Après les élections controversées de 2010 qui vous ont porté à la tête de l’Etat guinéen, j’ai attiré votre attention sur le danger d’une ethno-stratégie accentuant le sentiment d’exclusion chez l’ethnie de votre challenger, Cellou Dalein Diallo. Vous ne m’avez pas écouté. Je vous ai donné des stratégies qui empêchent, sans aucun doute, les politiciens de diviser et opposer les communautés guinéennes qu’ils ont trouvées unies et en famille sacrée, vous vous êtes mis en colère contre moi, vous m’avez mis en prison à plusieurs reprises pendant plus de deux ans, après avoir brûlé ma voiture de campagne. Je vous ai dit que piétiner la presse guinéenne et se glorifier d’être interviewé par des médias occidentaux et sénégalais est une insulte grave à notre Nation et ne vous fera pas développer notre pays, vous ne m’avez pas écouté. J’ai dit aux médias guinéens que diffuser vos interviews réalisées ailleurs, vous qui les minimisez et refusez de leur parler, est une honte, eux non plus ne m’ont pas écouté. Ils se sont empressés de les mettre à leur Une.

Je vous ai dit, M. Alpha Condé, que vos voyages à l’étranger avec location d’avions sont trop coûteux, trop nombreux et inutiles, vous ne m’avez pas écouté, vous avez brûlé la majeure partie de l’économie nationale. Je vous ai dit de rentrer dans la zone FCFA puisque, comme vos prédécesseurs, vous êtes incapable de gérer notre monnaie nationale dont des containers de billets se fabriquent n’importe où, n’importe comment, n’importe quand…, vous ne m’avez pas écouté. Je vous ai dit de mettre fin à toute exportation de matières premières à l’état brut, les transformer sur place ici sur le territoire guinéen et cesser de faire évaporer naïvement nos richesses du sous-sol qui peuvent, avec une bonne gestion, faire de la Guinée l’un des pays les plus prospères, vous ne m’avez pas écouté. Votre incapacité a fait perdre à notre pays de centaines, voire des milliers de milliards de dollars des Etats Unis en 10 ans. Je vous ai dit que sans les bonnes ressources humaines, les ressources du sous- sol, quelles que soient leur quantité, leur qualité et la grandeur de leur valeur, ne sont que des déchets toxiques qui portent préjudice à leur peuple au lieu de lui être utiles, vous ne m’avez pas écouté. Vous n’avez nommé dans vos différents gouvernements que des incapables.

Je vous ai dit que l’argent que votre gouvernement (comme les gouvernements de vos prédécesseurs) vole à l’Etat par la corruption peut construire au moins, 1 000 km d’autoroutes, 1000 km de double chemins de fer, 1000 000 de logements sociaux… chaque année, c’est-à-dire 10 000 km d’autoroutes, 10 000 km de double chemins de fer, 10 000 000 de logements sociaux… au bout de 10 ans de vos deux mandats, vous ne m’avez pas écouté, la corruption a pillé notre pays. Je vous ai dit que vous ne pouvez pas développer la Guinée avec l’extrême corruption de vos ministres et autres responsables qui empochent plus de 90% de chaque financement, vous ne m’avez pas écouté, vous les avez laissé voler tous les budgets sans rien réaliser.

Je vous ai dit de construire un métro et 6 autoroutes à Conakry, construire des Tram, des boulevards et des échangeurs au niveau de toutes les transversales des 6 éventuelles autoroutes, lotir et aménager les villes, relier les 33 préfectures par des autoroutes et des TGV, développer l’agriculture et l’industrie, transformer nos matières premières ici en Guinée…, vous ne m’avez pas écouté. Je vous ai dit de construire 6 millions de logements sociaux, vous ne m’avez pas écouté, vous avez refusé d’en construire un seul en 10 ans à la tête du pays, vous avez, au contraire, détruit des milliers d’habitations de citoyens innocents notamment à Kipé, Démoudoula, Kaporo-Rails…Vous avez jeté les familles et leurs bagages dans la rue, sans jamais songer à les reloger. Je vous ai dit que les 20 milliards de dollars des Etats Unis de votre très mauvais deal avec la Chine peuvent construire au moins 2500 km d’autoroutes reliant les 33 préfectures de la Guinée, un métro et des Tram à Conakry, 2 000 000 de logements sociaux et même quelques TGV, vous ne m’avez pas écouté, votre premier ministre a annoncé une véritable évaporation de ce montant dans de minuscules projets qui ne couteraient pas un demi-milliard dans un marché honnête et juste.

