La bande de sable et d’escarpements montagneux qui rappel l’Afghanistan et qui s’étend de la Mauritanie au Tchad, en traversant le Mali et le Niger, est secouée par des troubles et une instabilité institutionnelle provoquées par des groupes armés d’obédiences diverses. Les premières perturbations sociopolitiques d’envergure naissent au lendemain de l’indépendance, de revendications nationalistes qui exigent une meilleure répartition des maigres fruits de la croissance. S’agissant du Mali, on peut citer par exemple, le cas des populations de l’Azawad qui réclament de l’Etat central Malien une large autonomie leur permettant de s’impliquer davantage dans la problématique du développement de leur région. Les atermoiments des autorités maliennes face à cette revendication accroissent les récriminations et les frustrations qui deviennent le substrat d’une défiance qui perdure.
À ces velléités nationalistes, s’ajoutent plus tard et progressivement d’autres dynamiques négatives que le renversement et la mort du colonel Kaddafi, le messie de la Libye, vont exacerber.
En effet, l’immensité et la faible humanisation de cette vaste zone ainsi que son relief montagneux et l’hostilité de l’environnement naturel vont en faire un milieu attractif pour djihadistes en mal de djihad, trafiquants tous acabits et terroristes d’autres sources.
Face à ce cocktail explosif l’Etat malien est assez rapidement débordé ainsi en 2013, ces groupes puissamment armés, aguerris en Afghanistan, en Syrie, en Irak, au Liban et ailleurs envahissent le nord et le centre du Mali dont ils conquièrent les principales villes (Tombouctou, Mopti, Gao, Kidal). Ils s’y installent confortablement et y règnent en maitres. Ils appliquent la chariat, soumettent les femmes. Ils détruisent des mausolées et des reliques séculaires.
Le gouvernement malien en appelle alors à l’amitié de la France dont l’armée enraye l‘avancée des djihadistes et libère les agglomérations occupées, mais ne parvient pas à débarrasser le pays de la horde des djihadistes et consorts. Ce qui crée chez les Maliens une profonde frustration qui s’accroit et se cristallise, au fil des mois et des années, en haine contre la France. Les relations diplomatiques, voire économiques entre la France et le Mali se détériorent et tout cela débouche sur le départ des troupes françaises du Mali. Elles sont aussitôt remplacées par les mercenaires de Wagner. À l’amitié franco-malienne succède l’amitié russo-malienne. Et voilà la boucle bouclée. La Russie et Wagner, avec moins d’équipements performants et d’hommes moins entraînés et moins disciplinés peuvent ils réussir là où l’armée française a échoué ? il n’y a rien de moins sûr.
Les mercenaires de Wagner sont arrivés au Mali précédé d’une réputation sulfureuse de massacreurs de populations civiles et de prédateurs de ressources naturelles. Ils ont, disent leurs détracteurs, expérimenté ces vilaines pratiques en République Centrafricaine. Hélas ! Les populations maliennes les perçoivent, à leur arrivée, comme des sauveurs, les applaudissent, les adoubent et les célèbrent. Les autorités de la Transition les encensent et vantent leur bravoure, leur efficacité. Ils réussissent effectivement quelques coups d’éclats. Mais très vite, les observateurs avisés découvrent qu’ils préfèrent plutôt s’attaquer aux populations civiles qu’ils opposent les uns aux autres que de combattre les djihadistes. Ils ont été souvent dénoncés par les chefs religieux de ces communautés.
Depuis qu’ils sont sur le terrain, ils ont contribué, à n’en pas douter, à élargir le fossé entre les ethnies du nord. Leur efficacité à réduire l’insécurité, à travers des coups notables portés contre les djihadistes et autres terroristes notoires, n’est pas prouvée, avérée. Ce qu’on observe est que les djihadistes ont plutôt repris du poids de la bête, ont revigoré leurs activités de démolition de l’Etat malien, de division de la nation malienne. La France est partie, vivement la Fédération de Russie et ses mercenaires de Wagner sur lesquels le gouvernement de la Transition et une bonne partie des Maliens comptent pour vaincre le djihadisme au sahel et par conséquent l’insécurité, afin de restaurer l’autorité de l’Etat et éviter que le Mali ne périsse pas.
Abraham Kayoko Doré