Après l’incendie d’une partie du marché d’Enco 5 le 2 juin, la question du rôle de la Protection civile se pose avec acuité. Administration du marché, victimes et jeunes secouristes se rejettent la responsabilité.

Les victimes du brasier sont encore sous le choc. Bien d’entre elles, absentes des lieux au moment des faits, ont encore du mal à réaliser ce qui leur arrive. Selon ces vendeurs, ce sont des années de dur labeur et des centaines de millions de francs guinéens qui sont partis en fumée la nuit du 2 juin, en quelques minutes.

Ces sinistrés sont non seulement convaincus que l’incendie est provoqué par le courant électrique (court-circuit), mais ils sont surtout remontés contre la Protection civile : « Imaginez combien de fois c’est difficile de faire face à un tel feu avec des sceaux d’eau. On a appelé les sapeurs-pompiers de Matoto plusieurs fois, nous n’avons pas eu de répondant », explique David Sylla, vendeur de produits cosmétiques.

Pourtant, Ismaël Diakité, administrateur du marché d’Enco 5, accuse un groupe de jeunes d’avoir empêché les sapeurs-pompiers de porter secours : « J’ai informé la mairie et le gouvernorat de la ville de Conakry. Des dispositions ont été prises pour éteindre l’incendie. Mais des jeunes loubards qui voulaient profiter de l’incendie pour voler ont jeté des cailloux sur les secouristes, ces derniers ont rebroussé chemin. Si on laissait les sapeurs-pompiers faire leur travail, l’incendie n’aurait pas eu une telle ampleur.»

Faux, selon David Sylla : « Si les sapeurs-pompiers étaient venus à temps, il n’y aurait pas eu toute cette tragédie. Ils n’ont aucune excuse. Même la CMIS d’à côté était fermée ».

En réalité, la protection civile n’a pas tenté de porter assistance aux victimes. Ses agents ne se sont même pas déplacés sur les lieux. C’est une société de sécurité du privé qui y a dépêché un de ses camions de secours. Les responsables de la société, vu l’hostilité des jeunes, ont cherché à obtenir une garantie ou du moins de la sécurité pour leur engin, avant de se déployer. Les jeunes, frustrés par le retard pris avant l’intervention, s’y sont opposés. Des victimes ont tenté de ramener ces jeunes mécontents à la raison. En vain ! Le commandant de la Compagnie mobile d’intervention et de sécurité d’Enco5 a beau parlé, il n’a pas obtenu gain de cause. Les jeunes ont fini par chasser les secouristes.

Même cette société privée n’a pas été si prompte que l’administrateur du marché l’insinue. Le camion de secours n’est arrivé sur les lieux qu’une trentaine de minutes après les premières flammes. Le feu avait déjà consumé plus de la moitié de la dizaine de conteneurs. Ismaël Diakité, l’administrateur du marché lui-même, avoue qu’il est allé sur les lieux en retard.

Yacine Diallo