Depuis quelques jours, le ministre de la Justice et des Droits de l’homme, Alphonse Charles Wright, est en tournée à l’intérieur du bled. Le 1er février, il a été interpellé par le premier imam de la région de Kankan, sur le cas Ismaël Nanfo Diaby, le mollah qui dirige la prière dans la langue N’ko.

« Nous avons un problème avec Ismaël Nanfo qui prie en langue maninka. Comme vous êtes arrivés, la Cour suprême a rendu une décision pour lui dire d’arrêter. Mais, il est allé prier à Norassoba (sous-préfecture de Kankan) où il a créé un incident entre ses adeptes et adversaires. Tiken Jah Fakoly aussi a dit qu’il veut prier derrière lui ici à Kankan », a exprimé au ministre de la Justice, le grand imam de la région administrative de Kankan, El Hadj Bangaly Kaba.

En réponse, le ministre Charles Wrong, soutient que Nanfo est libre de prier dans la langue qu’il souhaite, tant que cela ne crée pas de trouble à l’ordre public, avant de justifier sa position par le fait que la Guinée n’est pas un pays où la Charia (loi islamique) est appliquée.

« Dans le Saint coran, Dieu guide qui Il veut, Il égare qui Il veut. En tant que ministre des Droits de l’Homme, j’appartiens à une religion. Comme il est dit dans le Saint Coran, tu as ta religion, j’ai ma religion. Ce n’est pas vous qui devrez juger Nanfo. Vous devrez prier pour ceux qui vous croient. Etant ministre des Droits de l’homme, je dois respecter chacun dans sa croyance. Il faut que cela aussi soit compris. Je ne parle pas sur la ligne de l’Islam. Mais toute activité qui trouble l’ordre public, cela est autre chose. S’il prie en maninka chez lui, moi en tant que musulman, je peux condamner. Mais, en tant que ministre des Droits de l’Homme, je dois faire en sorte que ses droits soient respectés. Je veux qu’on fasse la part des choses », se justifie le ministre, avant d’ajouter que maintenant réunir des gens pour qu’il y ait affrontement, cela est une infraction. « Mais prier dans une autre langue, pourquoi on fait le coran en N’Ko ? C’est pour que les gens puissent comprendre l’Islam et ses règles. Dites à l’imam de laisser Nanfo prier dans la langue qu’il estime être juste, c’est son droit. Mais Nanfo ne doit pas troubler l’ordre public. Dès qu’il y a des affrontements, cela devient une infraction. On ne le poursuivra pas parce qu’il a prié dans sa langue, car c’est son droit. Mais, s’il crée des troubles et autres, ce sont les troubles qui seront jugés. Il faut qu’on soit très clair. On a des féticheurs en Haute Guinée, on a d’autres qui n’ont même pas de religion, mais c’est leur croyance, on doit les respecter. Si on dit d’islamiser tout le monde, c’est une violation grave des droits de l’homme», a tranché Charles Wright.

L’imam n’entend pas de cette oreille, il a tout de suite rappelé au ministre que les droits de l’homme et les règles de l’islam ne sont pas les mêmes. « Les droits de l’homme ne peuvent pas du tout renverser les lois de Dieu. C’est nous qui avons créé les droits de l’homme », a affirmé l’imam.

En revanche, Charles Wright a répondu à l’imam que les droits de l’homme dont il s’agit, ne sont pas comparables à l’islam ou au christianisme, ils contribuent à l’établissement d’une paix durable.

La polémique autour de la façon de prier de Ismaël Nanfo Diaby est loin de finir.

Kadiatou Diallo