Ce vendredi 1er juillet à la Maison de la presse à Kipé, les ministres de l’Enseignement technique et de la formation professionnelle, Alpha Bacar Barry, Diaka Sidibé, de l’Enseignement supérieur, de la recherche scientifique et de l’innovation et Julien Yombounou, du Travail et de la fonction publique, ont à leur tour fait leur compte-rendu de l’immersion gouvernementale du 17 mai au 17 juin à l’intérieur du pays. Ils ont dévoilé leurs constats, retracé les activités menées pendant cette période d’un mois, avant de présenter aux médias les perspectives de solution aux problèmes administratifs.
Le ministre Alpha Bacar Barry a découvert « une Guinée merveilleuse », qu’il « ne connaissait pas assez ». Une découverte « inédite », l’occasion pour lui de rectifier certaines erreurs d’appréciation. Abondant dans le même sens que le Premier ministre, Alpha Bacar Barry constate que « l’administration guinéenne s’arrête au KM36. Les démembrements à l’intérieur du pays ne sont presque pas du tout opérationnels. Il y a un sérieux problème d’infrastructures. De Conakry à Nzérékoré, les centres de formation professionnelle de proximité n’ont jamais été rénovés depuis une décennie ».
Dans les conditions normales, « l’enseignement technique, c’est 30% de théorie et 70% de pratique », rappelle-t-il. Toutefois, renchérit-il, « le constat est alarmant un peu partout. Les gens manquent de tout et les équipements disponibles sont soit en panne, soit ne fonctionnent pas faute d’énergie. Vous avez des écoles encore plus proches pour les gens en situation d’abandon scolaire qui veulent apprendre un métier et s’intégrer dans la société, mais vous ne trouverez pas une seule machine de menuiserie fonctionnelle, un seul équipement d’électricité… Pas de formateurs, pas de chef d’atelier, encore moins de chef de travail. Il faut donc les reconstituer et les approvisionner. Mais c’est un investissement récurrent non introduit dans le budget du ministère. »
En dépit de ces tares, le ministre rapporte que « l’engouement est de taille, les gens ont envie d’apprendre ». Il regrette, cependant, d’avoir hérité d’un ministère sans manuel de procédure. Les structures ne sont ni revues, ni adaptées, la majeure partie des cadres sont envoyés à la retraite. Pour plus de 1000 travailleurs, il n’y avait pas plus de trois ordinateurs et quatre véhicules en état de marche. Pour lui, ce n’était plus un ministère.
« Nos écoles de santé forment des assassins potentiels ! »
Selon Alpha Bacar, à la date du 31 décembre, la Guinée a perdu environ 80% des capacités de ses formateurs. Il a déploré « une pagaille totale » au niveau des écoles de santé qui n’évalue pas la qualité de la formation. « Nos écoles de santé forment des assassins potentiels ! La formation pratique n’est pas de mise, les sessions de stages ne sont pas assurées. Dans les structures de santé à l’intérieur du pays, il y a plus de stagiaires que de malades, qui n’ont jamais vu un mannequin pour faire la pratique ». Face à cette situation, « on a décidé de ne plus délivrer d’agréments aux écoles de santé, de tout suspendre jusqu’à ce que nous fassions de nouveaux cahiers des charges qu’elles seront obligées de respecter à la lettre ».
Le ministre veut remettre de l’ordre dans le département, recruter des formateurs et les former, installer des classes virtuelles de formation, construire des écoles d’art dignes de ce nom.
Le constat et les solutions de Yombouno
A son tour, le ministre du Travail et de la fonction publique, Julien Yombounou, a axé son intervention sur le fichier de la fonction publique, le manque de personnel et d’administrateurs publics à l’intérieur du pays, la régularisation de certains contractuels et stagiaires, après 10 voire 15 ans de service et la nécessité de recruter du personnel. « Les postes sont quasiment vacants, car ceux qui y sont affectés refusent de servir. Les services déconcentrés de mon ministère, notamment les inspections générales, ou l’Agence guinéenne de la promotion de l’emploi, sont quasiment absents. Les présents manquent de matériels de travail, l’administration est paralysée à plusieurs endroits. Il y a aussi un manque de synergie d’actions, de mutualisation des moyens existants, le non-respect du code du travail et des dispositions relatives à la gestion des entreprises privées et un problème lié au genre. La majeure partie des directions que j’ai visitées sont occupées par des hommes. »
Pour y remédier, le ministre Yombouno estime qu’il est primordial d’assainir le fichier de l’administration publique « complètement pourri », de réorganiser l’administration, de faire un double redéploiement horizontal et vertical des fonctionnaires et de recruter un personnel de qualité.
Abdoulaye Bah