La ville de Dinguiraye était sous tension dans la matinée de ce 8 décembre. En cause, un bras de fer entre les autorités et la jeunesse préfectorales autour d’une affaire de présumé détournement d’une douzaine de milliards de francs guinéens. Cet argent, versé par la Société minière de Dinguiraye (SMD) pour financer les projets de développement de la cité, serait géré de façon opaque par le préfet, lieutenant-colonel Mamadou Lamarana Diallo. Les  jeunes projetaient une manifestation cette semaine. Les tractations enclenchées hier et ce matin notamment par le gouverneur de la région administrative de Faranah n’ont pas abouti à grand-chose. Les jeunes ont battu le pavé ce mardi.  

Tôt le matin, des dizaines de jeunes ont commencé à se rassembler au rond-point central avec des pancartes et des banderoles. Ils demandent notamment le départ « immédiat et sans conditions du préfet. La jeunesse de Dinguiraye exige la mise à disposition du fonds FODEL (Fonds de développement local, ndlr ». Les manifestants réclament également la mise à disposition d’une machine à fabrique de briques et l’emploi des jeunes de Dinguiraye à la Société minière de Dinguiraye : « Nous avons adressé une requête à l’autorité préfectorale depuis plusieurs mois, elle n’a pas daigné répondre. Le différend concerne la contribution au développement local qui alimente le fodel. Le fonds a été payé par la SMD, mais nous n’avons pas accès au compte. Les autorités préfectorales refusent d’opérationnaliser le compte depuis plus de cinq mois » déclare Cheick Oumar Diakité, président du Comité d’appui à la gestion du fodel (CAGF). Il dénonce une immixtion du préfet dans les prérogatives du CAGF : « Nous avons demandé à ce que chacun respecte le manuel de procédure. Ils ont soumis des projets qui devraient normalement être engagés par nous  ». Ces projets dont Cheick Oumar Diakité parle, sont entre autres l’achat de motos qui ont été vues avec bien de conseillers communaux, mais aussi l’aménagement d’une plaine à Bamadala sans l’avis du CAGF.         

Mais la manifestation a été stoppée net par les agents des forces de sécurité au quartier Kouroula. Les manifestants souhaitent terminer leur marche à la préfecture, ils ont été confrontés à la hargne des agents venus, selon certaines sources, de Faranah : « Le matin, ils ont allumé la radio rurale, ils ont fait appel à des jeunes pour dire de ne pas manifester. Mais ils ont oublié que nous attendions cet argent depuis 8 mois. Nous suivions tranquillement notre itinéraire quand nous avons vu pleuvoir des grenades lacrymogènes. Les gendarmes ont commencé à poursuivre les gens dans les quartiers. Au début, les jeunes étaient déterminés. Quand on les chasse à gauche, ils se remobilisent à droite. Le gaz lacrymogène et les jets de pierres fusaient de partout » explique un responsable de la société civile locale.  

Les représailles auraient déjà commencé contre les organisateurs de la manifestation : « Ils sont en train de passer de famille en famille pour déposer des convocations contre les leaders. Les gens sont ciblés, tout le monde se cache actuellement ».

Pendant la manifestation, il y a eu des interpellations. Mais les jeunes promettent d’organiser une autre manifestation dans les prochains jours.

Yacine Diallo