Le ministère de l’Administration du territoire et de la décentralisation vient de modifier une loi relative aux prérogatives des élus locaux. Il s’agit de la délivrance du certificat de résidence. Jusqu’ici, ce sont les chefs de quartiers qui le délivraient aux citoyens. Un document nécessaire voire indispensable dans la quasi-totalité des dossiers administratifs.
La décision, qui peut sembler banale, est pour le moins incongrue. Par définition, un certificat de résidence est un document délivré par le quartier voire le secteur. Parce que ce sont ceux-là qui connaissent les citoyens résidant dans leur sphère géopolitique. Un chef de quartier ou le chef de secteur peuvent ne pas connaître tous ceux qui habitent leur localité, mais ils peuvent en revanche connaître tous les propriétaires de maison. C’est pour cela que ledit document porte, entre autres mentions, secteur et numéro de bâtiment.
Décider du jour au lendemain que ce document ne sera dorénavant délivré que par les communes ôte de facto le caractère résidence à ce papier. Il faut donc lui trouver une autre dénomination. C’est vrai que les chefs de quartier en font une source de revenue, ils délivrent – ou vendent même- le doucement à tout le monde. C’est aussi vrai qu’aucun contrôle n’est effectué pour savoir si le demandeur de ce document réside bien dans le quartier. Il y a aussi des quartiers où les chefs laissent le document à la portée de femmes et enfants pour le délivrer à tout demandeur. Mais ce n’est pas une raison pour le leur reprendre. Et surtout confier sa délivrance aux mairies.
Il s’agit plutôt de réfléchir comment instaurer la rigueur dans la délivrance de ce document. Mais celle-ci ne doit en aucun cas revenir aux communes. Il existe peu ou pas du tout un seul dossier à constituer sans le fameux certificat de résidence. De la Carte nationale d’identité, à l’ouverture d’un compte bancaire en passant par la signature d’un mariage, le document est exigé. Cela veut dire que les communes risquent d’être débordées par les demandeurs de ce document.
Mais il n’y a pas que cette affluence qui pourrait causer des perturbations. Il y a surtout le fait que la commune n’est pas une structure de proximité. Elle ne peut en aucun cas savoir quel citoyen habite quel quartier. Au contraire, c’est ce document délivré par le quartier qui permet à la commune de savoir qu’un citoyen réside dans cette commune. Cela veut dire que la décision de Mory Condé inverse la pyramide. Contrairement à la logique, ce serait désormais le chef de quartier qui irait à la commune pour savoir qui habite chez lui. Alors que c’est l’inverse qui devait se faire.
Cette décision, comme d’autres, est un déni de l’organisation administrative que les régimes successifs ont mis en place. Et le CNRD veut nous réinventer la roue. Pour faire table rase sur tout le passé. Ce qui constitue une gageure. On ne peut construire un nouvel édifice en détruisant sa fondation. On peut reprocher aux anciens de tout, sauf leur compétence sur l’administration du territoire. De ce point de vue-là, la Guinée était une référence en Afrique francophone.
Habib Yembering Diallo