Sur le continent africain, certains s’interrogent sur l’avenir de la CPI, déjà critiquée pour ses affaires dirigées ‘’contre’’ les dirigeants africains. Certains Etats (Gambie, RDC, Soudan) ont même menacé de se retirer de ce machin. Sauf que la CPI bénéficie jusque-là du soutien de quelques Etats et du peuple africain. Mais si la Cour ne parvient pas à faire condamner les criminels africains puissants que les pays d’origine ne pourraient pas juger, cela renforce le doute et fait voler en éclats l’espoir du peuple africain martyrisé. Gbagbo, Blé Goudé, Jean Pierre Bemba, Uhuru Kenyata etc, tous des personnalités africaines mises en cause dans des conflits ayant fait des centaines ou des milliers de morts. Tous relâchés. Exceptés Gbagbo et Blé Goudé, dont la procédure n’est pas effective, même si tout porte à croire qu’ils seront libéres dans les jours avenir, surtout que le bureau du procureur se dit prêt à accepter une libération sous condition. En Côte d’Ivoire, cette libération annoncée sonne la déception des victimes de la crise postélectorale de 2010-2011. Karim Coulibaly a été amputé d’une jambe après une blessure par balle. « Nous, on s’est dit, maintenant : qui est à la base de ce qui nous est arrivé ? Qui est fautif ? Qui nous a tués, questionne le jeune homme. Vraiment je suis écœuré parce qu’avec ce qu’elle vient de faire, la CPI n’a pas rendu justice. On ne comprend pas cette justice-là ». Philomène Drouo, veuve depuis la mort de son époux tué en 2011. « On ne veut pas tout perdre. Ceux qui ont posé les actes, eux, aujourd’hui sont libérés. C’est nous qui souffrons. Nous ne sommes pas d’accord. On veut qu’il y ait de la justice. Qu’il y ait réparation totale, affirme-t-elle. On a rien reçu et jusqu’à aujourd’hui, on ne voit rien venir. On nous mène en bateau ». En Côte d’Ivoire, on redoute que le retour de Gbagbo conduit à la reprise des violences. Le président du Collectif des victimes de Côte d’Ivoire, Issiaka Diaby, dénonce une Cour pénale internationale incapable de lutter contre l’impunité. « Les crimes commis en 1995 n’ont pas eu de suite judiciaire… Les crimes commis en 2000, encore 3 000 morts… En 2010, il n’y a pas eu de suite judiciaire… Les politiques et les bras armés vont encore mieux peaufiner leurs plans pour placer les Ivoiriens en victimes ».
En RDC, condamné à 18 ans de prison ferme, Jean Pierre Bemba a été acquitté par la même CPI en appel. C’est un « coup dur pour les victimes en République centrafricaine », avait régit l’ONG Amnesty International. En Centre Afrique, plus de 5 000 victimes de son groupe rebelle, attendent d’être dédommagé.
Au Kenya, les charges ont été retirées contre Uhuru Kenyata accusé de crimes contre l’humanité, dont le meurtre, la déportation ou le transfert forcé de population, le viol, la persécution, et d’autres actes inhumains, qui auraient été commis pendant les violences post-électorales au Kenya en 2007-2008. L’audience de confirmation des charges s’est déroulée entre les 21 septembre et 5 octobre 2011. Les charges ont été retirées en raison de preuves insuffisantes. L’affaire est considérée close tant que le Procureur ne présente pas de nouveaux éléments de preuve.
En Guinée, le dossier du massacre au stade du 28 septembre traine. Les victimes voudraient que la CPI se saisisse de l’affaire, mais les autorités judiciaires guinéennes disent pourvoir connaitre le dossier. Les victimes désespérées, ne savent toujours pas à quelle date va tenir le procès. Ajouter à cela, les velléités de 3è mandat en gestation pourraient engendre des violences meurtrières, inquiètent plus d’un. Le chef de file de l’opposition a d’ailleurs annoncé que 2019 et 2020 ne seront pas du tout repos. Déjà, la répression a fait plus de 100 morts dans les rangs de l’opposition depuis 2010.
Si la seule arme dissuasive dont disposent les Africains martyrisés ne sert plus qu’à acquitter les prévenus, l’on se demande si la CPI ne donne pas raison à ceux qui la critiquent d’être plus une arme géopolitique postcoloniale que juridique. Ça craint !