Durant les dernières années de règne du pro-fossoyeur, Alpha Grimpeur, il ne restait plus rien ou presque comme contre-pouvoir. Le Législatif et le Judiciaire étant inféodés à l’Exécutif. Les magistrats l’ont confessé après la chute musclée du Prési Grimpeur. Les hommes en robe avaient fait leur mea culpa, en public !
S’agissant de l’opposition politique, seule l’UFDG et son alliance, l’ANAD, livraient un baroud d’honneur. Leur résistance héroïque n’a pas empêché le vieil homme d’obtenir son troisième mandat au prix de nombreux morts, comme il l’avait lui-même revendiqué. Dans un discours relatif à son obsession de mourir au pouvoir, l’ancien opposidant avait martelé que partout où il y a eu un troisième mandat, celui-ci a causé morts d’hommes.
Il est donc évident que c’est moins la pression de l’opposition que le coup d’Etat qui a mis fin au règne du RPG. D’ailleurs, le CNRD et ses thuriféraires clament et proclament à tout bout de champ que « ce sont eux qui sont allés à la mort ». Ce qui n’est pas sans rappeler la rhétorique du capitaine Moussa Dadis Camara qui disait à qui voulait l’entendre que c’est le CNDD qui avait affronté les généraux.
Le CNRD n’a trouvé donc qu’un seul contre-pouvoir : la presse. Au sommet du Mirador, avec sa Grande gueule, la presse voulait Refaire le monde. Le trio (Mirador, Grandes Gueules et On refait le monde) tenait les auditeurs en haleine toute la matinée et une bonne partie de la soirée. Les chroniqueurs mettaient sur la place publique les facettes de la gouvernance CNRD. Notamment ceux qui confondent leur poche et notre caisse commune.
Ce sont ces trois émissions talk-show qui sont dans la ligne de mire de ceux qui ont décidé de brouiller les ondes. Si, demain, les trois stations touchées par la mesure liberticide décidaient de supprimer ces émissions dans leurs grilles des programmes, il est fort à parier qu’elles recommenceront à émettre comme par le passé. D’autres émissions, chroniques, éditoriaux, dans l’œil du cyclone. Ce cyclone dénommé CNRDiste souffle à 380 à l’heure. Ravageant tout sur son passage.
Désormais les trois principales stations concernées par cette pratique digne de l’Union Soviétique et de son valet de la République Démocratique d’Allemagne, RDA, ont le choix : capituler et se discréditer ou résister. Sachant que dans la seconde option, Hadafo médias et Djoma médias risquent d’emboiter le pas à FIM FM, complétement assommée. La Direction a même mis le personnel en chômage technique. En attendant de connaître la direction du tsunami.
Ironie du sort, trois des Directeurs de ces stations brouillées sont absents du pays. Deux se trouvent en Arabie Saoudite pour le petit pèlerinage dit Umra et le troisième préfère noyer ses soucieux chez nos voisins Codivoiriens à l’occasion de la CAN. Les deux Aboubacar, Condé de Djoma et Diallo de FIM font partie de certains « influenceurs » Guinée-haine que l’ambassadeur d’Arabie Saoudite envoie dans son pays pour une visite touristico-islamique. Quant à Talibé Barry, qui était également au royaume wahabite récemment pour la même cause, il est dans le pays de Nana Boigny. Par ailleurs, d’autres victimes de restriction font partie des pèlerins. C’est le cas de Nouhou Baldé de guineematin.com. Ce site a été la toute première victime.
Sans doute que tous ces journaleux vont prier pour leur pays et surtout pour leur média respectif. C’est donc loin de la Guinée qu’ils ont appris les déboires de leurs confrères qui ont reçu une visite peu amicale de la gendarmerie le 18 janvier dernier. Encerclés à la maison, les journaleux ont probablement voire sûrement eu de l’empathie pour l’un des opposants du pays qui, sous le règne du pro-fossoyeur, a fait l’objet à plusieurs reprises d’isolement à son domicile.
Dans tous les cas, ce qui s’est passé à la Maison de la presse jeudi dernier est symptomatique. Ce précédent dangereux atteste que la Guinée n’est pas à l’abri d’un autre 28 septembre. Si les autorités actuelles sont capables d’encercler une maison de la presse où se trouvent des journalistes qui n’ont pour armes que leurs dictaphones et autres stylos, elles n’hésiteront pour rien. Si, demain, tous ceux qui ne regardent pas dans la même direction que le CNRD décidaient d’organiser un meeting géant pour protester contre la conduite solitaire et opaque de la transition, ils risqueraient gros.
Celui qui a encerclé, arrêté et réprimé un journaliste va-t-il épargner un leader politique ou un militant ? Le moins que l’on puisse dire est qu’il faut craindre que ceux qui disent aujourd’hui qu’ils regrettent la gestion du RPG ne disent demain qu’ils regrettent celle du CNDD. Parce que depuis la disparition de la Révolution, les Guinéens n’avaient pas connu une période aussi sombre que celle qu’ils vivent actuellement en termes de privation des droits des citoyens.
Devant la chape de plomb qui s’abat sur la presse privée, certains observateurs rappellent aux journalistes qu’ils n’ont pas toujours été du côté de la vérité et de la justice. A plusieurs reprises les radios privées ont cautionné le piétinement de la démocratie. La première fois fut la Synergie des radios en 2020 qui accompagna le président Condé pour le troisième mandat. Et la seconde, à l’occasion du 1er anniversaire de la prise du pouvoir par le CNRD. D’autres estiment que les médias devaient même refuser le cadeau empoisonné que le CNRD leur a fait. En l’occurrence la maison spoliée à M. Sidya Touré comme Maison de la presse.
L’Etat de droit est un tout. Même si, durant les onze années de règne du RPG, tous ceux qui ont pris le risque de critiquer la gestion du pays étaient taxés de militants de l’opposition, en particulier, de l’UFDG. Obligés, plusieurs journalistes de faire dans l’autocensure au nom de la « Neutralité ». Avec le recul, ils se rendent à l’évidence : opposants, activistes de la société civile, journalistes même combat commun : pour la démocratie et l’Etat de droit. Dans ce noble combat, tous les démocrates doivent se donner la main et faire un. Pour empêcher la pensée unique avec ses conséquences mortifères.
Habib Yembering Diallo