Les objectifs de l’Alphagouvernance déjà bien pléthoriques se sont enrichis ces temps-ci d’une ambition erratique du Grimpeur, en l’occurrence, laisser loin derrière, dans la course (de vitesse ou de fond ?), pour le développement et le mieux-être, le Sénégal, la Côte d’Ivoire et le Ghana qui caracolent en tête en Afrique de l’Ouest dans les basques du colosse Nigéria. L’expression est dorénavant récurrente dans ses prises de parole publiques. Dubitatifs, les observateurs avisés s’en étonnent et, pour la plupart, rient parfois sous cape. On ne moque pas bruyamment les chefs, notamment en Afrique où ils sont excessivement irascibles, hier et maintenant. Quel sujet osait, sans risques, irriter la susceptibilité de  Lat-Dior Diop, Samory Touré, Béhanzin,… et bien plus tard,  Sékou Touré, Houphouët Boigny, Mobutu, etc. ?

« La Guinée est un scandale géologique », entend on  souvent dire. Le Président franchit un palier. Il croit que notre bled est même un scandale agricole. Tant mieux pour l’épanouissement du populo. A n’en pas douter, c’est fort de ces potentialités que le premier des Guinéens exulte à l’idée que sa Guinée bien aimée va bientôt, par un spectaculaire remondata, perturber l’ordre dans le peloton de tête. Mais ces avantages comparatifs sont-ils suffisants pour atteindre le but visé ? Rien de moins sûr. Il n’est pas nécessaire d’être Samir Amir ou Joseph Stiglitz pour le savoir. Outre l’abondance des ressources naturelles, il est indispensable de disposer de fonds adéquats et surtout d’un capital humain de haute qualité.

On peut trouver l’argent du développement dans ses propres bas de laine, dans les coffres forts des partenaires bi et multilatéraux, sous formes d’aides (dons, prêts concessionnels, legs) et d’emprunts sur les marchés financiers de plus en plus conseillés aux États dans la mesure où les fonds qu’ils génèrent sont moins dispendieusement dilapidés. Les États n’ont pas la même facilité d’accès à ces sources de financement. La lutte contre la corruption, la qualité des élections, le caractère soutenable de la dette souveraine sont des critères d’éligibilité à ces sources.

Le rôle majeur du capital humain dans le processus de création de la richesse dans un pays ne fait l’objet d’aucun doute. Il est porteur des progrès techniques et technologiques reflétés par les innovations qui améliorent régulièrement le bien-être de l’humanité. On peut avoir les ressources minières, agro-pastorales, halieutiques et hydro-électriques à foison et traîner avec un mauvais indice de développement humain, un taux d’indice de pauvreté élevé, des infrastructures socio- économiques dégradées et un cadre de vie non décent.

Le Sénégal, la Côte d’Ivoire, le Ghana et la Guinée ont chacun ses avantages comparatifs. Si la Guinée a ses mines et ses corons, le Sénégal, ses services et sa diaspora, la Côte d’Ivoire et le Ghana sont les champions de l’agriculture (cacao, café, noix de cajou). Depuis plus de soixante ans, la Guinée extrait et exporte de la bauxite. A présent, sa production annuelle est passée de 10 millions à 70 millions. En dépit du dynamisme de son économie minière, la Guinée demeure sous équipée en infrastructures socio-économiques de qualité (transport, électricité, eau, logements sociaux, etc.). Son maillage industriel est sommaire. Sur plusieurs points, les trois pays qu’Alpha Grimpeur veut mettre en compétition avec le sien ont déjà une bonne longueur difficile à rattraper. Les autres ne font pas du surplace. Loin s’en faut.

Abraham Kayoko Doré