Dans un contexte de mondialisation, largement influencé par l’opinion publique, les réseaux sociaux sont incontournables. Les dirigeants, qu’ils soient élus ou putschistes, ne peuvent ignorer le point de vue de la toile. C’est autant dire qu’au moment où les autorités guinéennes ont mis à prix la tête d’un fugitif, elles lorgnent forcément sur les réseaux sociaux dans l’espoir de trouver le moindre indice devant permettre de retrouver l’homme le plus recherché du pays.
Seulement voilà, les internautes guinéens sont à l’image de leurs dirigeants. Lesquels ont fait preuve de laxisme et d’amateurisme qui ont permis à un homme potentiellement dangereux d’être en cavale. D’un côté les dirigeants sont dans la réaction, au lieu d’être dans l’anticipation et l’action. De l’autre, les dirigés versent dans l’émotion. Un certain nombre de faits corroborent avec cette réalité. Avec en toile de fond un ministre de la Justice qui envisageait l’organisation d’un tournoi de football dans une prison où sont détenus des hommes accusés d’avoir commis les crimes les plus odieux. Lequel ministre se livre à des frasques comme « quand je ne suis pas là, on pagaille ». Comme si sa présence est indispensable pour la paix et la tranquillité dans la Cité.
De leur côté, des citoyens, dans une logique de défiance vis-à-vis des autorités, trouvent un nouvel héros. Comme ils l’avaient fait pour Toumba après la première comparution de celui-ci, Claude Pivi trouve de la sympathie chez des internautes. D’autres ironisent sur un sujet d’une extrême gravité : sa fuite. Alors que cette fuite devait inquiéter tout le monde, pour trois raisons au moins : Premièrement, le fuyard est un officier de l’armée guinéenne aguerri. Spécialiste en arts martiaux, usant et abusant de la magie. Deuxièmement, il se retrouve dans la nature avec des hommes formés et abandonnés eux aussi dans cette même nature : ce sont les recrues de Kaléyah. Il y a donc un chef militaire, qui pourrait trouver une troupe et une troupe qui retrouverait un chef. L’un sans l’autre est moins nuisible. Mais les deux réunis constituent un danger potentiel.
Troisièmement, il y a des victimes de la tragédie du 28 septembre 2009 qui attendent que justice soit rendue. Si jamais Pivi disparaît, au propre comme au figuré, il ne rendra pas compte de ses actes. En outre, si les témoins ne savent pas s’il est mort ou vif, ils réfléchiront deux fois avant de livrer leur part de vérité dans le procès en cours.
Autres conséquences de la situation qui prévaut en Guinée depuis le 4 novembre dernier, si jamais le fugitif n’est pas retrouvé, les autorités seront toujours frileuses. Une situation qui risque d’apporter de l’eau au moulin de ceux qui souhaitent une transition à durée indéterminée. Surtout si Pivi se retranche dans une zone donnée et menace la sécurité nationale. En ce moment, le retour à l’ordre constitutionnel sera tout simplement renvoyé aux calendes grecques, au grand dam des pro-démocratie.
Voilà autant des raisons pour lesquelles seuls les partisans d’une transition sans fin trouveront leurs comptes. Du moins, provisoirement, car la paix et la sécurité du pays n’ont pas de prix. D’où la nécessité pour chacun et pour tous de tout mettre en œuvre, afin que l’homme dont la tête est mise à prix, soit retrouvé. Moyennant non pas de l’argent, mais de l’amour pour la Patrie.
Habib Yembering Diallo