A malin, malin et demi, dit-on. Le rajustement à la hausse des prix des produits pétroliers à la pompe, ce 1er juin, était presque devenu une certitude. Les Guinéens qui semblaient déjà résignés n’attendaient peut-être de connaître que l’ampleur de l’augmentation. Contre toute attente, le gouvernement a maintenu les prix intacts. Certains estiment que le gouvernement a cédé à la pression des acteurs sociopolitiques. Ce que dément Tibou Kamara, porte-parole du gouvernement : « C’est parce que le gouvernement a déjà renoncé à plus de 1000 francs guinéens que le litre est vendu à 9000 francs guinéens. Si l’Etat récupère tous les droits et taxes, le litre serait aujourd’hui à plus de 10 000 francs. Ce n’est pas lié (la non augmentation, ndlr) aux propos ou aux menaces des acteurs politiques. En réalité, je ne crois que le gouvernement ait officialisé sa volonté de procéder à une augmentation ce jour (1er juin, ndlr). Nous ne gouvernons ni avec la rumeur ni avec les humeurs des acteurs politiques. Cette augmentation est une décision économique indispensable, mais le gouvernement essaye toujours de s’adresser aux différents partenaires de manière à ce qu’elle n’ait pas des effets catastrophiques sur la qualité de vie de nos concitoyens. Donc nous sommes en discussions avec les différents partenaires (les transporteurs, les opérateurs économiques, les acteurs impliquées dans la vente du carburant) ». Quoi qu’il en soit, c’est une bonne nouvelle pour les Guinéens qui tirent déjà le diable par la queue.
Disparition des longues files devant les stations
Mais cette sorte de reculade du gouvernement ne fait pas que de heureux. Dès que la rumeur sur l’augmentation des prix du carburant à la pompe a commencé à courir dans la cité, des petits malins se sont planifiés pour multiplier les gains faciles. Ils ont passé la semaine écoulée à stocker par tous les moyens de grandes quantités de carburant dans l’espoir de les revendre très cher ou d’attendre que l’augmentation soit effective pour commencer à l’écouler. Mais ils ont été pris au dépourvu par la décision de maintenir les prix inchangés. A Conakry, beaucoup de gérants d’essenceries ont délibérément choisi de les fermer. Ce matin, les longues files d’attente ont tout simplement disparu. Et certains détaillants sont allés jusqu’à acheter le litre d’essence à 10 000 francs guinéens à la pompe dans l’espoir de se faire des profits.
Pire, des propriétaires de stations à Conakry et à l’intérieur avaient trouvé le moyen de sortir gagnants à tous les coûts. Nombre d’entre eux qui avaient l’habitude de charger un ou deux camion-citerne ont non seulement multiplié les approvisionnements, mais ont ensuite refusé de dépoter leur carburant. Ils attendaient que la mesure soit officialisée pour commencer à vendre le carburant qu’ils ont acheté à 9000 francs guinéens au nouveau prix que le gouvernement aurait fixé. Mais leur surprise fut vraiment grande et surtout désagréable. « Ceux qui se sont rués sur les stations-service ces derniers jours pour faire du stock de carburant en vue de le revendre plus tard, plus cher, on ne vous souhaite pas un incendie de maison, mais si la foudre tombe sur votre stock, nous ne serons pas trop mécontents », raille un internaute sur Facebook. Comme pour dire que le maintien du prix du carburant intact ne fait pas perdre que le gouvernement.
Yacine Diallo