L’Afrique présente la plus forte prévalence de médicaments de mauvaise qualité au monde. Seulement 3% de la population africaine consomme des médicaments produits en Afrique qui représente 17% de la population mondiale, un quart de la morbidité mondiale, 60% des personnes vivant avec le VIH/Sida, plus de 90% des cas annuels de paludisme. Mais seulement 6% des dépenses de santé et moins de 1% du marché pharmaceutique mondial.

Michel Sidibé, Envoyé spécial de l’Union africaine, appelle à créer l’Agence Africaine du Médicament. Les chaînes d’approvisionnement pharmaceutique comptent de multiples intermédiaires, contribuant à ce que les médicaments vendus en Afrique subsaharienne soient souvent les plus chers du monde, regrette-t-il. Même que l’Afrique présente la plus forte prévalence de médicaments de mauvaise qualité (20%), non conformes aux normes et falsifiés, dont sont victimes les patients, d’autant qu’ils se tournent souvent vers le marché parallèle, indique M Sidibé.

Cela est dû à la faiblesse ou à l’absence de systèmes de réglementation des médicaments qui comprennent des politiques peu claires et des cadres juridiques et réglementaires incomplets ou incohérents. «Il est donc essentiel d’agir à ce niveau. Il l’est tout autant de stimuler la production locale de produits pharmaceutiques sur le continent. Le secteur pharmaceutique devrait passer de 19 milliards de dollars en 2012 à 66 milliards d’ici 2022, l’Afrique devant être le marché à la croissance la plus rapide au niveau mondial. On estime également que le secteur de la santé et du bien-être en Afrique représentera environ 259 milliards de dollars en 2030, avec la possibilité de créer plus de 16 millions d’emplois».

Si selon lui, le coût de la plupart des médicaments produits en Éthiopie et au Nigeria est généralement inférieur de 5 à 15% au prix des produits importés, cela pourrait être un pilier important pour la zone de libre-échange économique continentale africaine (Zlecaf). Ce qui favorisera la création d’un véritable marché africain du médicament et permettre de réaliser des économies d’échelle pour une production continentale répondant aux besoins de l’Afrique.

Covid-19, l’opportunité ?

La pandémie de Covid-19 a considérablement amplifié le besoin urgent pour l’Union africaine et ses Etats membres d’investir dans une réglementation « efficace et efficiente des médicaments, des produits médicaux et des technologies», souligne l’Envoyé spécial. La Covid-19, selon lui, a mis en exergue la nécessité de renforcer la diplomatie en matière de santé, le leadership et la coordination au sein de l’UA, d’accroître la résilience des systèmes de santé et de mieux se préparer aux crises futures.

En tirant les leçons de la crise actuelle, la ratification, la mise en place et l’opérationnalisation rapide de l’Agence africaine du médicament renforceront la préparation et la capacité de réponse aux crises sanitaires actuelles et futures. L’Agence pourrait, à son avis, faciliter une réaction coordonnée ; surveiller et atténuer le risque de pénurie de médicaments et de dispositifs médicaux critiques; proposer des conseils scientifiques sur les médicaments, diagnostiquer ou traiter les maladies à l’origine de ces crises. Elle faciliterait également la coordination des essais cliniques, vaccins compris.

Avec la Zone de libre-échange économique continentale africaine, l’Agence africaine du médicament pourra renforcer les capacités de l’Afrique en matière de recherche et développement, harmoniser la règlementation dans l’enregistrement des médicaments, aider les pays à se conformer aux meilleures pratiques et aux normes internationales, renforcer la lutte contre les médicaments et produits médicaux de mauvaise qualité et les contrefaçons, favoriser la création d’un environnement favorable à la production de médicaments et de vaccins, fait remarquer Michel Sidibé.

L’Agence africaine du médicament est encore en panne pour manque de membres. Pour que le traité soit ratifié et entre en vigueur, il faut un minimum de 15 sur 55 Etats membres de l’UA. Ce n’est pas encore le cas. Voilà le hic !

Oumar Tély Diallo