À moins de deux semaines de la présidentielle, la campagne du candidat du pouvoir Mamadi Doumbouya est plombée par des guéguerres de positionnement. Des camps rivaux se déchirent alors que sur le terrain, la ferveur populaire tarde à se manifester.
Depuis fin novembre, les soutiens du candidat Mamadi Doumbouya se battent pour le contrôle de sa campagne présidentielle. La victoire de Mamadi Doumbouya ne fait l’ombre d’aucun doute, n’ayant aucun adversaire sérieux en face. Mais sa campagne a du mal à démarrer véritablement.
La cause, une guerre de tranchées partisans. Ceux-ci passent plus du temps à s’invectiver qu’à animer des meetings, conduire des marches de soutien ou des campagnes de porte-à-porte. Des soutiens ne digèrent pas qu’ils soient laissés en rade au compte de la campagne du Président de la transition.
Des querelles héritées de l’UFDG
Depuis son arrivée au pouvoir, le CNRD effectue une razzia à l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG). Des hauts cadres, des communicants du parti n’ont pas hésité à franchir le pas et rejoindre le navire CNRD. Mais la première vague s’estime éclipsée par les nouveaux venus. Et la campagne vient accentuer les fractures.
Mamadi Doumbouya, contrairement lors du référendum, a choisi de se passer des ministres dans sa campagne. Mais cette décision ne s’applique pas à tout le monde. Cellou Baldé, après moults atermoiements, a réussi à prendre le directoire régional de campagne de Labé. Il le gère avec ses fidèles lieutenants, au détriment du camp du général Aminata Diallo, porte-parole du CNRD, mais surtout du clan du ministre Ousmane Gaoual Diallo.
Ce dernier, qui aspirait d’être directeur national de campagne, est jusque-là effacé. Même s’il a étalé sur la toile ses images de campagne à Gaoual le 14 décembre. Mais ses petits fulminent : « Il y a une vague qui a récemment quitté l’UFDG, elle veut déstabiliser le CNRD. C’est elle qui a déstabilisé Cellou Dalein Diallo, qui nous a chassés du parti. Cette vague veut induire le Président Mamadi Doumbouya en erreur », peste Lamarana Gongorè Bah, un jeune de l’Axe. Celui-ci ne digère pas le fait que des cadres peuls refusent d’aller à l’intérieur du pays avec les anciens communicants de l’UFDG. « Dans les autres régions, les cadres tentent d’unir tout le monde et d’aller sur le terrain avec les jeunes. Nous, ils nous rejettent. Ils se cachent de nous pour aller battre campagne », dénonce-t-il.
« Militants de la 25e heure »
Ces jeunes frustrés, notamment de l’Axe Hamdallaye-Kagbélen, ne comprennent pas que des alliés de dernière heure puissent rencontrer Mamadi Doumbouya, soient financés, équipés en moyens de locomotion et déployés à l’intérieur du pays pour battre campagne. Contrairement à eux. « Quand nous nous battions pour pacifier l’Axe, ils étaient où ? Le Président Doumbouya doit faire très attention. Aujourd’hui, nous, nous n’avons même pas accès à lui, alors que des gens qui l’ont insulté de par le passé sont reçus avec les honneurs à la Présidence. Sommes-nous des pestiférés ?», s’interroge un autre transfuge de l’UFDG joint par notre rédaction.
Les frustrations ne viennent pas uniquement d’anciens caciques de l’UFDG. La semaine dernière, Kader Yomba Condé, soutien de première heure du CNRD, s’en est pris au Premier ministre, Amadou Oury Bah. « Je m’adresse à Monsieur Bah Oury et Monsieur Faya François Bourouno [respectivement directeur national et directeur national adjoint de la campagne de Mamadi Doumbouya, ndlr] : Vous avez appelé les mouvements et coordinations de soutiens, vous vous permettez de refouler notre délégation. On dirait que vous avez reçu instruction de nous mettre de côté. Vous pensez que nous sommes descendus du ciel ? Vous ne pouvez nous effrayer dans ce combat. Nous avons sacrifié nos vies derrière Doumbouya. Vous ne pouvez pas nous écarter aujourd’hui comme des bâtards. Vous-même n’étiez pas là quand on combattait pour ce monsieur. Nous ne vous laisserons pas induire le Président en erreur. »
Face aux critiques, Kader s’est ravisé, accusant ses détracteurs d’avoir monté la vidéo grâce à l’intelligence artificielle. Au même moment pratiquement, Takana Zion critiquait la façon dont la campagne se menait en Basse-Côte, « sans les fils de la région ». Lui aussi a mis de l’eau dans son vin.
Yacine Diallo


