Après dix mois de cavale, Claude Pivi a été cueilli au Liberia et ramené en Guinée. Entre sa maladie et la vigilence des farces de défense et de sécu, il est aisé de déterminer ce qui a favorisé sa capture, même si son fils, Verny, demeure introuvable.

À 64 ans, rongé par un diabète mal soigné, ce roi de la forêt est plus un lion édenté que le mythique soldat qui a semé la terreur aussi bien sur différents fronts qu’à Cona-cris. Il est loin l’époque où la simple évocation de son nom suffisait à terroriser civils comme hommes en uniforme. Arrêté près de la frontière libéro-guinéenne le 17 septembre et ramené en Guinée, dare-dare, c’est un Claude Pivi très affaibili et diminué qui est apparu deux jours après sur l’écran de la télé-bidon nationale, la RTG. Les images du JT de 20h30 le montrent descendre d’un blindé de la gendarmerie, porté par deux pandores, amaigri, la voix cassée. « Après mon évasion de la prison centrale de Conakry, le jour même je suis parti en Guinée forestière. Trois hommes m’ont accompagné depuis la prison centrale. Ils m’ont conduit directement dans la forêt. Une fois arrivé dans mon village, je suis resté trois jours. Le quatrième jour, j’ai traversé la frontière pour me rendre au Liberia », a ainsi résumé Coplan le périple consécutif à son évasion le 4 novembre 2023 de sa cellule à l’Hôtel cinq étoiles de Coronthie.

En conférence de braise, le 20 septembre, ses avocats (sans vinaigrette) maintiennent la thèse de l’enlèvement de leur client. Ils pointent du doigt un commando de quatre personnes, auquel ne serait associé ni de près ni de loin son fils, Verny Pivi. Ce dernier est pourtant considéré comme celui qui avait dirigé l’opération d’exfiltration des prisonniers au départ composés, outre Coplan, de l’ex-patron de la transition (200-2008) El Dadis, des pandores Moussa Tiégboro-bara Camara et Blaise Goumou. Finalement, les trois derniers dont la cavale a tourné court, ont été repris et ramenés au gnouf.

Dix mois durant, si on en croit la version de ses conseils, Claude Pivi étaient aux mains d’un groupe de ravisseurs qui peinaient à le voir en détention. Des subordonnés ou des personnes envers lesquelles il se serait montré généreux d’une manière ou d’une autre, lorsqu’il croquait la vie à pleines dents. Bref, Pivi serait parti malgré lui, aurait un jour même bagarré pour recouvrer sa liberté et, aujourd’hui, serait plein de remords. « J’étais mieux à la Maison centrale où j’aurais pu continuer à me soigner. J’ai failli perdre ma jambe gauche », aurait confié le fugitif à ses avocats. « Il est parti au Liberia se soigner, puis se rendre », jure la main sur le palpitant Me Abdourahmane Dabo.

L’ombre d’Alpha Grimpeur

Jugé pour son implication dans le massacre du 28 septembre 2009, l’ancien ministre de la Sécu présidentielle sous El Dadis a été condamné à la réclusion criminelle à perpétuité par le tribunal de Dixinn. Il devrait faire face à une nouvelle procédure en lien avec son évasion de prison. En attendant, il est réincarcéré à la Maison d’arrêt de Coyah, nouvellement reconstruite, jugée plus commode et plus sûre.

Dans la foulée de l’arrestation de Coplan, la presse libérienne a fait état d’une tentative de coup d’État contre la junte de Mamadi Doum-bouillant déjouée par le Liberia. Les services de sécu libériens auraient interpelé un certain Ibrahima Khalil Chérif à la frontière entre le Liberia et la Guinée. Accusé de recruter des mercenaires pour ourdir un complot contre Cona-cris, il aurait reçu 150 000 dollars ricains de l’ancien président Alpha Grimpeur, lequel disait ces derniers jours s’adresser aux Guinéens « depuis quelque part en Afrique ». Sans davantage de précisions.

Un haut commis de l’État guinéen confiait il y a peu ses inquiétudes quant à la présence annoncée du Grimpeur sur le continent, alors qu’il était censé vivre en exil à Istanbul. Il n’avait pas manqué de qualifier d’erreur monumentale la décision du Comité national de rassemblement pour le développement (CNRD) de l’avoir laissé s’exiler en Turquie. Si les autorités guinéennes disent apprendre la nouvelle par voie de presse, comme le Guinéen lambda, elles ne doutent pas un seul instant des intentions malveillantes de leur prédécesseur. Des aigris préfèrent ironiser sur des putschistes qui accusent de tentative de putsch celui qu’ils ont délogé du palais présidentiel Sékhoutouréya, par putsch un dimanche matin de 5 septembre 2021.

Diawo Labboyah