la zone jaune du classement, c’est-à-dire les pays où la situation est jugée plutôt bonne. Puis, il y a quelques pays qui essayent de s’approcher de ce groupe, c’est le Sénégal, le Niger et la Côte d’Ivoire dans un moindre degré. Il y a un troisième groupe de pays qui font des efforts depuis quelques années pour s’approcher de la zone jaune. Parmi ces pays, il y a le Togo, la Sierra Léone, la Gambie. Il y a un dernier groupe constitué des pays qui sont dans la zone rouge, c’est-à-dire là où la situation est vraiment dangereuse pour la Liberté de la presse. Ce sont le Bénin qui chute depuis le changement de régime, la Guinée (109è/180 en 2021) qui est aussi toujours dans la zone rouge, et le Nigeria, qui d’ailleurs est le seul pays de la région où un journaliste a été tué en  2020. L’Afrique de l’Ouest présente un visage hétéroclite en termes de Liberté de la presse», explique Assane Diagne, au bout du fil.

Malgré ces cas préoccupants, du point de vue classement régional, selon M. Diagne, l’Afrique de l’Ouest se comporte très bien. «C’est la région la mieux placée devant la région australe. Donc, l’Afrique de l’Ouest arrive en première position, suivie par l’Afrique australe. L’Afrique de l’Est vient en troisième position, l’Afrique du nord en quatrième et l’Afrique Centrale ferme la manche. Ce qui fait que l’Afrique centrale est considérée comme le foyer des prédateurs de la Liberté de la presse en Afrique. Elle est en dernière position à cause d’un important indicateur dans le classement de reporters sans frontières : il s’agit justement de l’indicateur « Exaction » qui permet de mesurer le nombre d’exactions dans une zone donnée. Et c’est malheureusement en Afrique centrale qu’on enregistre le plus d’exactions, avec plus de violations de la Liberté de la presse en Afrique».

Pour une meilleure protection des journalistes dans le monde et plus particulièrement en Afrique, M Diagne préconise, dans un premier temps, la «disposition d’un cadre juridique protecteur pour la Liberté de la presse tout en adoptant des lois qui facilitent l’accès à l’information et en dépénalisant les délits de presse. Et faire en sorte que, pendant les périodes de crises, les Etats prennent des mesures de protection des journalistes et leurs outils de travail. »

S’agissant de la dépénalisation des délits de presse, la Guinée fait partie des pays de la sous-région qui l’ont réalisée, mais la loi n’est pas respectée. Pour preuve, deux journalistes sont en prison : Amadou Diouldé Diallo et Ibrahima Sadio Bah. Pour le cas d’Amadou Diouldé Diallo, M. Diagne est venu d’ailleurs en Guinée. Avoir un bon cadre juridique (c’est le cas de la Guinée), c’est une chose, c’est le cas de la Guinée, mais se conformer aux dispositions de ce cadre juridique en est une autre. «C’est malheureusement ce qu’on a noté en Guinée. Le cadre juridique est très protecteur pour les journalistes, mais les actes que posent les autorités sont en violation flagrante de toutes les dispositions-là. Donc ce qu’il faut, c’est pousser les autorités, se mobiliser, pour faire en sorte que la loi soit respectée. Si cela est fait, je pense que cela pourrait protéger davantage les journalistes en Guinée. Ce qu’on a noté comme tendance, c’est  que la HAC devient de plus en plus une instance de censure de la presse privée, cela aussi fait partie des anomalies à rectifier, pour améliorer la situation en Guinée», a conclu Assane Diagne, directeur Afrique de l’Ouest de Reporters Sans Frontières.

Kadiatou Diallo