Entre 2022 et 2025, la Guinée a été le théâtre de graves violations de droits humains, note un rapport publié par la coalition Tournons La Page (TLP-Guinée). Le document de 42 pages (documents annexes compris) s’intitule « Libertés publiques : Chasse à l’homme en Guinée. »

L’organisation pointe une série de violations de droits humains commises sous le régime militaire dirigé par le général Mamadi Doumbouya, entre 2022 et 2025 : exécutions extrajudiciaires, disparitions forcées, tortures et arrestations arbitraires, ciblant principalement des acteurs socio-politiques. TLP-Guinée accuse les forces de défense et de sécurité d’avoir tué au moins 70 personnes pendant cette période. « Nous avons rencontré les familles ou proches de ces victimes, recueillant leurs témoignages sur les circonstances des décès, les réactions des autorités guinéennes, ainsi que leurs attentes vis-à-vis du gouvernement et de la communauté internationale », précise le rapport.

Manifestations réprimées

La coalition souligne que le climat de peur qui règne en Guinée n’a pas encouragé les témoignages : « Seules 11 familles ont témoigné publiquement, certaines sous anonymat. D’autres ont choisi de se taire par crainte de représailles dans un climat tendu, marqué par des enlèvements arbitraires, des tortures, des traitements inhumains et des disparitions forcées utilisés par les autorités militaires pour faire taire les voix dissidentes. »

L’organisation revient aussi sur les manifestations de rue organisées par le Front national pour la défense de la Constitution (FNDC), pour un retour rapide à l’ordre constitutionnel, mais réprimées par les forces de sécurité : « Nous avons recensé neuf jeunes tués par balles les 28 et 29 juillet, ainsi que le 17 août 2022. Certains d’entre eux tués à la veille même des manifestations, souvent sans lien avec les rassemblements organisés par la société civile guinéenne. »

Liberté de la presse menacée

Le document souligne, par ailleurs, une autre situation non moins préoccupante visant des journalistes indépendants. « Plusieurs professionnels des médias ont été ciblés par des menaces, intimidations, convocations et arrestations arbitraires. Parmi les cibles figurent Sékou Jamal Pendessa de Gangan TV, Mamoudou Babila Keita d’Inquisiteur.net, Abdoul Latif Diallo de Depecheguinee.com et plusieurs autres figures du journalisme guinéen », indique TLP-Guinée, en s’appuyant sur une déclaration du Syndicat des professionnels de la presse de Guinée (SPPG) : « Conakry reste l’épicentre de ces violations, avec 67 cas sur 70, soit près de 96 % des atteintes recensées au niveau national. » Selon la coalition, la situation de la liberté de la presse reflète une volonté de réduire au silence toute forme de contestation publique ou de rapport indépendant sur la gestion de la transition.

Appel à l’action

Le rapport épingle des enlèvements et des disparitions forcées ciblant particulièrement les opposants au régime : « Ces pratiques sont utilisées comme des instruments de répression politique, dans le but de faire taire les critiques et d’intimider la population. »

L’organisation déplore également que la justice ne soit pas la même pour tout le monde : « La justice semble aujourd’hui au service du règlement de comptes politiques, ce qui sape la confiance des citoyens dans l’État de droit ».

Face à cette situation peu reluisante, TLP-Guinée conclut en tirant sur la sonnette d’alarme : « Ces violations compromettent sérieusement l’ancrage démocratique et la stabilité politique du pays. Il est donc crucial que les défenseurs des droits humains et de la démocratie restent vigilants et mobilisés, afin de pousser le gouvernement guinéen à adopter des mesures concrètes pour protéger les droits des citoyens, des défenseurs des droits humains et garantir la démocratie. »

Mariama Dalanda Bah