La semaine dernière, encore une fois, les gens en bas d’en bas et ceux d’en haut, quelque part en Afrique, se sont livrés à leur jeu favori que le méchant colon, parti il y a bien des lunes et des lunes, leur a filé en même temps que l’indépendance, la liberté et la dignité. Ce jeu est, vous l’avez deviné, la sélection, que suis-je, l’élection dont les africains raffolent aux quatre points cardinaux du continent d’ébène.

Mais les observateurs avisés sont unanimes à reconnaître que loin d’être une sélection comme c’est généralement le cas sous les tropiques, le scrutin en Zambie a été plutôt proche du standard qui sert de modèle. L’un des candidats était celui-là même qui était scotché dans le kibanyi depuis quelque lustre et qui détenait donc toutes les cartes tout en tirant les ficelles permettant de vaincre sans périls et triompher sans gloire.

Qu’importe ! Gagner, c’est gagner non ! Battu à plate couture avec près d’un million d’électeurs de moins que son challenger Hakainde Hichilema, chef de file historique de l’opposition, Edgar Lungu n’a point fait de résistance. Tout comme, il n’a pas tenté de multiplier les embûches sur le chemin de son adversaire qui qui l’affrontait pour la deuxième fois. La démocratie et l’Etat de droit ont marqué là un point Edgar Lungu donné une magistrale leçon de bonne pratique électorale à ses pairs et futurs pairs africains. On admet qu’il n’est pas parti tôt, à temps. Il aurait eu encore plus de mérite, plus d’aura et on aurait pu le considérer comme l’émule d’un Nelson Mandela. Il n’est certainement pas parti de gaité de cœur. Il est évident que nul ne part du pouvoir de gaieté de cœur. On s’y résout à temps ou on est chassé un jour. S’en aller opportunément participe du respect de la constitution et des lois du pays d’une part, et de l’éthique morale, de l’honnêteté intellectuelle d’autre part.

Force est d’admettre qu’il y a une variable aléatoire qu’il faut prendre en compte pour parfaire l’analyse en l’occurrence la qualité de la gouvernance. Si elle a été caractérisée par la prédation des maigres deniers publics, l’affairisme, le népotisme, le clientélisme, il y a des raisons subjectives de plus de s’incruster dans les interstices du pouvoir et d’oser tous les risques et travers pour s’opposer vaille que vaille à l’émergence d’une nouvelle classe dirigeante. Ce qui est advenu en Zambie n’est pas le fruit du hasard. Il est lié à la qualité du processus électoral, à la fiabilité des institutions et des instruments mis en œuvre. L’organe chargé d’organiser le scrutin, le fichier électoral, notamment n’ont pas été, de l’avis général, défaillants comme c’est partout en Afrique. Les velléités de s’arroger un nième mandat, n’ont pas résisté à l’efficacité du processus électoral.

L’exemple de la Zambie conforte l’idée que les Etats anglophones subsahariens sont des terres plus prospères et plus propices au développement de la démocratie, de l’Etat de droit et de la bonne gouvernance que les Etats francophones qui sont plutôt les terreaux du 3è mandat. Issoufou, le Nigérien fait toutefois exception ! Malheureusement une hirondelle ne fait pas le printemps quand on sait que les intellos Alpha Grimpeur et Alhassane Ouattara, ses deux voisins, ont obtenu au forceps leur 3è mandat et que le Sall du Macky sénégalais y pense aussi, dit-on.

Le cas zambien est porteur d’espoir et d’encouragement et montre que la démocratie est en marche. Elle avance à petits pas, mais elle avance. On ne doit pas non plus croire qu’il s’agit d’une course de fond que ne peuvent remporter que ceux qui ont le cœur et les poumons bien en place. De la prise de la bastille en 1789 à 1871, la France a traversé bien des républiques démocratiques et de monarchies. Elle est aujourd’hui une démocratie forte.

Abraham Kayoko Doré