Dans le procès en appel l’opposant au parquet spécial près la Cour de répression des infractions économiques et financières et à l’Agent judiciaire de l’Etat, Amadou Damaro Camara a fait sa déposition le 10 avril. L’ex prési de l’Assemblée nationale rejette les accusations de « corruption » ayant engendré sa condamnation en première instance.

Condamné à 4 années d’emprisonnement, à 10 millions de francs glissants d’amende et solidairement avec ses coprévenus, Michel Kamano et l’homme d’affaires Kim à 5 milliards de francs glissants de dommages et intérêts, Amadou Dama-ronron Camara tente de se tirer d’affaire. Devant la Chambre des appels de la CRIEF, le ponte du RPG rejette les faits pour lesquels il croupit en taule. Pour lui, il est en prison non pas pour le détournement de l’argent destiné à la construction du siège de l’Assemblée nationale, mais pour des raisons politiques : « Je devais être condamné, parce que je suis Amadou Damaro Camara, parce que je suis le Président de l’Assemblée nationale. Je suis condamné pour des aprioris, pour des menaces imaginaires… C’est l’illustration d’un dossier que je qualifie de paradoxe du savon sale. »

La Chambre de jugement a reconnu que les fonds incriminés n’ont, à aucun moment, été utilisés à des fins personnels. Pour le condamné, elle évoque un détournement d’objectif. Le Dama-ronron, dans le pire des cas, il ne devait alors être épinglé que pour insuffisance professionnelle : « Le non-respect de la règle de l’attribution des marchés publics ne peut être assimilé à de la corruption. A la limite, c’est de l’insuffisance professionnelle. Une insuffisance qui n’a coûté aucun franc à la Guinée. »

Damaro explique avoir agi ainsi pour sauver un don fait par la Chine. Les Chinetoques ayant promis d’offrir à la Guinée un nouveau siège de l’Assemblée nationale, se sont fâchés quand le pouvoir guinéen a décidé unilatéralement de changer le site choisi : « Nous étions sur le point de perdre un don de 40 millions de dollars américains. Les Chinois ont menacé d’arrêter le projet si dans 60 jours, un site viabilisé n’est pas mis à leur disposition. J’ai écrit à l’Exécutif, on m’a dit qu’il n’y a pas d’argent. Par patriotisme ou peut-être par naïveté, j’ai demandé à la société CASTOR de Kim de viabiliser le nouveau site à ses frais. J’en ai fait la même chose avec la SEG pour l’eau et l’EDG pour le courant. Je les ai payés plus tard avec mon budget de souveraineté », explique l’ancien prési de l’Assemblée nationale.

Le parquet spécial reproche au prévenu de n’avoir pas ouvert le marché à la concurrence et de n’avoir pas pris en compte l’avis du mystère du Budget. Dama-ronron se défend : « Est-ce que l’Assemblée nationale doit demander au ministère du Budget ? Je dis, non. Pire, toutes les sociétés que nous avons contactées ont demandé un paiement de 30%. C’est en ce moment que j’ai tordu la main à Kim pour qu’il fasse les travaux. Il n’était même pas intéressé. »    

Le problème des primes des dépités (Covid-19) se pose. Ceux-ci, en vacances parle-mentaire sont sommés de rappliquer sur Cona-cris daredare, pour une scission extraordinaire portant sur la Loi de finances rectificative. Sauf qu’ils n’ont pas encore empoché leurs primes et Damaro les voit mal pointer à l’hémicycle sans leur fric. Entre-temps, les 15 milliards de francs glissants destinés au nouveau siège de l’Assemblée nationale sont disponibles, soit un an après. Dama-ronron y pioche, pour payer ses dépités et les convoquer pour la scission. Et vint le coup d’éclat du 5 septembre, avant que les fonds ne soient reconstitués : « Voilà pourquoi on me condamne à 4 ans d’emprisonnement et à 10 millions d’amende, pour corruption. » L’affaire est renvoyée au 17 avril, pour la suite des débats.

Yacine Diallo