Il est fréquent de constater lors de certains évènements publics, des Guinéens jouer avec le drapeau national. Une erreur à corriger et très rapidement, selon le Pr Maladho Siddy Baldé, de l’Université Général Lansana Conté de Sonfonia. Bon appétit !

Beaucoup de Guinéens et des Guinéennes connaissent leur drapeau depuis leur bas-âge. Ils savent l’identifier aisément à travers les trois couleurs qui le composent, à savoir le rouge, le jaune et le vert. Mais pas tous, peut-être, qui savent ce qu’il représente dans son ensemble et ce qu’il représente dans chacune de ses couleurs. Un rappel historique nous paraît être nécessaire pour informer ceux et celles qui ne le savent pas ou pour rafraîchir la mémoire de  ceux et celles qui auraient déjà perdu certains détails importants sur sa conception, sur sa signification, sur ce qu’il symbolise et sur le respect qu’il mérite de nous, aussi bien dans notre vie publique que dans notre vie privée.

Le drapeau guinéen, rappelons-nous, fut conçu pour représenter et demeurer comme un des symboles forts de  notre République. Il devint, dès l’aube du 10 Novembre 1958, le pavillon de la nation guinéenne, c’est-à-dire la plus belle expression de notre indépendance politique et de notre souveraineté nationale chèrement acquises le 2 Octobre de la même année. Il exprime donc tout à la fois la maturité politique de notre peuple, les potentialités de son génie créateur et toutes les autres valeurs cardinales et durables qui lui sont propres, qui le caractérisent et qui le distinguent au sein des nations du monde.

C’est pour autant dire que le drapeau guinéen ne fut donc pas conçu à la hâte, au hasard des circonstances.  Bien au contraire, il fut conçu pour représenter pleinement un peuple majeur et fier au sein de la communauté internationale. Il fut, à cet effet, composé de trois couleurs toutes vives qui se complètent sans se confondre.

Chacune de ces belles couleurs est en soit un symbole de la nature authentique et particulière de la Guinée dans ce qu’elle recèle et offre sur tous les plans de son existence, depuis sa belle nature jusqu’aux multiples et variés  combats qu’elle a tant menés et tant gagnées. Tout cela est donc beauà voir, réel et agréable à sentir, solide à conserver et à perpétuer à travers les âges et les  générations.

Dans sa couleur limpide et inaltérable, le Rouge nous rappelle et nous renvoie au sang versé de nos devanciers, les martyrs, qui ont tout donné de leur vie pour marquer leur existence de patriotes, pour nous assurer une vie de liberté, pour nous montrer la voie à suivre pour construire à jamais un avenir sain et durable.

Dans sa couleur limpide et inaltérable, le Jaune nous rappelle et nous renvoie à l’immense trésor du sol et du sous-sol de notre pays comme l’or ancestral du Bouré et du Bambouk ou d’ailleurs notamment à Dinguiraye, à Mandiana et à Kounsitel de nos jours ; la bauxite sur les côtes guinéennes ou les bowé du Fuuta Jallon ; le diamant du Konia, du Kania ou du Moria ; le fer à n’en pas finir de la sylvestre guinéenne ou l’uranium de notre lointain Sangalan, là-bas sur les rives du majestueux  fleuve Gambie, pour ne citer que ceux-là.

Dans sa couleur limpide et inaltérable, le Vert nous rappelle et nous renvoie à la luxuriante végétation guinéenne, celle qui ne cesse de résister aux aléas de la nature et à ceux des êtres vivants ; elle est la couleur de notre maison commune.

Le drapeau guinéen ne doit donc être ni banalisé, ni confondu à un autre drapeau et ce, pour quelque raison que cela puisse être. On doit toujours se rappeler qu’il est disposé de la gauche vers la droite (ce qui le différencie de celui de la République du Mali qui va de la droite vers la gauche) ; la partie jaune qui est milieu est intimement soudée au rouge vers la gauche et au vert à droite et ce, sans aucune distinction de séparation de l’un ou de l’autre. Nul n’a le droit d’en disposer autrement ou d’en utiliser à des fins banales.

Cependant, depuis un certain moment, nous assistons à des constats on ne peut plus amers, qu’il faut souligner avec force et détermination, sans vouloir pointer le doigt sur personne.  Plutôt j’en appelle à l’attention et à la conscience du public guinéen pour corriger les erreurs du présent et pour éviter d’autres à l’avenir.

Par exemple, des frontons de certains bâtiments publics (pas des moindres de notre histoire) disposent des trois couleurs de notre drapeau national, gravées au pinceau. Seulement la partie rouge n’est pas directement soudée à la couleur jaune, non plus le jaune au vert. Au contraire, chacune d’elle est partiellement séparée par une bande noire dont l’existence ne peut se justifier par aucun des textes légaux de notre pays. Jusque-là, nous en avons trouvé la justification nulle part, ni au niveau des sources orales, ni au niveau de la littérature existant en la matière. J’espère que le constitutionnaliste de notre République ou le défenseur de notre Etat de droit n’en dira autre. Espérons pour le meilleur, sans trop attendre !

Aussi, il est très fréquent de voir certains de nos officiels porter notre cocarde tricolore de droite vers la gauche (comme les Maliens le feraient légalement chez eux avec la leur) ; le constat à ce niveau est tout à la fois surprenant et amer à consommer. Ils sont les représentants de notre pays, qui de la République, de l’Etat et de la Nation, qui du peuple dans sa majorité. A ce niveau, il y a toute une éducation citoyenne à faire. Peut-être l’espoir est permis  qu’elle se fera à temps.

Enfin, il est courant de constater lors de certains évènements publics (surtout lors des réceptions officielles ou des compétitions sportives), bien des Guinéens jouer avec le drapeau national.  Il y en a qui vont jusqu’à le barbouiller de dessins, de croquis ou d’écritures. Il y en a qui le jettent sans aucune attention après usage ou en pleine déception de l’évènement. C’est, sans nul doute, une erreur qu’il faut corriger et très rapidement.

Au moment où nous nous investissons énormément dans des débats de réconciliation nationale entre nous Guinéens et Guinéennes, il serait recommandable de nous réconcilier aussi avec nos repères identitaires, surtout ceux qui symbolisent notre souveraineté nationale face aux autres nations du monde. Il y va de l’intérêt et de l’honneur de chacun et de chacune de nous.

Par Pr Maladho Siddy Baldé,

Université de Sonfonia – Conakry