Le 13 novembre à Cona-cris, nombreux bacheliers boursiers se sont amassés dans la cour du Palais du peuple. Ils attendaient d’être transportés au Palais Mohamed V, pour rencontrer Laye-M’a-dit Doumbouya, le Prési de la transition. Un communiqué du 12 novembre signé du ministre de l’Enseignement pré-universitaire et de l’Alphabétisation, Guillaume Hawing, avait convié 180 bacheliers admis en 2021, déclarés boursiers pour les études supérieures à l’extérieur du bled. Mais la liste présentée aux lauréats au Palais du peuple et que nous avons consultée, seuls 170 boursiers ont été « admis » par le Royaume chérifien, d’où les plaintes et les indignations des lauréats.

Souleymane Traoré, du lycée Samory Touré de Kankan, Sciences expérimentales, 27è de la République avec 15,14 de moyenne, aurait été écarté à cause de son âge. Il aura 24 ans en décembre, alors que l’âge requis est 23 ans. Mais pour lui, le fait qu’il saute sur la liste des boursiers à la dernière minute, relève de la corruption. «Lorsque je suis arrivé à l’Onabe (Office national des bourses extérieures), un certain Camara m’a montré mon nom sur la liste des boursiers. Mais il m’a dit que je suis recalé à cause de mon âge. J’ai demandé si c’est de la part du Maroc, il m’a répondu qu’il n’a pas d’explication. Un instant après, quelqu’un d’autre m’a indiqué qu’il y a une solution, en me regardant de la tête au pied. Il m’a demandé si je ne connais pas le système, je lui ai répondu non. Ensuite, il m’a demandé  de venir avec mes parents, faisant allusion à l’argent. C’est dommage ! Sur la liste, on constate le 53è et le 70é lauréat. Pourquoi pas moi qui suis arrivé 27è. Je suis injustement piétiné par les autorités», peste Souleymane Traoré.

A l’Onabe, c’est bouche-bée. Mais, l’un de ses agents nous balance : «C’est le Maroc qui décide à qui offrir ou pas ses bourses. Il a ses propres critères. Nous, on ne fera que présenter les listes des bacheliers, c’est le Maroc qui admet».

La mine serrée, le visage sombre, un jeune, gardant l’anonymat, indique qu’il a été substitué sur la liste. Il vient de la commune de Ratoma. Sa moyenne d’examen serait de 13,69, option Sciences sociales. «J’ai durement étudié pour obtenir cette bourse. C’était un rêve ! Sur la première liste que j’ai consultée à l’Onabe, il y avait mon nom, aujourd’hui, je ne vois plus mon nom. Je suis très surpris. Je ne comprends rien. Je suis complètement déçu et désemparé.» Son oncle, qui a aussi requis l’anonymat, de renchérir : «Premièrement, ils ont affiché la liste de 140 boursiers, deuxièmement, il y a eu une autre de 170 boursiers et la dernière liste nous montre 180 boursiers de toutes les options. Mon neveu, c’est l’Onabe qui l’a appelé pour lui dire qu’il est boursier. Après, elle nous dit qu’il a été recalé par le Maroc, alors que dans les précédentes listes figurait son nom. Nous ne comprenons rien. Mon neveu n’a que 18 ans, le critère d’âge ne peut pas prévaloir dans ce cas. Nous souhaitons que l’Etat intervienne le plus rapidement possible». Pour lui, son neveu aurait été remplacé par un autre bachelier. «Il a été privé de son droit par la corruption qui grangère le système éducatif guinéen, notamment l’Office des bourses extérieures,» accuse l’oncle.

Salimatou Diallo avec 14,68 de moyenne d’examen, se retrouve aussi dans le même cas. Elle estime que sa place a été vendue à un «nul» par des corrompus tapis dans l’ombre. «Ce mal, je le vivrai longtemps», lance-t-elle, visiblement triste.

Yaya Doumbouya