Discours ne ressemble pas à discours. Il y a Dialogue et dialogue : nous sommes tous des Sénégalais aujourd’hui. Les Guinéens sauront faire la différence. Pauvre de nous ! A un certain moment de l’évolution des nations contemporaines, les mêmes questions se posent aux peuples et dans les mêmes termes. L’alternance, il y en a eu 2, dans le pays de la Teranga. De Abdou Diouf à Wade, et de A. Wade, au désormais Grand président, Macky Sall, depuis son coup de maître du lundi 3 juillet 2023, lendemain de la fête de Tabaski[1]. Elle se pose dans les mêmes termes en Côte d’Ivoire qu’en Guinée. Jamais réglée, toujours d’une actualité lancinante, avec son lot de heurts et de malheurs.

Sur la question du 3ème mandat, le Sénégal vient d’administrer une leçon sur la chose à l’Afrique entière. La réponse guinéenne, à la même question il y a 3 ans, fut la honte du siècle. En Côte d’Ivoire, l’attitude d’ADO a plongé tout de go, le monde dans un scepticisme. La seule excuse, ses réalisations économiques et sociales lui ont servi de strapontin. Motus et bouche cousue de la communauté internationale, des donneurs de leçon et autres objecteurs de conscience. Le Rwanda, même chose. Ici, les résultats en termes de développement auront joué. La réponse à l’alternance de la République centrafricaine est attendue. Mais pas pour longtemps.

La question de la transition démocratique, elle se pose à la Guinée, au Mali et le Burkina Faso, pays de hommes intègres. Quelle réponse ces 3 pays vont-ils apporter ? Wait and see. 

Retournement de situation, après le discours de Macky. Un véritable cours de l’art de gouverner. Peu de gens savent que l’on gouverne par le discours. Les gourous de la com politique, le savent. Le discours, parle au cœur des destinataires. Pour la majorité, ce sont les gestes, l’accoutrement, le regard, le ton, le cadrage, le décor de la scène qui parlent. En un mot, comme en mille, c’est l’ordre… Un discours doit être discursif, dans la pure acception du terme, pas de discours fleuve, ni trop bref, pas un ton plus élevé que l’autre. Il faut choisir le temps du discours. Revoyez encore la stature de Macky, prononçant le discours, sa gestuelle. Pas de gestes désordonnés, asynchrones. Pourquoi a-t-il choisi le lendemain de la fête de Tabaski, pour livrer sa réponse à la question lancinante du 3ème mandat, qui a fait déjà 19 morts. Pour qui connait le Sénégal, pays où le syncrétisme islamique a donné de multiples confréries qui comptent plus d’adeptes, le lendemain de la fête du mouton est un jour aussi « sacré » que celui de la veille : piété, pardon, solidarité… il n’y a pas de meilleur jour pour prononcer un discours à la Nation, pour toucher le cœur de ses compatriotes.

 Au pays de Léopold Sédar Senghor, le dialogue et le discours d’anthologie de Macky Sall ont suffi à reverser la situation et à acculer Ousmane Sonko dans les filets du « ring politique ». Un coup de maître ! Jusqu’au jour J, l’instant i, du discours annoncé du Président, Sonko pavoisait dans les réseaux sociaux, dans un laïus dithyrambique, appelant ses ouailles manipulées à investir les rues de Dakar et au-delà, pour répéter la Nakba (jour de la catastrophe) à «brûler» la capitale sénégalaise. Après le discours deMacky, du 3 juillet 2023, les porte-paroles de l’enfant terrible de la Casamance demandent, désormais de régler la question de leur mentor par la voie politique, pour lui épargner la prison, à l’instar des cas Karim Wade et Khalifa Sall, qui par une pirouette juridique recouvriront leurs droits de citoyens, aptes à concourir pour les présidentielles, qui s’annoncent à grands pas. Sonko, maintenant demandeur de grâce, ni plus ni moins.

En politique, il y a trois acteurs sur la même scène, qui ne jouent pas selon le même scénario : les manipulateurs, peu nombreux, les manipulés par milliers, des hommes d’État. Macky est un grand homme d’État. Sa posture vis-à-vis du 3ème mandat est saluée, par le monde entier, sauf par les pays nains, politiquement parlant. Le maire de la Casamance est pressenti comme le mieux placé dans la course au fauteuil. Voilà que Karim Wade et Khalifa Sall se dressent en face. Qui vivra verra…

Pour le Guinéen, rien que 3 choses à retenir. 1) Nous avons intégré la vieille habitude de se désintéresser de ce qui se passe autour de nous. 2) Macky a dit qu’il s’en ira, le Sénégal regorge des hommes capables de poursuivre son œuvre sur le chantier du Sénégal émergent. Des cadres capables de construire un pays ? Pauvres de nous ! 3) Macky Sall aura été l’homme politique qui aura consolidé la pratique démocratique dans son pays. De ce point de vue, il est comparable à Andrew Jackson, 6ème président d’Amérique, qui fut le véritable artisan de la démocratie américaine.

Nous attendons ces messies de cadres guinéens qui ne sont pas encore nés, peut-être, pour nous dispenser de ces discours creux, saccadés, insipides et vides, de ces dialogues dans le vide, sans queue ni tête, qui tuent nos enfants, pour nous sortir des griffes de la misère.

Tounkara T.B Sampolis

Directeur du Centre National d’Etudes de Recherches et d’Analyses stratégiques

CNARECS/Le 1er Cabinet d’intelligence en Guinée.

Tel : 621 63 93 42/664 38 79 85

e-mail : sampolis@yahoo.fr


[1] Le choix de la date du discours à la nation, au lendemain de la fête de mouton, n’est pas anodin. Pour qui connait le Sénégal, la Tabaski revêt un caractère sacré, dans ce pays aux fortes traditions musulmanes.