Le procès de l’ancien ministre de l’Environnement Oyé-Oyé Guilavogui contre le parquet spécial s’est poursuivi ce 5 avril devant la Chambre de jugement de la Cour de répression des infractions économiques et financières (Crief). Les débats ont tourné autour de sa richesse.
Poursuivi pour des faits présumés de détournement de deniers publics, enrichissement illicite et blanchiment de capitaux, Oyé-Oyé Guilavogui a piloté les ministères des Postes et des télécommunications, des Transports et de l’Environnement entre 2011 et 2022, dans différents gouvernements grimpants. Il a été écroué en avril 2022 à l’Hôtel cinq étoiles de Coronthie.
D’entrée, le juge, Alsény Mabinty Camara, a rejeté la demande de mise en liberté de l’ancien ministre, formulée à l’audience du 29 mars, par ses avocats (sans vinaigrette). Ainsi, le tribunal a ordonné la poursuite des débats. Mais, pour le dispatching des pièces aux parties, l’audience a été suspendue pour quinze minutes.
A la reprise, Oyé-Oyé Guilavogui réitère qu’il « n’a rien détourné » durant ses onze ans de ministre grimpant et qu’aucun fonds public n’aurait atterri dans ses comptes personnels. L’ex-grand manitou s’est dit familier à la manipulation des gros sous depuis 2006, quand il a récolté un marché de 149 millions de francs glissants. «Ça, c’est un petit marché », soutient-il.
Le pro-crieur, Moustapha Mariama Diallo, interroge sur la gestion du fonds de la campagne de reboisement, (sans préciser laquelle). L’ancien ministre de l’Environnement, des Eaux et Forêts déclare n’avoir pas géré le fonds de dix milliards de francs glissants pour la campagne de reboisement puisé, entre autres, du Budget national de développement (BND). Et de préciser n’avoir géré que le choix des ONG devant faire le reboisement et les sites à reboiser dans le bled.
En outre, le pro-crieur soutient que la fonction de ministre et celle d’homme d’affaires «sont incompatibles ». En réponse, Oyé-Oyé Guilavogui martèle qu’il a arrêté la gestion de ses affaires en 2011, dès qu’il a été nommé ministre des Postes, télécommunications et des NTIC. «J’ai cessé d’exercer et beaucoup de travailleurs ont été contraints au chômage. Je me suis dit que j’allais reprendre, dès mon départ du gouvernement » et de souligner qu’il s’est enrichi avant d’être ministre.
Financement de campagne électorale
La partie civile parle d’enrichissement « vertigineuse ». Oyé-Oyé Guilavogui rétorque que ses entreprises (Execo Constructions et Elite Conseils) ont bénéficié des centaines de marchés, valant de trois-cent millions et à un milliard. Avec un chiffre d’affaires « d’un milliard » de francs glissants. «Vous avez financé des campagnes électorales », charge la partie civile. «Je n’ai jamais financé une campagne électorale », clame Oyé-Oyé Guilavogui. Le ministère public enfonce le clou : « Vous avez financé la rénovation du siège du Rpg arc-en-ciel à Macenta. » Oyé Guilavogui le confirme et précise ne pas être le seul à avoir financé le projet mais que l’initiative proviendrait de lui.
L’ex-ministre Guilavogui justifie sa richesse, en partie, par le rachat de vieilles maisons (allant de trois milles à dix milles dollars) aux États-Unis, les retaper et les revendre, à travers son fils. «Je l’ai fait au moins dix fois et cela rapporte beaucoup d’argent ».
Me Saliflou-flou Béavogui, avocat (sans vinaigrette), estime que son client n’a rien pris des caisses de l’Etat. Et de désapprouver le ministère public qui « n’a présenté aucune pièce comptable, aucun rapport d’audit incriminant » l’ex-ministre. Selon lui, son client aurait fait fortune dans les affaires et que nombreux de ses biens auraient été acquis avant qu’il ne soit ministre en 2011. La défense dénonce un « maquillage » dans un « dossier vide ».
L’audience a été renvoyée au 19 avril pour la production des pièces justificatives des biens et des relevés bancaires de l’ancien ministre, ainsi que la comparution de l’ancien ministre de l’Economie et des finances, Kerfalla Yansané, le représentant de la société Huawei, entre autres. Ça promet !
Yaya Doumbouya