Entre le Barreau de Guinée et l’exécutif, les relations deviennent de plus en plus tendues. Les hommes en robe ne cachent plus leur mécontentement face à certaines décisions prises par le mystère de la Justice. La goutte qui a fait déborder le vase, c’est la révocation par le directeur de l’Administration pénitentiaire et de la réinsertion de la semi-liberté d’Abdoulaye Bah. Le Barreau estime qu’il ne revient pas à un responsable d’une prison de décider du sort d’un prisonnier à la place du juge : « Toutes les fois que l’on foule au sol les règles élémentaires et certaines lois constitutionnelles, nous allons faire entendre. L’Administration pénitentiaire qui donne des libertés à des détenus, nous pensons que ce n’est pas du tout normal. C’est pourquoi le Barreau était obligé d’intervenir pour essayer de mettre fin à ces pratiques… Ce n’est pas à l’administration pénitentiaire de faire cela. On ne peut pas admettre qu’elle prenne des actes juridictionnels, dans la mesure où cette fonction est exclusivement réservée aux cours et tribunaux», explique Maitre Zézé Kalivogui, secrétaire gênant adjoint du Barreau.
Mais au sein de la population, il y en a qui estiment que cette sortie du Barreau de Guinée est non seulement tardive, mais aussi motivée par la réincarcération d’Abdoulaye Bah. Faux selon Maitre Kalivogui : « La réaction d’une institution comme le Barreau n‘est pas comparable aux réactions individuelles des avocats. Le Barreau, pour faire une déclaration, il faut une réunion extraordinaire qui doit regrouper les membres du Conseil de l’ordre, et il y a un quorum à atteindre…Il faut que les membres du Conseil prennent la décision ensemble, vérifient que la déclaration ne comporte pas des écueils. Mais, nous avons pris du retard, c’est vrai ».
Le Barreau n’exige ni plus ni moins que le retrait de la décision d’accorder la liberté conditionnelle à Ousmane Gaoual, Abdoulaye Bah et compagnie, mais aussi celle entérinant la révocation de cette liberté pour l’ancien maire de Kindia. Maitre Zézé estime qu’ils n’ont pas été libérés par la bonne personne : « Lorsque la justice refuse de mettre ces personnes en liberté pour des motifs légaux, et que derrière l’exécutif intervienne pour les libérer, il faut certes se réjouir, mais la forme pose problème ». Le retrait de ces décisions entrainerait un retour en prison de ces détenus politiques ? : « Nous, nous avons posé un principe de droit, il revient à ceux-là à qui nous avons adressé notre déclaration d’en tirer toutes les conséquences du droit » répond l’avocat.
Yacine Diallo