Le PM et ses ministres séjournent, depuis le 5 février, en région forestière dans le cadre d’une nouvelle immersion gouvernementale. La 3e de l’ère CNRD, pour diagnostiquer les problèmes du pays profond…sans y remédier ?
Après La marche de la paix et de l’unité à Cancans, leurre est à l’immersion gouvernementale. Le Premier ministre et sa clique de ministres, de cadres (en bois) de l’administration et de tout ce que la junte peut compter de propagandistes sont à l’assaut des buissons de l’arrière-bled pour, dit-on, toucher du doigt la galère du populo. Amadeus Oury Bah a mis le cap, le 5 février, sur Nzérékoré. Première étape d’un safari qui va certainement le mener aux quatre coins du bled. En un mois. Il a tenu, selon lui, à commencer par ce buisson meurtri par le drame du 1er décembre 2024 au Stade du 3-Avril qui avait fait 56 morts (bilan officiel). Amadeus Oury Bah annonce même une prise de parole, dans les prochains jours, du général Mamadi Doum-bouillant.
Du déjà vu
Au menu de l’immersion, visites de chantiers, inauguration d’édifices publics, échanges avec les autorités locales et même remise d’attestations de formation à des apprenants. C’est cela, assure le PM, qui permettra d’être à « l’écoute des réalités du terrain et d’encourager un dialogue constructif » avec le populo. Rien de nouveau, jusque-là. A Zaly, Amadeus Oury Bah fait exactement comme ses prédécesseurs : rencontre avec la notabilité, le bureau du patriarche, les couches sociales et professionnelles du buisson… Il leur passe le message du Chef de la junte et tient des promesses.
Il est aussi friand des bains de foules. Avant lui, Mohamed Béa et Nanard Goumou avaient utilisé le même stratagème. Eux-aussi n’avaient pas lésiné sur les moyens pour conférer de l’éclat à leurs immersions. Mais à date, l’on s’interroge sur les résultats des premières tournées. Les rapports d’activités, s’ils avaient été concoctés, dorment certainement dans un tiroir poussiéreux de la Primature.
Contradictions, cacophonie
Acquis du CNRD, Siman-doux 2040, retour à l’ordre constitutionnel…, le PM n’a pas été avare en mot à Zaly. Il a démenti formellement les propos d’Ousmane Gawa Diallo selon lesquels la transition débordera sur 2026. Le porte-voix du goubernement a fait ces déclarations à un déjeuner de presse, le 29 janvier. Ousmane Gawa Diallo table sur le référendum et une seule sélection cette année : « Le reste se fera en 2026 », disait-il.
Depuis Zaly, Amadeus Oury Bah balaie ces propos d’un revers de la main : « Comme le président de la République l’a dit, l’année 2025 est une année électorale. Le référendum constitutionnel, la présidentielle, les législatives, communales et régionales pour instaurer l’ordre constitutionnel. L’ordre constitutionnel est une priorité de tous les Guinéens. » Le PM est certes sans équivoque, mais c’est à se demander si l’ex-Gawa de l’UFDG a totalement tort. La façon du CNRD de se hâter au pas de caméléon n’est pas rassurante.
Montrer les muscles
Après Nzérékoré, le PM posera ses valises dans les autres régions naturelles du Bled, notamment en Moyenne-Guinée. Amadeus Oury Bah compte là aussi communier avec le populo et toucher du doigt leurs réalités. Mais à côté de la feuille déroute du CNRD, le PM aurait son agenda dans un coin de la tête : donner la certitude aux bidasses que le Fouta est « dans l’esprit ». Il se murmure que sa venue dans cette région, fief incontesté de l’opposition, est beaucoup plus vue comme un défi de mobilisation qu’une envie d’éradiquer la souffrance des citoyens.
Ces derniers temps, les rumeurs persistent sur un remplacement de Bah Oury par ‘’un fils de la Basse-Côte’’. Le PM s’emploierait donc à convaincre ses détracteurs qu’il faut compter avec lui, en termes de mobilisation. Les étapes de Mamou et de Labé sont cochées comme un défi de taille.
Les mouvements de soutien à la candidature du Doum-bouillant, proches du PM, s’activent déjà sur le terrain. Baba Alimou Barry, prési du Mouvement pour l’alternance en Guinée et d’autres jeunes influents séjournent déjà dans ces deux buissons. Ils seraient chargés de préparer une mobilisation grandiose, pour apporter de l’eau au moulin du chef du goubernement. Attention à ne pas couler le navire.
Yacine Diallo