Dans un communiqué du 23 février sur la situation politique en Afrique de l’Ouest, la Fondation Open Society Initiative for West Africa, OSIWA, s’est prononcée sur la situation politique de la sous-région. Après avoir exprimé sa préoccupation face à la multiplication de coups d’éclat alors que se dégrade de jour en jour la situation sécuritaire dans le Sahel, OSIWA note que la non réalisation « des aspirations des citoyens » en serait la principale cause. Si l’ONG a flétrit la remise en cause des institutions démocratiques, elle a appelé les organisations régionales et internationales « à œuvrer pour une transition courte, inclusive et efficace au Burkina Faso, en Guinée et au Mali. Nous les encourageons également à privilégier le dialogue constructif et l’implication des acteurs de la société civile dans l’intérêt supérieur de nos populations et de nos Etats. » Lisez plutôt !

La Fondation Open Society Initiative for West Africa (OSIWA) suit avec préoccupation la résurgence des tentatives de remise en cause de l’ordre constitutionnel, à travers une série de coups d’Etats en Afrique de l’Ouest, pendant que la situation sécuritaire dans le Sahel se dégrade de jour en jour. Même si les conditions de vie et la situation économique sont toujours largement insatisfaisantes pour une partie importante des citoyens Ouest Africains, les crises politiques remettent en question et fragilisent des acquis démocratiques chèrement obtenus durant des décennies de luttes, de résistances et de sacrifices par nos populations et nos États. Toutefois, il est important de noter que les aspirations non réalisées des citoyens en sont le fondement principal.

Au cours des 20 dernières années, la Fondation OSIWA a travaillé sans relâche à travers des campagnes et des initiatives de plaidoyer pour amener les dirigeants ouest-africains à rendre des comptes et à mettre en œuvre des politiques efficaces basées sur la justice, l’équité et le respect des droits de l’Homme. Nous avons dénoncé les abus de pouvoir sous toutes leurs formes. C’est devant l’incapacité de certains gouvernants à garantir la sécurité, à réaliser un progrès social, économique et environnemental significatif et équitable, et à assurer la bonne gestion des affaires publiques, qu’une nouvelle classe composée d’officiers d’élite semble vouloir s’arroger le droit de confisquer le pouvoir politique au nom d’une prétendue légitimité populaire. Ainsi, de nouvelles transitions politiques sont en train de prendre forme sans que l’on sache quelles en seront les issues. Ceci, constitue pour nous un autre cas d’abus et de prise illégale du pouvoir. Il est donc important que ceux qui sont préoccupés par le progrès de notre région se lèvent et appliquent les mêmes niveaux de contrôle et de redevabilité aux auteurs des coups d’État.

Tout en réaffirmant notre engagement à œuvrer pour le respect de démocraties vibrantes et redevables, la probité dans l’exercice du pouvoir, la bonne gouvernance et le respect des droits fondamentaux, nous condamnons toutes les formes de manipulation constitutionnelle et de coups d’Etats que nous avons connus dans la région. Les coups d’Etats, nonobstant la sincérité de leur motivation, marquent des ruptures inacceptables dans la vie démocratique avec d’énormes risques de déstabilisations et d’installation de crises cycliques, minant la sécurité et les perspectives des populations.

Nous constatons, comme toutes les parties prenantes au processus démocratique dans notre région, que de profondes mutations sont en cours dans les sociétés ouest africaines, avec, en toile de fond, une aspiration des citoyens pour plus de démocratie, de liberté et d’opportunités pour améliorer leurs conditions de vie. Nous espérons que les réformes initiées par la CEDEAO pour mieux réguler la vie démocratique et constitutionnelle dans la région, contribueront au respect des normes et principes démocratiques, à une protection effective des populations contre le terrorisme et le banditisme, à des choix de gouvernance gages d’un progrès économique et social et, à l’inclusion des minorités et groupes vulnérables à la vie politique.

Nous réfutons toute tentative visant à faire de notre région le champ de confrontation entre forces étrangères. Notre souhait est de voir la solidarité africaine être plus effective envers notre région qui est confrontée depuis près d’une décennie à une crise humanitaire.

Nous appelons la communauté internationale, l’Union Africaine, la CEDEAO et les chefs des Etats et gouvernements des pays membres, les autorités des transitions, les partis politiques et les organisations de la société civile, chacun en ce qui le concerne, à œuvrer pour une transition courte, inclusive et efficace au Burkina Faso, en Guinée et au Mali. Nous les encourageons également à privilégier le dialogue constructif et l’implication des acteurs de la société civile dans l’intérêt supérieur de nos populations et de nos Etats. Nous reconnaissons les difficultés qui peuvent exister. Cependant, la rupture de l’ordre constitutionnel et l’isolement de ces pays ne sauraient être aucunement des solutions.

Sur la situation en Guinée Bissau, nous invitons l’ensemble des acteurs institutionnels, la société civile, la population et les amis de la Guinée Bissau à œuvrer au renforcement et à la préservation de l’ordre constitutionnel dans le pays.

Aux partenaires internationaux

Nous exhortons les partenaires internationaux à rester vigilants et à se montrer fermes en cas de tentatives de prolongation sine die des transitions, d’intimidations et de violences contre la société civile et les partis politiques et, de non-respect de la limitation des mandats. En outre, les solutions de sortie de crise doivent être basées sur des initiatives locales qui seraient plus efficaces et plus adaptées.

A la CEDEAO

Nous encourageons la CEDEAO à privilégier le dialogue dans la résolution des crises en cours, à apporter une assistance technique aux transitions et, à accélérer la réforme de l’institution et de son protocole additionnel sur la démocratie et la gouvernance.

Aux autorités de transition

Nous invitons les autorités des transitions à créer les conditions pour une réforme profonde des constitutions, des lois et des institutions en vue de l’organisation rapide des élections de fin de transition. Elles doivent en outre garantir la participation libre et effective de la société civile et des partis politique à la vie démocratique.

Aux organisations de la société civile

Nous prions les organisations de la société civile de continuer à jouer pleinement leur rôle de veille, d’alerte, d’information et de mobilisation afin d’éviter d’autres abus et des tendances autoritaires pendant cette période de transition. Elles doivent aussi rester vigilantes afin que celle-ci ne soit pas une opportunité de redistribution des cartes entre des superpuissances.

Dakar, le 23 Février 2022