Le procès du massacre du 28 septembre 2009 devait rouvrir ce lundi 27 novembre, après une semaine d’interruption. Il a été renvoyé au mardi 28 novembre. Pour cause de débrayage des avocats de la défense qui dénoncent le non accès à leurs clients à la Maison centrale de Conakry. 

A peine le procès ouvert, le Maître Almamy Samory Traoré, avocat de la défense mandaté par ses confrères, a pris la parole pour annoncer la suspension de leur participation. Il a rappelé que depuis l’audience passée, les avocats ont fait part des difficultés auxquelles ils sont confrontés pour rencontrer leurs clients à la Maison centrale de Conakry, fortement sécurisée après l’exfiltration de quatre détenus par un commando armé le 4 novembre. « Depuis cette date, nous n’avons pas accès à nos clients à la maison d’arrêt. Vous vous souvenez, monsieur le président, que certains accusés étaient placés en détention provisoire, d’autres se sont constitués prisonniers à l’ouverture de cette procédure. Et le seul endroit pour nous avocats de rencontrer nos clients pour discuter avec eux dans le cadre de la préparation de leur défense, c’est la maison d’arrêt. Ils sont privés de leur liberté, certains par décision de justice, d’autres par leur propre fait. A partir de ce moment-là, ils ne sont plus libres de leur mouvement. Et nous les conseillons, parce que notre présence dans cette procédure est obligatoire. Les acteurs que nous sommes, si nous devons participer à cette procédure (il ne s’agit pas d’une participation passive), la participation doit être active. Nous avons entamé une phase de l’audition des témoins qui est une phase cruciale dans le procès criminel. Si nous avons décidé de les défendre, nous avons leur liberté, leur vie. Ce n’est pas nous qui les détenons en réalité, mais nous sommes garant. Nous devons faire en sorte que ce procès, que les déclarations qui vont être faites à cette barre, que les droits soient respectés. C’est pour cela que le collectif des avocats de la défense m’a mandaté auprès de vous, pour faire passer le message qui est celui de vous notifier la décision de suspendre notre participation à ce procès, jusqu’à ce que les droits les plus élémentaires de nos clients soient respectés, jusqu’à ce que l’entrave à l’exercice de la profession d’avocats soit levée ». 

Après avoir dit qu’il a suivi avec attention l’inquiétude des avocats de la défense, le procureur Algassimou Diallo a indiqué qu’il était surpris de cette décision des avocats. Parce qu’elle n’a pas été notifiée de manière formelle à l’attention de la juridiction de jugement. « Nul n’ignore que la nuit du 4 novembre, il y a eu un évènement inédit à la Maison centrale qui a conduit à l’exfiltration de quatre accusés de ce procès. Pouvions-nous rester avec le statuquo pour ne pas prendre des dispositions, pour ne pas que cela arrive à nouveau ? Des dispositions sécuritaires ont été prises à la Maison centrale. A l’occasion d’une audience, les avocats ont effleuré cette question pour dire qu’ils rencontrent des difficultés pour avoir accès à leurs clients. Il ne vous avait pas été dit qu’ils ne rencontraient pas leurs clients. Ce n’est qu’hier, par un communiqué non signé, par voie de presse, que la plupart d’entre nous ont appris que les avocats entendent boycotter l’audience, jusqu’à ce qu’ils aient accès à leurs clients. On aurait dû saisir votre tribunal pour soulever cette inquiétude, pour vous dire franchement qu’ils ne rencontraient pas leurs clients. A présent que c’est porté à votre connaissance, monsieur le président, nous, côté parquet, nous nous emploierons à ce que les avocats, et la défense étant sacrée pour les accusés, aient accès à leurs clients ». 

Côté partie civile, Maître Bernard Saa Dissi Millimouno est d’accord avec la décision de ses confrères de la défense. Son confrère, Maître Hamidou Barry, lui, ne l’est pas, arguant que la défense a manqué de déontologie. Sinon, ils devaient écrire formellement à toutes les parties pour les informer de leur problème.  « C’est un manque de courtoisie, nous ne sommes pas censés être informés aujourd’hui. La moindre des choses, ils devraient nous informer par un courrier. C’est une violation des règles déontologiques élémentaires. »

Ibn Adama