Choqués par la situation des acteurs politiques et de la société civile qui croupissent en prison depuis des mois, de nombreux citoyens en viennent à se poser la question de savoir si « les Guinéens méritent vraiment qu’on se batte pour eux. » Ils dénoncent ce qu’ils appellent l’inertie ou l’indifférence des Guinéens face à la détérioration de la situation des droits de l’homme dans le pays et le virage de plus en plus autoritaire que prend le régime en place.
Mais cette critique s’avère un peu excessive quand on prend en considération les mouvements de contestations et de protestations de 2006, 2007, 2009 et depuis 2010. Les Guinéens ne sont jamais restés bras croisés quand il a été question de défendre leurs droits. Qui ne se souvient pas en effet des gigantesques manifestations du FNDC à Conakry et dans certaines villes de l’intérieur du pays ? Même ceux qui brocardent aujourd’hui cette plate-forme citoyenne avaient la trouille pendant ces moments.
Mais la répression violente des manifestations, le sentiment que les tueurs de manifestants sont protégés, l’instrumentalisation très marquée de la justice, l’intoxication, la désinformation et la manipulation, l’achat des consciences, la présentation caricaturale d’un combat citoyen comme celui d’une communauté contre une autre ont fini par freiner l’élan des citoyens engagés. Mais est-ce la fin de toute idée de contestation ? Les Guinéens sont-ils condamnés à perpétuité à subir l’injustice dans le silence et la résignation ? L’avenir nous le dira.
Me Mohamed Traoré,
ancien Bâtonnier de l’Ordre des Avocats