C’est pour dénoncer la prise en charge catastrophique des femmes enceintes dans les structures de santé, mettre un terme aux souffrances physiques et psychologiques qu’elles y subissent que des nounous regroupées au sein du Collectif pour une Prise en Charge Humanisée des Femmes Enceintes et des Accouchements (CPCHFEA), ont organisé une marche blanche et silencieuse.

Ces nounous toutes habillées en blanc avec des foulards rouge ont brandi des banderoles sur lesquelles on pouvait lire « Parce que toute vie mérite d’être sauvée, marchons pour la vie ». Elles ont marché du rond-point du port autonome de Cona-Cris au ministère de la santé, où elles ont été reçues à bras ouverts dans une salle de conférence dudit ministère.

Une fois reçu, c’est nounous ont exposé leur problème à travers un mémorandum qu’elles ont adressé au ministre de la santé. Dame Mme Djenabou Sylla, la porte-parole du collectif en lisant le mémorandum a attiré l’attention du ministre sur un cas devenu emblématique et qui défraie la chronique qui est celui du professeur Tely Sy, médecin gynécologue qui a une clinique à Lambanyi, commune de Ratoma.

Les témoignages qui le mettent en cause pour négligence extrême, mépris, arrogance, comportements anti-professionnel pour ne citer que ceux-ci. Le dernier cas en date est celui de Mme Guissé. « Cette femme, suivie par professeur Sy depuis le début de sa grossesse, a accouché dans sa clinique le samedi 5 mai dernier. Elle attendait des triplés, selon ce que le professeur lui a toujours dit, mais qu’elle ne fut leur surprise, à elle et son mari, de découvrir un quatrième bébé à l’accouchement. L’équipe de prise en charge de Mme Guissé n’était composée que de deux agents dont un qui ignorait le statut pour un accouchement de quadruplés. Informé de la complication de l’opération, Dr Tely Sy n’a pas daigné faire le déplacement, bien qu’habitant une maison qui jouxte sa clinique. La suite de l’accouchement est encore plus dramatique. Les quatre bébés sont arrivés prématurés et devaient être immédiatement placé dans des couveuses, des équipements indisponibles dans la clinique. C’est transportés dans la voiture personnelle du père, alors qu’une voiture ambulance était garé dans la cour de la clinique, que les bébés en vie sont arrivés à Donka, à l’institut de nutrition et de santé de l’enfant (l’INSAE), censé être mieux équipé. Malheureusement il n’y a pas suffisamment d’oxygène, ni de couveuses adaptées ou encore de produits d’alimentation et de réanimation, ce qui a conduit au décès des quatre nouveaux-nés entre dans la nuit du dimanche à lundi, plongeant le couple Guissé dans une détresse innommable.

Un autre cas concernant toujours le professeur Tely Sy est celui très connu de Mme Sylla Djenabou Diallo, également suivie à la clinique de MEDECIS par le professeur Tely Sy. « Elle attendait des jumeaux. Son accouchement prévu le 1er octobre 2017 fut un cauchemar. Mme Sylla décrit une délivrance dans la douleur et quasiment sous la torture de ceux qui étaient chargés de la faire accoucher. Alerté là également, le professeur avait refusé de venir à l’accouchement prétextant être fatigué pour avoir longtemps travaillé ailleurs, en dehors de la clinique. Impuissant, livré à eux-même, le couple Sylla a perdu ses jumeaux faute d’assistance et de prise en charge adéquates. Ce cas est connu, des suites judiciaires encore en cours, le couple ayant décidé de faire appel de la décision rendue par le tribunal ».

Selon le collectif, ces différents témoignages, il y en a des dizaines d’autres, sont suffisamment graves pour déclencher une inspection sérieuse de la clinique MEDECIS afin de procéder à l’audition du professeur Sy. Il ressort clairement que ce dernier a délibérément violé son serment d’hypocrate, en abandonnant ses patients entre les mains d’une équipe insuffisante et incompétentes, par négligence ou par mépris. Les diagnostics sont également mal posés, sinon comment comprendre la non-détection de toutes ces anomalies durant les nombreux mois de grossesse. L’exemple de la clinique MEDECIS est emblématique du délaissement de notre système de santé, en particulier la santé maternelle et infantile. Les services de santé sont marchandisés par des médecins devenus commerçants dans le secteur. Dans les maternités, les femmes en grossesse sont humiliées avec des propos dégradants, voire même des gifles et sont soumises à des accouchements au forceps. Et on ferme les yeux sur les nombreuses erreurs médicales entrainant des décès ou des handicaps à vie. Voilà pourquoi tous les indicateurs de notre système de santé sont au rouge, plaçant ainsi notre pays en queue de peloton dans les classements réguliers des institutions internationales notamment l’OMS.

Pour corriger ces dysfonctionnements le collectif a proposé quelques mesures à prendre immédiatement et à court terme afin d’humaniser la prise en charge des femmes enceintes et des accouchements dans les milieux hospitaliers.

Pour répondre, le représentant du ministre de la santé Sékou Condé a promis de mener des enquêtes sur les deux cas détaillés dans le mémorandum et ceux qui n’ont pas été énumérés, ensuite de fermer tous les hôpitaux ne répondant pas aux normes sanitaires. Une inspection systématique est prévue dans les cliniques de la capitale les prochains jours. Wait and see.