Depuis les indépendances, le continent cherche la voie du développement et peine à sortir de la pauvreté. Le modèle pris par les Africains semble ne pas être le plus indiqué. Le virage du développement demeure toujours un mirage. Par la mondialisation, les pays africains sont soumis une fois encore, et plus que tous autres, aux dogmes néolibéraux. Une situation qui traduit l’expression d’une domination continue ou d’une perpétuation sans nom de la colonisation. Le choix reste difficile pour l’Afrique qui est déjà embarquée et intégrée dans le système où elle occupe une place d’éternelle vache à lait pour les pays à économie de marché.
Les modèles de développement servis à l’Afrique le maintiennent toujours dans une position non seulement de soumis au diktat du libéralisme, mais surtout dans une position de paupérisation généralisée. La démocratie est prescrite comme ultime remède pour sortir l’Afrique de la pauvreté.
Il n’y a pas de développement sans démocratie! Tel est le mot d’ordre donné par François Mitterrand aux présidents africains venus à la conférence de la Baule en 1990. En tous cas, depuis la conférence de la Baule, les Africains doivent s’ouvrir au multipartisme. L’organisation d’élections régulières et transparentes doit se faire au nom d’une ouverture démocratique. La bonne gouvernance doit être de mise pour mériter la confiance de la communauté internationale et des investisseurs étrangers et attirer les capitaux. Et le cycle infernal continue ! Rien de nouveau en tout cas pour sortir les Africains de leur situation de pauvreté. Pourtant à chaque fois qu’un pays africain organise des élections, tout le monde applaudit et ses voisins l’envient. Des sommes exorbitantes sont dépensées. Les élections sont financées à coup de milliards par les maigres ressources aux dépens du contribuable.
Par ailleurs, la communauté internationale y contribue souvent par le biais de l’Union européenne. Les conditionnalités liées à cette assistance ne sont jamais révélées, sans pour autant oublier la grande influence des multinationales. Ces nébuleuses sont sans doute, les nouveaux maitres du continent. Elles veillent au grain. Évidemment, elles ont aussi leurs candidats à appuyer pour la sauvegarde de leurs intérêts. Les élections en Afrique sont un véritable business qui a pour but de perpétuer un système.
Loin de nous l’idée de faire l’apologie d’un régime autoritaire avec le règne éternel d’un dirigeant, avec un parti unique sans le renouvellement de la classe politique. Je m’interdis d’utiliser le vocable d’alternance. Celle-ci, telle que pratiquée en Afrique, est un pur abus de la notion de démocratie. Dans tous les pays Africains où elle s’est produite par accident, si les hommes ont changé (le plus souvent ils reviennent par l’effet transhumance), les mêmes pratiques ou pires ont demeuré. Le clientélisme, la corruption et la collusion restent les choses les mieux partagées au sein de la haute administration.
Néanmoins, l’organisation des élections est à la mode en Afrique. Depuis une dizaine d’années, bon nombre de pays ont organisé des élections présidentielles. Et après ? Les résultats demeurent toujours les mêmes. Du Togo au Soudan, du Tchad au Rwanda, de l’Ouganda en Guinée, les présidents sortant rempilent. Drôle de coïncidences ! Et la misère des peuples continue.
De ce fait, la pertinence des élections dans les pays africains doit être repensée. La charrue avant les bœufs serait-on tenté de dire ? Dans des pays où la pauvreté demeure le lot quotidien des populations, le modèle de développement fiable pour régler les urgences de l’heure doit être la priorité. Le modèle importé a montré ses limites. Les élections ne devraient être qu’un passoir précédé par un projet apte à amener des solutions aux nombreuses difficultés des populations. Il ne faut pas s’enorgueillir du respect du calendrier républicain (expression qui ne signifie pas grand-chose), car la République appartient au peuple, et s’il existe une période où les populations sont prises pour des moins que rien, c’est bien celle des élections. Elles se limitent à des joutes oratoires d’une classe politique. Des individus, qui parfois brillent par leur ignorance impressionnante des réalités de la population. Étrangement, les plus bruyants et les plus désireux vivent la moitié du temps à l’étranger.
Les politiques locaux, quant à eux, sont composés de la bourgeoisie d’État et de ses acolytes complètement déconnectés des misères de la population. Pourtant, les promesses les plus fantaisistes et les plus farfelues sont tenues. Les alliances contre nature de tout genre sont nouées sur fond de marchandages pour des sinécures. C’est l’endogamie politique ou une bande d’amis, même s’ils peuvent se réclamer de courants de pensées différentes, ils se reproduisent et se recyclent continuellement au sein de l’appareil d’État. Dès lors, les élections ne sont plus l’opportunité qui permet aux populations de choisir le mode de gestion et de gouvernance qui leur sied. Les élections en Afrique demeurent tout simplement le moment pour départager de faux adversaires qui veulent chacun mettre la main sur la cagnotte au détriment de la pauvreté continuelle des populations. Le projet de société fiable reste remis aux calendes grecques.
Cheikh Seck