Alors que le Fouta et la Guinée n’ont fini de faire le deuil d’El Hadj Ousmane Baldé Sans loi, la guerre de succession a commencé à la tête de la Coordination des Fulbhe et Haali-pular de Guinée. Le sujet déchaine les passions. Notamment, sur le désormais incontournable baromètre de la société, que sont les réseaux sociaux.

S’il est vrai que cette succession concerne directement la vieille génération, elle ne laisse pas la jeunesse indifférente. C’est surtout elle qui étale sur la place publique la division. Pendant que les tractations vont bon train entre les « vieux », les jeunes, eux, se déchirent par réseaux sociaux interposés. Comme pour tous les sujets qui concernent toute la société, Facebook est devenu le tribunal où chacun prononce son propre verdict.

Pour le cas présent, il y a deux camps qui s’opposent. Le premier soutient la décision de remplacer le défunt homme d’affaires par un autre homme d’affaires. Ce groupe n’entend pas parler de la trilogie séculaire et légendaire qui partage le Fouta en trois parties que sont Labé, Timbi et Timbo. A cause notamment d’une règle non écrite qui donne droit à chacun de ces trois de diriger la coordination à tour de rôle.

Car si cette règle est respectée, c’est un ressortissant de Labé, qui doit succéder à El Hadj Ousmane Baldé, issu là également. Ce qui n’a pas été le cas avec la désignation d’El Hadj Alsény Dalaba Barry. Pour les partisans de ce dernier, il ne s’agit nullement de « tour » pour être à la tête de la puissante Coordination de Fulbhe et Haali-pular. Il s’agirait plutôt de trouver l’homme qui est capable de représenter valablement cette importante partie de la population guinéenne, non seulement au niveau local mais au niveau international.

En revanche, pour les partisans d’une coordination tournante, il revient à un ressortissant de Labé d’être le nouveau coordinateur. De passage, ils dénoncent ce qu’ils appellent « la coordination des affairistes ». Pour eux, avec la désignation du richissime homme d’affaires, c’est l’argent qui a eu le dessus sur les compétences. Bref, le sujet continue à faire débat. En attendant la fin des tractions, les appels au calme et à l’unité continuent.

Cette succession constitue un test pour cette région. D’autant plus que, contrairement à ce qui se passe dans d’autres régions où ce sont plusieurs groupes ethniques qui composent la coordination – cas de la Guinée forestière et dans une moindre mesure la Basse Guinée-, au Fouta, il y a un seul groupe qui se dispute le fauteuil. Même si, comme sa dénomination le prouve, la coordination est composée de tous les locuteurs de la langue pular, il est évident que les Peulhs constituent une écrasante majorité dans cette région.

Le moins que l’on puisse dire est que cette succession est un test. Test de la capacité des fils du Fouta à instaurer la démocratie au niveau local avant de l’envisager au niveau national. Elle est aussi une épreuve pour savoir si les actes suivent les paroles, pour une union retrouvée et qui devrait faire tache d’huile dans tout le pays.

Dans tous les cas, cette coordination ne doit pas être un instrument au service de la politique. Elle ne doit même pas être au service de l’économie et du développement. Elle doit être un outil au service de la langue et de la culture peule. Capable de représenter la Guinée partout sur le continent et dans le monde. Cela n’est possible que si tous les fils de cette région regardent dans la même direction. Ce qui n’est malheureusement pas le cas pour le moment, comme l’atteste cette guéguerre de succession.

Habib Yembering Diallo