Le classement 2022 de Transparency International sur l’Indice de Perception de la Corruption (IPC) dans le monde est disponible depuis le 31 janvier 2023. Créé en 1995 par le mouvement Transparency International, l’IPC est utilisé pour mesurer les perceptions de la corruption dans les administrations publiques et la classe politique de 180 pays et territoires du monde. Cet indice est constitué à partir de 13 évaluations d’experts et enquêtes indépendantes proposant chacune ses propres critères. Il est élaboré à l’aide d’enquêtes réalisées auprès d’hommes d’affaires, d’analystes de risques et d’universitaires résidant dans ces pays ou à l’étranger.

L’IPC classe 180 pays et territoires sur une échelle qui va de zéro (0 = forte corruption) à cent (100 = aucune corruption), en fonction du degré de perception de la corruption dans le secteur public. Le score régional moyen de l’Afrique subsaharienne dans l’Indice de perception de la corruption (IPC) reste le plus bas du monde, perdant même un point cette année pour atteindre 32 points sur 100 et marquant ainsi une autre année de stagnation. Sur les 49 pays évalués en Afrique, 44 obtiennent encore un score inférieur à 50. Les progrès réalisés par quelques pays sont occultés par les baisses de scores notables observées dans d’autres. Les Seychelles (70) arrivent en tête de la région, et suivent, mais assez loin derrière, le Cap-Vert et le Botswana avec 60 points.

La Guinée, classée 147ème sur 180 pays évalués à travers le monde, s’est stagnée avec ses 25 points obtenus en 2021. Un score qui n’honore pas le pays quand on observe les classements des autres pays de l’Afrique de l’Ouest tel que le Cap vert qui occupe la 35 place sur 180 avec un score honorable de 60 points. Le Nigéria avec 24 points et la Guinée-Bissau avec 21 points ont consenti moins d’efforts dans le cadre la lutte contre la corruption dans la zone CEDEAO.

Peut-on s’interroger sur le classement de la Guinée qui, malgré certaines initiatives allant dans le sens de la moralisation de la chose publique depuis l’arrivée des militaires au pouvoir en septembre 2021 ? La raison pourrait être liée à des facteurs politiques, économiques et structurels.

– Sur le plan politique, la Guinée est dans un régime exceptionnel dont le retour à l’ordre constitutionnel est incertain.

– Sur le plan de la gouvernance économique, les initiatives certes existent, mais les réformes institutionnelles ne sont que superficielles. Bon nombre des dossiers de la grande corruption restent sans suite, même si certains accusés sont incarcérés. La petite corruption à tous les niveaux par les agents de l’État (agents de sécurité, de santé, du système éducatif…) est une pratique courante malgré la détermination des structures en charges de contrôle et de lutte contre la corruption. Un autre facteur non négligeable qui aurait impacté négativement le classement de la Guinée est la non déclaration de biens et de patrimoine des membres du CNRD, des hauts responsables de l’Etat et des régies financières à leur entrée en fonction ;

 Sur le plan structurel, on note l’insuffisance des moyens humains, techniques et financiers au niveau des structures d’inspection et de contrôle de l’Etat. A tous ces manquements, s’ajoute une difficulté de coordination entre les différents acteurs chargés de la moralisation et de la rectification institutionnelle.

Pour améliorer le classement de la Guinée dans l’IPC, l’AGT recommande :

  •  Au gouvernement : d’œuvrer pour une visibilité plus accrue de la conduite de la transition pour faciliter le retour à l’ordre constitutionnel ;diligenter le procès des personnes accusées pour corruption et détournement des deniers publics ; renforcer les organes de surveillance pour lutter contre la corruption à tous les niveaux ;faire de la déclaration de biens et de patrimoine des membres du CNRD, des hauts responsables de l’Etat et des régies financières une priorité ;renforcer les capacités techniques et humaines des organes de contrôle.

Aux organisations de la Société et de médias de : jouer leurs rôles d’alerte, de veille, d’interpellation et de contrôle citoyen afin que la redevabilité soit une valeur ajoutée de la part des décideurs ; promouvoir le renforcement organisationnel et le réseautage des acteurs travaillant dans le secteur de la gouvernance pour une mutualisation des efforts ; faire du journalisme d’investigation un métier pour surveiller et dénoncer la corruption à tous les niveaux.

 Aux partenaires techniques et financiers : d’œuvrer pour le renforcement des capacités d’intervention de l’Etat, de la société civile et des médias engagés pour la promotion de la bonne gouvernance. Combattons la corruption, car ne rien faine c’est laisser faire !

Oumar Kanah Diallo