Mais que peut-on attendre de vous, M. Alpha Condé, vous qui ne vous gênez même pas de dire que vous avez développé la Guinée qui reste le pays le plus pauvre, sans eau, sans électricité, sans infrastructures, sans industries, sans aliment, sans une bonne éducation, sans les bons soins de santé, qui a les villes les plus sales dont les quartiers conservent les lotissements les plus sauvages du monde ???? Je vous ai dit qu’avec une bonne gestion de l’économie de notre pays immensément riche, l’Etat peut offrir gratuitement le logement, la nourriture, l’éducation et la santé à chaque Guinéen et à chaque résident qui n’est pas capable de s’en procurer, vous ne m’avez pas écouté. Je vous ai dit qu’il est facile d’effectuer de nombreuses réalisations très bénéfiques qui peuvent rapporter à l’Etat beaucoup de milliards d’Euros chaque mois, vous ne m’avez pas écouté, vous n’avez rien su faire alors que vous dites avoir étudié et enseigné à la Sorbonne. Je vous ai dit que vous ne pourrez jamais soulever une aiguille avec un gouvernement d’une centaine de ministres, vous ne m’avez pas écouté, vous nommez n’importe comment, n’importe qui, n’importe où…
Depuis 2010 je vous supplie de ne pas donner raison à vos adversaires qui disaient aux acteurs de la transition, notamment le Général Sékouba Konaté, le Général Nouhou Thiam, Rabiatou Serah Diallo, Kéléfa Sall, Jean-Marie Doré, Tibou Kamara… de ne pas trahir notre pays en vous offrant ce pouvoir, que vous ne le méritez pas, que vous en êtes incapable et incompétent, que vous n’avez aucune expérience de gestion, que même une cabine téléphonique vous n’avez jamais gérée, qu’en France où vous avez vécu, vous n’avez jamais été capable de décrocher le moindre emploi…, vous ne m’avez pas écouté. Je vous ai dit de ne pas laisser les sociétés de téléphonie mobile ruiner les Guinéens avec leur satané prix de pass-internet qui coutent 100 fois plus cher que le wifi dans les autres pays comme la France où le salaire horaire du travailleur le moins payé est supérieur au salaire mensuel d’un fonctionnaire guinéen, exceptés ceux qui ont pris le pays en otage.
Aujourd’hui, M. Alpha Condé, vous avez tellement aggravé la pauvreté en Guinée en 10 ans, que sur 1000 familles, il n’y a pas plus d’une qui soit capable de s’acheter un kilogramme de viande pendant que dans d’autres pays africains, n’importe quel citoyen, même célibataire, peut, à tout moment, découper une vache, mettre la viande dans ses réfrigérateurs et la manger à sa guise. Aujourd’hui, la plupart des Guinéens sont prêts à mourir parce qu’en réalité il n’y a pas de véritable vie dans cette extrême pauvreté causée par vous, vos prédécesseurs, votre incapacité, votre incompétence, votre pauvre esprit d’entreprise…

Je vous ai supplié de ne pas être plus pressé qu’Alassane Ouattara qui voulait lui aussi un 3ème mandat, vous ne m’avez pas écouté, celui-ci vient de renoncer au meilleur moment. La France, les Etats-Unis, l’Allemagne, l’UE, l’UA, la CEDEAO, l’ONU… vous ont dit de transférer le pouvoir de manière démocratique, vous ne les avez pas écoutés. Je vous ai dit que si vous voulez modifier la Constitution, modifiez-la comme vous voulez, mais ne franchissez pas la ligne rouge, laissez de côté les articles verrouillés, comme celui du nombre de mandats, vous ne m’avez pas écouté, votre texte viole les principes fondamentaux de notre Nation. Je vous ai dit qu’il est interdit de modifier la Constitution en sa faveur, vous ne m’avez pas écouté. Je vous ai dit qu’en forçant un 3ème mandat, vous aidez vos ennemis à vous faire perpétrer un bain de sang qui vous traduira au Tribunal pénal international pour crimes contre l’humanité, vous ne m’avez pas écouté.

