Depuis que des secrétaires fédéraux de la Haute et Guinée forestière ont suggéré que Ousmane Gaoual soit réintégré et que Cellou Dalein devienne président d’honneur du parti, on assiste à un exercice de démonstration de force à l’Union des forces démocratiques de Guinée. Des lettres d’allégeance à la direction nationale et au président pleuvent sans arrêt.
C’est une drôle sortie de crise qu’un collège de secrétaires fédéraux de l’UFDG des régions de la Haute Guinée et de la Guinée forestière met sur la table. Dans un mémorandum daté du 1er avril (et reçu le 3), les 14 signataires suggèrent de : réintégrer les exclus, en l’occurrence Ousmane Gaoual Diallo ; ouvrir une transition devant faire de Cellou Dalein Diallo le président d’honneur du parti ; organiser un congrès unitaire, « associant l’ensemble des structures fédérales et les différentes sensibilités du parti. »
Quant à leurs motivations, les signataires précisent : « Face à la crise interne que traverse notre parti, exacerbée par le conflit opposant l’UFDG à Monsieur Ousmane Gaoual Diallo, dans un contexte où la ligne du parti apparaît fragilisée, nous estimons qu’il est impératif d’agir avec responsabilité et clairvoyance pour préserver les intérêts supérieurs de notre formation politique. » Et de renchérir : « Les récentes décisions du Tribunal de première instance de Dixinn, ainsi que les observations du Ministère de l’Administration du territoire et de la décentralisation, indiquent l’urgence d’une clarification interne. Dans cette situation, l’absence d’initiative collective risquerait d’installer une impasse durable, préjudiciable à la structure et à la lisibilité du parti. »
Putsch manqué contre Dalein ?
De quoi susciter des réactions hostiles. D’aucuns y ont vu une tentative de putsch contre le président de l’UFDG. Soupçonné d’avoir inspiré la rédaction du mémo, Joachim Baba Millimouno a été éjecté de son poste de coordinateur de la Cellule de communication du parti dès le 4 avril. Il a été remplacé par Souleymane Souza Konaté, jusque-là conseiller chargé de communication de Cellou Dalein Diallo. Joachim était déjà sur le gril, après avoir postulé pour être responsable de communication, suite à un concours du ministère de l’Administration du territoire, au compte de l’organisation des élections à venir.
Le 4 avril, certains signataires du mémorandum se sont retractés. Les uns (les secrétaires fédéraux de Beyla et Sinko) disent n’avoir jamais participé à sa rédaction et s’étonnent d’y voir leurs noms et signatures. D’autres (ceux de Macenta et de Guéckédou) admettent leur participation, mais soutiennent avoir émis des réserves sur deux points essentiels du mémo : la réintégration d’Ousmane Gaoual Diallo et l’éviction du président du parti.
Le bureau fédéral de Kissidougou (6 avril), celui de Siguiri (5 avril), le secrétaire fédéral de Kérouané et le bureau fédéral de Boké (7 avril)…tous se sont confondus en excuses, ont réitéré leur « soutien indéfectible » à Cellou Dalein Diallo et à la direction nationale du parti.
« Constance, résilience et détermination »
Même ceux qui n’étaient pas signataires du mémorandum ont prêté allégeance au leader de l’Union des forces démocratiques de Guinée. C’est le cas des secrétaires fédéraux du Grand Conakry, regroupant les communes de la capitale, de Coyah et de Dubréka. Ils rassurent de leur « ferme engagement » et de leur « détermination sans faille » à poursuivre le combat pour l’avènement d’un État de droit, aux côtés du parti et de Cellou Dalein Diallo. « Nous regrettons les manœuvres dilatoires et les manipulations visant à déstabiliser notre parti à travers cette énième tentative d’achat de consciences, savamment orchestrée par une horde haut perchée et à coup de centaines de millions, avec la complicité de certains cadres corrompus du parti », martèlent-ils.
Plus loin, les signataires poursuivent : « L’UFDG traverse certes des temps difficiles, mais ce n’est pas le moment d’abdiquer, car des millions de nos compatriotes animés d’esprits d’invincibilité soutenue ont foi et fondent grand espoir en notre parti. Nous devons tous savoir que les difficultés sont inhérentes à la vie de toute organisation et que si notre constance, notre résilience et notre détermination derrière le parti et son leader forcent l’admiration et le respect, elles forgent et suscitent malheureusement aussi, des sentiments de haine et de jalousie dans les cœurs de certains individus. »
Ousmane Gaoual Diallo, actuel ministre des Transports et porte-parole du gouvernement, fut coordinateur de la Cellule de communication de l’UFDG, avant d’être exclu du parti le 1er juin 2022. Il lui était reproché d’avoir rejoint le gouvernement sans aviser sa formation politique, alimentant d’interminables prises de bec avec ses anciens collègues. Outre contester son exclusion devant les tribunaux, Ousmane Gaoual ambitionne de ravir le leadership de l’UFDG à Cellou Dalein Diallo. Les deux camps rivaux avaient chacun programmé un congrès pour ce mois d’avril, avant que la justice n’ordonne sa suspension. Cette démonstration de force, par secrétaires fédéraux interposés, est une sorte de congrès qui ne dit pas son nom. Et Cellou Dalein Diallo veut démontrer qu’il a toujours la cote auprès des militants.
Diawo Labboyah Barry