Le Président de la transition, Mamadi Doumbouya, a dans un décret du 2 février ordonné la gratuité, pour la première demande, de la Carte nationale d’identité biométrique. Une nouvelle diversement accueillie par les Guinéens qui rappellent que la gratuité de la césarienne n’est toujours pas effective dans les hôpitaux publics guinéens.
Désormais, la Carte nationale d’identité biométrique est gratuite pour tous les Guinéens pour une première demande. Le décret lu à la télévision nationale le 2 février par le ministre secrétaire général à la Présidence, le général Amara Camara, précise qu’un arrêté conjoint des ministres en charge de l’Administration du territoire et de la décentralisation, de la Sécurité et de la protection civile, des Affaires étrangères, de l’intégration africaine et des Guinéens établis à l’étranger, déterminera les conditions et modalités de l’application de la mesure. Autant dire que les dispositions matérielles ne sont pas encore prises pour matérialiser la volonté politique exprimée.
Au commissariat central de police de Kaporo-rails (Ratoma), où on s’est rendu le 3 février, des citoyens en quête du sésame forment une longue file d’attente. Dans les rangs, les avis divergent sur la nouvelle de la gratuité de la Carte nationale d’identité biométrique. Un des demandeurs, qui a requis l’anonymat, est venu faire le dépôt de son dossier. Curieusement, il préfère la réduction du prix de la pièce d’identité à la gratuité : « C’est vrai que les conditions de vie sont difficiles, mais il fallait réduire le prix d’acquisition de la carte de 100 000 à 20 000 francs guinéens. C’est ce qui donne de la valeur ».
Risques de corruption et d’explosion de la demande
Pour lui, avec la gratuité, les commissariats centraux de police risqueraient d’être envahis. « Il faut davantage décentraliser les services afin que le traitement des dossiers soit rapide. C’est trop lent. Cela fait cinq mois que mon petit frère attend sa Carte nationale d’identité, ça ne sort toujours pas », déplore-t-il.
A ses côtés, une dame qui a également requis l’anonymat, venue s’enrôler avec ses deux enfants, ne se fait pas d’illusion. Elle est convaincue que la gratuité annoncée ne sera pas effective, pour cause de corruption : « Je ne trouve rien d’important, partout où on parle de gratuité, c’est le contraire en coulisses. On se connaît dans ce pays ». Elle en veut pour preuve l’annonce de la gratuité de la césarienne depuis sous l’ancien président Alpha Condé : « Officiellement, elle est gratuite, mais on fait payer les patientes. On paie tellement de frais que certaines optent pour les cliniques privées pour mieux se traiter ».
Venu récupérer la Carte nationale d’identité de son frère, Boubacar Sow, informaticien, se réjouit, lui, de la décision présidentielle : « J’apprécie la décision, elle est intéressante. Bien que gratuite, il faut encourager les citoyens à s’approprier la carte, contraindre d’autres à s’enrôler. Si la décision est suivie, tout le monde aura sa pièce ».
Souleymane Bah