Mes amis, les deux recensements initiés par le pouvoir armé sont clos. Comme d’habitude, notre instinct sélectif a fait des merveilles. Les agents, munis de leurs machines et de consignes mystérieuses, vous lancent un « Attendez-nous à la maison, on arrive ! » avant de disparaître. On les attend comme le Messie, mais eux, ils ont opté pour la version « Moïse »: ils ont traversé la mer, rouge de promesses… sans nous. Les petits malins ! Ils ont inventé le recensement « sans population », une prouesse typiquement guinéenne: comment compter des gens qui n’existent pas ? Wallahi, si les chiffres pouvaient parler, ils avoueraient être des estimations… tirées par les cheveux de nos espoirs déçus.
Ah, la transition ! Déjà quatre saisons, suspens insoutenable, mais toujours pas de finale. Ce mot magique sonne comme une promesse de vacances… qui se transforme en colonie pénitentiaire. En Guinée, la transition, c’est un feuilleton dont même Netflix refuserait le scénario. « Patience, le peuple, patience ! », nous serine-t-on, pendant que les opposants jouent aux cache-cache géopolitique: les chanceux en exil (villas climatisées), les moins chanceux en prison (matelas climatisés). Quant à leurs sous-fifres, ils font de la figuration dans l’arène, comme des gladiateurs sans épée… mais avec des tweets rageurs.
La vulgarisation de la nouvelle Constitution est lancée comme une alarme incendie…en panne. On voit des foules en tee-shirts floqués «Oui à la Constitution» (offerts gracieusement, bien sûr) arpenter les rues avec des mégaphones enroués. Ils scandent les mérites d’un texte qu’ils n’ont jamais lu, comme des perroquets récitant un mantra incompris. La Primature, elle, a innové avec son slogan « Un jour, un article ». Très bien ! Mais quel article présenter le Jour de la résurrection ? Hé Kéla !
En Guinée, la corruption est un sport olympique où tout le monde gagne… sauf le peuple. Un minustre (notez le jeu de mot subtil) promet de «lutter contre la corruption » depuis son bureau climatisé, entouré de coffres-forts plus garnis que les rayons d’une bijouterie. L’argent a des ailes, oui…mais chez nous, il a aussi un passeport diplomatique. Un illustre ventripotent s’est offert une villa à Dubaï avec l’argent du contribuable. Piscine, jacuzzi, cinéma privé… tout y est, sauf la honte. Et après ? Il ose nous regarder droit dans les yeux pour dire: « Je travaille pour vous. » Oui, oui… comme un chat « travaille » pour les souris. Hé Kéla !
À Cona-cris, on tombe malade deux fois: une fois au Ramadan (curieusement, tous les fonctionnaires ont la gastro), et une autre quand on est rattrapé par la justice pour détournement. Soudain, le voleur milliardaire devient un mourant. « Libérez-le, c’est une urgence humanitaire ! » Une fois relâché, l’intéressé file à l’étranger, où il se refait une santé… et un compte en banque bien garni. La justice, ici, est une dame aux yeux bandés… mais le bandeau ne couvre qu’un œil. L’autre, bien ouvert, regarde toujours du côté où les enveloppes crissent.
La CRIEF, cette cour censée terrifier les corrompus, fonctionne comme un médecin légiste: elle arrive après la mort… des preuves. On arrête, on juge, on condamne… mais le système reste intact, comme un véhicule réparé avec un tournevis en bois. Pendant ce temps, les hôpitaux manquent de médicaments, les écoles croulent sous les effectifs et les routes ressemblent à des nids d’éléphants. Mais on Chen fout: les rats ont leur bateau, le peuple a ses rêves. À Fakoudou !
Peut-être qu’un jour, la Guinée sera un pays où l’argent servira à soigner, éduquer, construire. Où les gouvernants voleront… des cœurs, pas des fonds. Où la justice sera aveugle… mais pas sourde. En attendant, continuons à rire, à râler, à espérer. Parce qu’en Guinée, l’humour est la seule monnaie stable. À Fakoudou !
