Le 3 février, les ouvriers chargés de la construction de la Cité administrative de Koloma, située dans la commune de Ratoma, ont entamé une grève « illimitée ». Ils dénoncent des conditions de vie et de travail difficiles, dues à des coupes de salaires qu’ils imputent aux sous-traitants.

Après un an de travail, les ouvriers disent n’avoir toujours pas connaissance de leur salaire exact. Ils dénoncent donc un manque de transparence du contrat qui les lie à leur employeur. Les grévistes ont suspendu les travaux depuis lundi après-midi, avant de déserter le chantier. Ils conditionnent toute reprise à la satisfaction de leurs revendications et en appellent à l’implication du président de la transition, Mamadi Doumbouya.

Ce mardi 4 février, dès 7 heures 30, les grévistes ont réoccupé la devanture du chantier, scandant des slogans : « Sous-traitants, zéro » ; « Pas de bon salaire, pas de travail ! »

Arrestations et licenciements

Camara Ibrahima Sory, secrétaire général du syndicat des ouvriers, confie que le mouvement de colère couve depuis longtemps. « Cela fait un moment que nous revendiquons pour l’augmentation de nos salaires, mais nos patrons ne prennent pas cela au sérieux. Pour un premier temps, le mouvement syndical avait déclenché une grève mais certains de nos collègues se sont retractés. Les uns ont été arrêtés et d’autres ont perdu leur travail. Ils ne veulent pas qu’on revendique nos droits, alors que la grève est une façon pour nous d’obtenir ce qu’on demande à nos chefs. C’est pourquoi nous partons en grève illimitée, jusqu’à la satisfaction de toutes nos revendications ».

La plupart des ouvriers grévistes n’ont pas de contrat de travail ou en ignorent le contenu. A en croire le syndicat, les premiers venus avaient signé un contrat de six mois, renouvelable. « Et même ce contrat n’est pas dans la conformité : si tu donnes le contrat à un ouvrier, il doit le lire d’abord. S’il est d’accord, il le signe pour le remettre au patron, qui à son tour le renvoie à l’AGUIPE [Agence guinéenne pour la promotion de l’emploi] pour signature. Le patron, à son tour, doit fournir une copie à ses travailleurs. Mais ici, tel n’est pas le cas. Nous avons réclamé les copies de nos contrats, mais sans suite. Donc aujourd’hui, nous avons décidé d’arrêter le travail », poursuit le secrétaire général du syndicat des ouvriers.

Des travailleurs surexploités mais sous-payés

Les ouvriers travailleraient dix heures par jour (7 h 30 – 17 h 30), en violation de ce qui a été initialement convenu. « Dans le contrat, c’est 8 heures de travail et chaque ouvrier doit être payé à 150 000 FG par jour. Mais cela n’a jamais été respecté par nos employeurs. Certains sont payés à 75 000 FG par jour, d’autres à 50 000, voire moins que ça. Et pire, c’est le 15 du mois suivant que certains ouvriers reçoivent 450 000FG, d’autres 600 000 FG ou 700 000 FG. Aucune norme n’est respectée, ils font ce qu’ils veulent. Nos salaires sont diminués, nos primes confisquées, il n’y a pas d’équipements… On se tape tout le travail, eux ils empochent l’argent. Trop, c’est trop ; on est fatigué ! »

Au moment où nous quittions les lieux, les gendarmes de la Brigade de recherche de Kipé étaient sur place pour prévenir d’éventuel débordement.

Kadiatou Diallo