Le double scrutin de ce dimanche 22 mars 2020 a provoqué des tensions dans de nombreux quartiers de la ville de Nzérékoré. De violents affrontements ont opposé forces de l’ordre et citoyens dans la commune urbaine. Cette fois-ci, des affrontements à caractère ethnique qui répand la psychose dans la capitale de la Guinée Forestière où la cohésion sociale, déjà fragile, risque de prendre encore un coup, et mettre sur la voie d’un avenir incertain.

Si le scrutin a pu se dérouler dans certaines localités, plusieurs autres ne s’en sont pas tirées à bon compte. C’est le cas, notamment, des sous-préfectures de Palé, à 55 km du centre-ville, où le matériel électoral a été incendié la veille du scrutin. Le sous-préfet avait pris la poudre d’escampette dès qu’il a vu la tension monter. A Kobéla, la même situation s’est reproduite quasiment au même moment. A Ouro et à Gallaye, dans la préfecture de Yomou, les kits ont été dévorés par les flammes sous le regard sévère des citoyens en colère.

Dans la commune urbaine de Nzérékoré, à Boma notamment, la foule s’en est violemment prise aux kits électoraux qui avaient déjà du mal à se faire installer. Aucun vote n’a pu y avoir lieu. Les forces de l’ordre ont fait usage de gaz lacrymogènes pour disperser les jeunes regroupés au bord de la route. A l’Université située dans le quartier de Nakoyakpala, de violents incidents se sont également produits. Des jeunes opposants ont pris à partie les membres des bureaux de vote et ont incendié les kits électoraux. Deux véhicules et deux motos ont fait les frais de la colère des manifestants. Pendant un bon moment de la journée, des affrontements ont opposé les forces de l’ordre aux jeunes qui avaient érigé des barrages.

Au quartier Bellevue, plusieurs maisons ont été réduites en cendres, suite à des affrontements à connotation ethnique. Selon nos informations, au moins six personnes ont été blessées et transportées d’urgence à l’hôpital régional de Nzérékoré. Quatre autres auraient trouvé la mort selon une source sécuritaire qui a préféré garder l’anonymat.

Au quartier Dorota, le siège de l’église protestante évangélique a été incendié dans la soirée du dimanche 22 mars. La même église avait été incendiée au cours des évènements malheureux survenus en 2013. Nous apprenons par la même occasion que d’autres églises et mosquées ont subi le même sort dans la journée du lundi 23 mars.

Dans la matinée, les jeunes avaient érigé des barrages dans la quasi-totalité de la ville, à Bellevue, Dorota, Managbolè, Tilepoulou, Wessoua, Horoya, Nakoyakpala,.. Excusez du peu ! Entre Wessoua et Tilépoulou, de nombreuses habitations ont été incendiées. Des familles entières se trouvent confinées à la maison, la peur au ventre, pendant que beaucoup d’autres ont préféré s’éloigner de la commune urbaine pour se réfugier dans les villages environnants. A la tombée de la nuit, de nombreux jeunes issus, « des quartiers chauds,» se sont mobilisés pour sécuriser leurs lieux de culte.

Pour le moment, N’Zérékoré ressemble plutôt à une caserne. Des tirs d’armes automatiques le lot des quartiers. A quand la paix et sécurité, fruits de toute démocratie ?

Sakouvogui Paul Foromo