Je vous ai dit de ne pas donner raison à vos opposants qui ont dit que vous n’êtes pas à même de diriger notre pays, de vous destituer de vos fonctions de président de la république, vous ne m’avez pas écouté, vous provoquez des tensions qui risquent de déclencher une guerre civile qui va détruire notre patrie que vous avez été incapable de construire en 10 ans. Je vous ai dit que vos trop nombreux conseillers qui ne sont jamais en contradiction ni vis-à-vis de vous, ni vis-à-vis d’eux, incapables de vous faire éviter le pire grâce à la perspicacité de leurs analyses ne vous sont d’aucune utilité, vous sont plutôt nuisibles et vous empêchent de faire des actes positifs, vous ne m’avez pas écouté, vous avez nommé des marionnettes qui vous encouragent, vous applaudissent et vous accompagnent n’importe où même à l’abattoir. L’opposition dénombre près de 150 jeunes et enfants abattus par balles tirées à bout portant pendant les différentes répressions des manifestations de vos 9 ans au pouvoir, je vous conseille de ne pas aggraver cette situation au cours de votre dernière année.

Dans toutes les villes du territoire guinéen, à commencer par la Capitale, Conakry, il n’existe pas une seule rue civilisée qui possède des passages de piétons et de cyclistes à chaque côté, de traits blancs et de feux de signalisation au niveau des carrefours, même les rues qui débouchent sur les portails du Palais présidentiel Sékoutouréah n’en ont pas. Toutes les rues de Conakry et des autres villes de l’intérieur sont sauvages, les véhicules et les piétons utilisent la même piste. Ceux-là écrasent ceux-ci comme des fourmis. Vous avez été incapable de corriger en 10 ans ces installations sauvages de vos prédécesseurs parce que vous ne m’avez pas écouté. Mais malgré votre incompétence, si vous n’aviez pas assassiné en vous l’opposant Alpha Condé qui jurait être le Madela de la Guinée, faire un seul mandat, démocratiser notre pays, mettre en place les bases du développement, remettre le pouvoir à la jeunesse et partir à la retraite…, vous auriez pu éviter de laisser aux générations futures une très mauvaise image de vous.

Je vous préviens, M. Alpha Condé. Un jour, le FNDC va organiser une résistance et décider de pénétrer dans la presqu’île de Kaloum. Vous allez déployer un arsenal militaire armé de Kalachnikovs et de fusils automatiques au pont 8 novembre. Ce jour-là, la grande porte vous aura été définitivement fermée et vous quitterez le pouvoir de l’une des deux façons suivantes :
1 – Puisque la seule manière pour les militaires, gendarmes et policiers d’empêcher les manifestants de passer sera d’ouvrir le feu, ils les tuent par centaines ou milliers. Ce jour-là, vous quitterez le pouvoir de la pire des façons.
2 – Les militaires, gendarmes et policiers se rappellent leur engagement à défendre, protéger et préserver leurs concitoyens, refusent de perpétrer un assez naïf bain de sang dans leur propre patrie, rangent leurs armes et laissent les manifestants passer chasser les occupants de tous départements administratifs de l’Etat, à commencer par le Palais présidentiel, Sékoutouréyah. Ce jour-là, vous quitterez le pouvoir de la mauvaise façon.

En 10 ans, je vous ai dit des milliards de choses qu’un bouquin de 1 000 pages ne peut pas contenir, vous ne m’avez jamais écouté, vous avez préféré me mettre en prison, je vous conjure de m’écouter aujourd’hui, renoncer au referendum, renoncer au 3ème mandat, l’annoncer immédiatement avant qu’il ne soit trop tard, bien organiser le scrutin présidentiel qui va élire votre successeur en octobre et terminer votre règne en décembre en beauté, malgré la misère du peuple. Et si vous choisissez encore de m’enfermer ou m’assassiner, sachez que pour moi, mourir aujourd’hui ou mourir dans 70 ans, c’est la même chose, alors je n’ai pas peur.

Pendant mon incarcération à la prison centrale de Conakry, j’avais promis à ma maman adorée et à ma fiancée de ne plus jamais remettre ma vie en danger dans la politique honteuse de la Guinée, mais je suis désolé, je ne peux pas croiser les bras, fermer ma grande gueule, vous regarder détruire notre pays et rester sans réponse le jour où ma fille et/ou mon fils me demanderont ce que j’ai fait pour vous en empêcher.

M. Alpha Condé, renoncez immédiatement au referendum, au 3ème mandat et aux législatives et préparons ensemble le seul et unique scrutin que vous avez encore le temps d’organiser, la présidentielle d’octobre 2020. Ouvrez les yeux et voyez qu’il n’est pas nécessaire d’élire un parlement qui sera dissout en décembre 2020 par votre successeur.

Conakry, le 09 mars 2020
Abdourahamane Bakayoko
Président des DÉMOCRATES GUINÉENS