Lors de la plénière de ce mercredi24 avril, le Conseil national de la transition a amendé à la majorité des conseillers présents l’article 36 des statuts de la Banque centrale de la République de Guinée. Qu’est-ce qui change ?
Sur les 81 conseillers membres du CNT, 70 étaient présidents à la plénière convoquée par le président du parlement provisoire, Dansa Kourouma. Les ministres de l’Économie et des Finances ; de la Santé et de l’hygiène publique ; du Commerce, de l’Industrie et des PME étaient également présents à l’Hémicycle du Palais du peuple, ainsi que d’autres cadres du gouvernement. Adopté, le nouvel article accordera à l’État une marge de manœuvre dans la gestion de ses dettes et dépenses au niveau de la Banque centrale.
L’article 36 des statuts de la BCRG en vigueur (avant l’amendement) stipulait que : « Le montant total des concours que la Banque Centrale peut accorder à l’État et, le cas échéant, aux organismes et entités publics, ne peut excéder 5% de la moyenne annuelle des recettes publiques ordinaires des trois derniers exercices financiers précédant l’année en cours et pour lesquels les comptes sont disponibles. Lesdits concours sont remboursables dans un délai qui ne peut dépasser 92 jours calendaires et sont assortis du taux d’intérêt du marché en vigueur en République de Guinée. La Banque Centrale peut acquérir des titres d’État à condition que ces acquisitions aient lieu sur le marché secondaire ».
Cette disposition est conforme à celle du règlement général sur la gestion budgétaire et la comptabilité publique (RGGBCP), mais non à l’article 72 de la LORF (Loi organique relative aux lois de finances). Il en résulte que la BCRG ne doit accorder aucun concours direct ou indirect aux personnes publiques dont elle tient les comptes.
Ce qui a changé
La proposition d’amendement de l’article 36 des Statuts de la BCRG soumise au CNT fixe les modalités de dette de l’État à la BCRG et les méthodes de remboursement, le seuil, la durée et le taux d’intérêt applicable. La nouvelle disposition prévoit désormais ce qui suit : « Une dérogation peut être accordée par la Banque Centrale à l’État, dans les circonstances extraordinaires telles que des crises économiques majeures ou des catastrophes naturelles, sur autorisation du Conseil d’Administration, sans excéder le taux de convergence de la CEDEAO et remboursable dans un délai ne dépassant pas 180 jours calendaires. Lesdits concours sont assortis d’un taux d’intérêt qui ne peut excéder le taux directeur de la BCRG.»
Ministre de l’Économie et des Finances, Mourana Soumah signale que selon la LORF, le plafond de dette de l’État à la Banque centrale est de 926 milliards de francs guinéens, avec un taux d’intérêt de 10%. Il offre une bouffée d’oxygène à l’État et une véritable marge financière en réduisant ses taux d’intérêt.
Recommandations
Avant d’adopter l’amendement de l’article 36, les conseillers nationaux ont formulé des observations et recommandations. Le CNT recommande d’aligner le taux maximum du financement des déficits budgétaires par la BCRG sur les taux définis conformément aux critères de convergence de la CEDEAO; la création d’un marché financier règlementé qui pourrait permettre à l’État de mobiliser l’épargne nationale des entreprises et des ménages ; permettre aux banques primaires de se délester de leurs titres d’État auprès de la BCRG en vue de disposer de suffisamment de liquidités pour souscrire à nouveau aux titres d’État ; le rachat par la BCRG des titres d’État auprès des banques; limiter au maximum les exemptions et les exonérations fiscales et le recours à l’emprunt ; tenir compte de l’environnement économique et notamment de la capacité de mobilisation des ressources intérieures et extérieures dans l’élaboration du projet de budget. Le CNT exhorte le gouvernement à revoir à la baisse le déficit budgétaire et l’invite à la création d’une caisse de dépôt et consignations.
Afin d’accorder plus de souplesse à l’État sans sortir des critères de convergence de la CEDEAO, tout en veillant sur l’orthodoxie budgétaire, le CNT a adopté les modifications suivantes : passer de 5% du statut de la BCRG à 10% de la CEDEAO pour augmenter la valeur nominale ; revoir l’échéance à la hausse de 92 jours à 180 jours ; maintenir le taux d’intérêt inférieur ou égal au taux directeur avec un paiement précompté.
Abdoulaye Pellel Bah