Les Conseils (de ministres et interministériels) se suivent mais ne se ressemblent pas. S’ils sont généralement soumis à un format et une chronologie rituels, ils y dérogent par moments en cas de forces spéciales. Celui du mardi 16 septembre a abasourdi les familiers et les visiteurs qui arpentent  les couloirs des Palais Mohammed V et de la Colombe en trébuchant les uns sur les autres.

Le Conseil fini, les ministres se précipitent  vers leurs bureaux  lorsqu’ils ont été sommés de rebrousser chemin dare-dare. Le Conseil n’est pas clos. Un point improvisé de l’ordre devrait être absolument débattu sous la présidence du Colonel soi-même. C’est dire que le point vaut son pesant d’or !  Comme dans le bled, rares sont ceux qui ont la  langue dans la poche, on a tôt su les raisons de la prolongation impromptue et inopiné du Conseil. Extrêmement préoccupé, sans doute, par la situation d’apnée du dialogue socio-politique, le Président du CNRD voulait prier ses ministres de contribuer par leur sage cogitation lumineuse à démêler l’écheveau du processus. Son adresse a été simple, concis. Aider le CNRD à ramener les sceptiques, notamment l’UFDG, le RPG, l’UFR, le  FNDC, etc. , à la table de discussions.

Le Président de la Transition donne ainsi raison à Siaka Barry, président du MPDG, qui avait interpellé le Premier Ministre Béant, dès les premiers hics du dialogue guinéo-guinéen, d’aller chercher sur l’autre berge de la rivière, les compatriotes incrédules afin que le cénacle soit inclusif. Dans ce genre de chose, il faut savoir raison garder et se souvenir que « rien ne sert  de courir, il faut partir à point ». Si l’on convient que le principe sacro-saint du dialogue est l’inclusivité, on devrait user de toutes les stratégies pertinentes, y compris les stratagèmes, pour persuader une masse critique d’acteurs majeurs de prendre activement part au débat national qui vise à promouvoir et à consolider la cohésion sociale, l’unité nationale et la paix sans lesquelles le développement et le bonheur des populations demeurent une espérance; voire une utopie. Cette démarche de persuasion doit s’arc-bouter sur l’évidence d’un pacte national dont la justice et la quête de l’intérêt général doivent être la boussole de ses orientations.

On est sorti des assises nationales avec la litanie des griefs et des pistes de solutions mais ne continue-t-on pas  d’entretenir le terreau de la méfiance et de la défiance, porteuses de frustrations. Si la Petite Cellule de l’UFDG et le Sid de l’UFR qui avaient pourtant applaudi et adoubé le CNRD et son Président, s’obstinent à ne pas rentrer au bercail, c’est parce qu’à leurs yeux rien n’illustre que la justice est devenue la boussole de tout ce qui se fait en Guinée. La justice- boussole s’est-elle déjà usée sur les vicissitudes du pays? Le Président-soldat Doum-bouillant, en bon stratège, a-t-il compris que la problématique du dialogue est  la pire  menace qui guette la conduite efficace et efficiente de la Transition et qu’il ait décidé, au grand dam des faucons de son entourage, d’être plus patient, persévérant et persuasif afin d’emporter l’adhésion des uns et des autres ?

Abraham K. Doré