Débarqué de Sékhoutouréyah le 5 septembre 2021 à l’aube, Alpha Condé a pu finalement quitter Cona-cris à destination des Émirats Arabes Unis le 17 janvier dernier en quête de soins médicaux. Pour paraphraser le Général de Gaulle, «Je ne vous dirai pas ce que je pense de ce que vous pensez de moi quand j’affirme tout de go que cette aventure ouvre la voie à toutes les incertitudes, à toutes les ambiguïtés, à toutes les contradictions.»

Les Guinéens sont quasi  unanimes pour croire que la CEDEAO a exercé d’énormes pressions sur la junte du colonel Doum-bouillant afin qu’Alpha grimpe dans un coucou privé pour aller effectuer un check-up médical de routine dans des hôpitaux autres que ceux qu’il a laissés à la Guinée. Pourtant, Alpha ne saurait manquer d’amis médecins, à l’image du docteur Mohamed Awada d’Ignace Deen. Préoccupé qu’il est, à garder nos secrets encore plus secrets, surtout quand ceux-ci ont la malchance de concerner des rapports sur, non pas les dernières recherches en urologie, mais sur les eaux empoisonnées qui ont souillé la pestilentielle de 2010. On peut laisser la CEDEAO tranquille, elle est dans son rôle. Celui de sauver le soldat Alpha Condé, champion toutes catégories du trucage électoral dont elle a encore besoin pour le fonctionnement régulier du syndicat de chefs d’État roublards qui la composent. Il est de notoriété publique que dans cette institution, « aucun chef n’organise des élections pour les perdre. » Heureusement qu’Alpha Condé  n’avait  pas fini de breveter ses méthodes multiformes de fraude, de gabegie et d’arrogance. Le soutien de l’institution régionale  n’est pas qu’humanitaire. C’est une nécessité.

Heureusement que les démarches pour obtenir la sortie du Grimpeur auront été discrètes. Sinon, on voit mal des patrons ouest-africains s’unir pour entériner un coup d’État constitutionnel le 22 mars 2020 et condamner le colonel Doum-bouillant le 5 septembre 2021 pour avoir délivré le peuple de Guinée des griffes d’un génocidaire potentiel. Quand on ficelait le colis à Sékhoutouréyah, ils étaient tous dans les bras de Morphée. Ils se souviennent  certainement du coup d’État du 2 mars 2009 à Bissau. Personne n’a exigé quoi que ce soit des putschistes. Les images Nino Virera parlaient d’elles-mêmes. Pour Conakry, il n’est pas raisonnable d’élever le ton.

Alpha parti, il reste le reste. On lui souhaite bonne guérison. Lui qui avait fermé l’aéroport de Cona-cris à des malades qui devaient aller se faire soigner. Les Guinéens ne doivent pas le suivre dans  sa logique. Mahatma Gandhi estime  que  « la politique d’œil  pour œil finira par rendre  le  monde aveugle. »  Ce qui n’empêche pas les Guinéens, inquiets à souhait, de se poser un certain nombre de questions : Alpha reviendra-t-il au bout d’un mois ? Rentrera-t-il au pays pour faire valoir son droit à la retraite, ou faire face à la justice ? Faute d’informations, on peut ne pas partager l’optimisme de la junte. Sûr que l’on a évoqué « le  retour au pays natal.» Mais nombreuses sont les tortues  qui n’y croient guère. Le Professeur n’a-t-il pas enseigné que « plus le mensonge est gros, plus les Guinéens y croient ? Les quelque dix ans de règne sans partage que le pays vient de subir  le prouvent à suffisance. Alors, attendons de voir. On s’y est habitués, non ?

Diallo Souleymane