Il y a quelqu’un qui disait: «Le développement, la justice et l’égalité des chances sont comme trois bus qui n’arrivent jamais. Pendant ce temps, mon voisin a quatre femmes, et moi je suis divorcé. La solidarité ? Il n’en a jamais entendu parler.»
«Partager ses épouses ? Mais c’est sacré, ça ! Tu trouves chat normal, en bon croyant ?», lui répond Marie-la-baleine.
Le mec retient son souffle, allume sa clope, avant de balancer la dernière. «Avant, nos parents avaient la dignité. Aujourd’hui, on a des selfies, des likes, et des dettes. On veut paraître au lieu d’être. Résultat ? Des crimes, des guerres, des magouilles !»
Dans ce café du peuple où la rumeur est plus puissante que la réalité, on se djo, on y raconte des histoires et chacun repart de son côté avec sa part de vérité.
Marie-la-baleine, sept mariages et zéro comptes joints, avait connu tous les mecs branchés du quartier. Quelqu’un lui dit: «Ma sœur, assieds-toi deux minutes, qu’on cause sérieusement. Tu me dis que ton homme actuel te promet monts et merveilles ? Qu’il va t’installer un commerce ? Qu’il va régler la scolarité des enfants ? Qu’il t’a juré-saigné sur la tombe de ses ancêtres ? Très bien. Maintenant, ouvre grand les yeux :
– La popote du marché, elle se paie en cash, pas en promesses.
– Les ordonnances à la pharmacie, c’est du franc guinéen qu’ils demandent, pas des serments. Le paracétamol, chat se mérite.
– Les habits des enfants pour la rentrée, c’est du comptant qu’il faut, pas du « bientôt »
– Même le taxi pour aller au commissariat porter plainte, lui, il veut du liquide.
Alors ma chère, entre le nem-nem bien croustillant qui nourrit aujourd’hui et la parole dorée qui nourrit… les illusions, le choix est vite fait, Kâ ?
Wallahi, même les mouches du marché rient jaune quand elles entendent: «Chérie, fais-moi confiance » alors que le compte en banque fait la grève de la faim.»
Je te crois, lui rétorque Marie-la-baleine: «L’amour c’est pour les enfants. Les adultes ont plutôt besoin d’argent !»
Petite astuce de survie : Quand un homme te parle d’avenir, tends la main vers son portefeuille présent. Si c’est vide, ton avenir avec lui le sera aussi. CQFD. Même les mendiants de Sandervalia rigolent quand on leur propose des promesses à la place des billets de banque: «Merci patron, mais ma faim, elle, elle est en temps réel ! À Fakoudou !»
En Guinée, l’argent ne circule pas, il tourne en rond… mais uniquement entre les poches des initiés ! C’est comme une partie de Loto où seuls quelques privilégiés ont le droit de gratter les tickets. Les billets changent de main, mais jamais de quartier: Kaloum reçoit, Kipé dépense, et Dixinn… attend le trickle-down économique (spoiler: il ne coulera jamais). Même les billets semblent fatigués de faire toujours le même trajet.
Seul Bogolan Haba (pas le tissu, encore moins le haricot) ose dire: « il y a de l’argent » dans un pays où tous les carnets de comptes sont en maintenance. Wallahi, si l’économie était un jeu de cartes, le peuple aurait la dame de pique (symbole) et les initiés collectionneraient les as… sous leur matelas. Hé Kéla !
L’argent est bien là… mais il fait du camping sauvage dans des poches bien gardées. À afficher dans tous les ministères, les banques en panne de liquidités et les cuisines des femmes débrouillardes ! À Fakoudou !
Sambégou Diallo
Billet
Un chat m’a conté
Les serments, c’est comme le parfum de rue :
Ça embaume 5 minutes… et ça s’évapore.
Le nem-nem, lui, laisse des traces de gras sur le menton,
Et des souvenirs concrets dans l’estomac. À Fakoudou !
SD