C’est le résultat du mode de gouvernance mis en place dès le lendemain du départ des colons français, en octobre 1958.

En 1959 le nouveau Pouvoir envoie à Labé un gouverneur chargé de tenir à l’oeil cette région. Il trouve 2 grands chantiers d’extension au lycée et à l’hôpital, il les arrête. Lors d’une visite de jeunes activistes de l’UGEEG (Union Générale des élèves et étudiants de Guinée) dont j’étais, on la questionne:

– Pourquoi avez-vous fait arrêter les chantiers ?

Parce que vous les Peuls, vous êtes en avance sur les autres Guinéens, vous avez atteint l’abstrait ! Il faut vous freiner, le temps que les autres vous rejoignent.

-Et qui va aider les retardataires à combler leur retard ?

C’est nous les Malinké, le nouvel Etat est à nous

-Ah bon, à vous, comment ça ?

La capitale de l’Empire du Mali était dans notre région !

On saura plus tard qu’il ne parlait pas en son nom personnel mais au nom de l’UM (Union Mandingue) et du petit groupe qui en avait revêtu le manteau en guise de projet politique

Alors, progressivement, la petite bande de ST (Sékou Touré) et Cie faisait main basse sur tous les rouages du pays en s’appuyant sur le PDG érigé en parti-Etat. La RG devint, au fil des ans et des décennies, la chose d’un système à 3 composantes: un autocrate, un parti-Etat, une organisation tribale. Cette dernière rétrécira en famille: Sékou Touré, Ismael Touré-Alpha Touré- Siaka Touré- Mamadi Keïta.

Après la mort de Sékou Touré en 1984, les titulaires de son système sont balayés par le CMRN (Comité Militaire de Redressement National) et tout bonnement remplacés par des têtes nouvelles: Lansana Conté comme nouvel autocrate, PUP comme nouveau parti-Etat, comme nouvelle organisation tribale, le CRA (Comité de Réflexion et d’Action) créée auprès de Lansana Conté par des cadres soussous dont la liste fut publiée par des médias de l’époque.

Après la mort de Conté le système est à nouveau repris sous la forme (AC, RPG, UM).

Dans chaque cas le monstre (autocrate, parti-Etat, Organisation tribale) prend en otage l’Etat guinéen à seule fin de récupérer à titre personnel ses actifs, et bloquant le reste.

C’est ce processus, ininterrompu depuis 1958, explique l’état lamentable de la République de Guinée: écoles désastreuses, système sanitaire incroyable, routes impraticables, mines bradées, agriculture ruinée, etc. Pire, le phénomène migratoire généré par leur action maléfique. Territoire d’immigration au temps colonial, la RG s’est muée progressivement en pays exportateur de populations le plus reconnus du monde malgré ses grandes et diverses potentialités.

Des jeunes désespérés face à leur horizon complètement bouché se lancent sur les routes mortelles du Sahara, direction Méditerranée ou Détroit de Gibraltar, tout en sachant l’extrême dangerosité de l’opération, ça passe ou ça casse, comme ils disent ! Au total, près d’un Guinéen sur deux a fui son pays à son corps défendant, un record mondial!

En conclusion: nous allons élire bientôt une nouvelle gouvernance de la RG à l’issue de la Transition initiée le 5 septembre 2021 par le CNRD. La question, grave: allons-nous nous recoltiner ce système monstrueux (autocrate, parti-Etat, organisation tribale) ? Si on élit un Président et son parti, on est sûr à plus de 90% que ça évoluera comme les précédents, car c’est visiblement entré dans notre ADN. C’est pourquoi le CIC (Comité d’Initiatives Citoyennes), après mûre et longue réflexion, insiste sur un changement radical: remplacer la gouvernance personnelle par une gouvernance collégiale.

A l’élection présidentielle, les 3 premiers du scrutin, forment le Conseil Présidentiel (CP) à la place du tout puissant PR actuel, pour un mandat unique de 8 ans. Ainsi l’Exécutif de la République est l’émanation d’au moins 80% de la population, ce qui permet d’espérer une meilleure prise en compte de l’intérêt de tous les Guinéens de la part de l’Etat, tout comme l’élimination progressive de l’esprit tribal ancré en bien des Guinéens. Les 3 partis vainqueurs du scrutin forment la majorité présidentielle et les autres, l’Opposition.

1er du scrutin = Président de la République (PR), Chef de l’Etat

2e   du scrutin =Vice-Président de la République (VPR), Chef du Gouvernement

3e  du scrutin = VPR Chargé des moyens d’action de l’Etat (Fonction publique et Finances publiques)

Point de hiérarchie entre les 3. La prise de décision du CP s’effectue soit par consensus, soit par accord entre le PR et l’un des VPR. Le PR seul ne peut pas décider, les 2 VPR seuls non plus. En cas d’indisponibilité d’un membre du CP (décès ou démission) son parti organise un Congrès extraordinaire pour le remplacer pour le reste du mandat.

Si un comportement politicien en vient à gêner ou bloquer le fonctionnement normal du CP, le trio est dissous et des élections présidentielles, organisées pour désigner un nouveau CP. Si les membres du CP oublient que leur mission unique est la défense et la promotion de l’intérêt de tous les Guinéens au lieu de leur carrière personnelle, ils céderont aussitôt la place à d’autres. Les hommes passent, le peuple demeure.

Tout cela devra être accompagné d’une feuille de route pour le CP, indiquant les dossiers prioritaires de la Nation durant leur mandat (2e partie)

Pour le CIC, le Porte-parole:

El Hadj Amasadio Bah,

 Professeur de mathématiques à la retraite

saduma43@yahoo.fr

Rouen le 13/10/21